Jean-Claude LEMALLE

Une expérience de juge consulaire
Print Friendly, PDF & Email

Méthodologie de rédaction d'un jugement contentieux

Table des matières

1 – Introduction

Traditionnellement, le jugement civil comporte quatre parties :

  1. « l’en-tête » ou « le chapeau » du jugement, le plus souvent rédigé par le greffier sous le contrôle du juge, qui comprend les mentions prévues à l’article 454 du Code de procédure civile ;
  2. l’exposé du litige, qui est un exposé des faits, des prétentions et moyens des parties et qui contient les éléments de fait et de droit soumis à l’analyse du juge et délimitant la matière du procès, rédigé en style direct ;
  3. la motivation qui énonce le raisonnement par lequel le juge se livre à l’analyse des faits, à leur qualification juridique, à l’appréciation des moyens de preuve, à l’application des règles de droit utiles à la solution du litige et à l’expression de cette solution, rédigée, le plus souvent, en style indirect (succession de propositions subordonnées introduites par « attendu que » ou « que ») ;
  4. le dispositif qui présente la (ou les) décision(s) sur les différentes demandes, rédigé en une seule phrase comprenant un seul sujet (« le tribunal ») suivi d’une succession de propositions principales introduites par des verbes (condamne, rejette, prononce, dit que, ordonne…).

Toutefois, de plus en plus de magistrats ont abandonné cette méthode dite traditionnelle au profit du style direct pour la motivation comme pour l’exposé du litige.

Dans la pratique professionnelle, si chacun reste libre d’utiliser le style direct ou le style indirect, il faut proscrire tout changement de style dans l’exposé du litige ou dans la motivation.

2. – Le chapeau ou en-tête

Partie habituellement rédigée par le greffier, à partir des renseignements saisis lors de l’enregistrement de l’affaire.

Le juge ne doit pas négliger de vérifier l’exactitude des mentions qui y sont portées.

Article 454 du Code civil

« Le jugement est rendu au nom du peuple français.

Il contient l’indication :

  • de la juridiction dont il émane ;
  • du nom des juges qui en ont délibéré ;
  • de sa date ;
  • du nom du représentant du ministère public s’il a assisté aux débats ;
  • du nom du greffier ;
  • du nom, prénoms ou dénomination des parties ainsi que de leur domicile ou siège social ;
  • le cas échéant, du nom des avocats ou de toute personne ayant représenté ou assisté les parties ;
  • en matière gracieuse, du nom des personnes auxquelles il doit être notifié ». 

3. – L’exposé du litige : les FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

Si, aux termes de l’article 455 du Code de procédure civile :

« Le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens. Cet exposé peut revêtir la forme d’un visa des conclusions des parties avec l’indication de leur date »,

il ne faut pas négliger qu’il ne peut y avoir ni motivation, ni par conséquent de décision satisfaisante, sans une synthèse préalable correcte des éléments du litige. Or, c’est par la rédaction de l’exposé du litige que cette synthèse s’opère, non pas seulement sur le papier, mais dans l’esprit du juge.

3.1 – Les faits constants et pertinents

L’article 455 du Code de procédure civile n’oblige pas le juge à mentionner les faits qui sont à l’origine du litige. Mais on ne peut comprendre les demandes et l’argumentation des parties que si l’on connaît les faits de la cause.

C’est pourquoi, il est recommandé de commencer l’exposé du litige par une présentation des faits constants et pertinents. En effet, cette partie liminaire du jugement doit permettre à quelqu’un qui ignorerait tout du litige soumis au tribunal de comprendre quels sont les faits qui sont à son origine. Il est donc nécessaire de les rappeler synthétiquement mais de manière complète. Il doit, par conséquent, être objectif, neutre mais précis.

En principe l’exposé des faits constants et pertinents est rédigé en employant des verbes conjugués au passé (passé composé ou imparfait) et au style direct.

3.1.1 – Les faits constants

Article 7 alinéa 1 du Code de procédure civile :

« Le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat ».

Exemple : investigations personnelles du juge – note en délibéré non autorisée.

Mais, au regard de l’article 7 alinéa 2, il peut prendre en considération, des faits que les parties n’ont pas spécialement invoqués, mais qui ressortent des pièces produites.

Exemple : prendre en compte le contenu d’une clause du contrat, qui n’avait pas été spécialement invoquée.

Sont ainsi des faits constants, les faits qui ne sont pas contestés par les parties, c’est-à-dire les faits spécialement invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions, mais aussi les faits non spécialement invoqués par les parties mais qui ressortent de la lecture du dossier ou des documents produits.

3.1.2 – Les faits pertinents

Les faits pertinents sont ceux dont la connaissance est utile et nécessaire à la compréhension et à la solution du litige.

 L’exposé des moyens présentés par les parties doit permettre de délimiter l’objet du litige (ce qui est demandé/contesté) et sa cause (le fondement juridique de l’action engagée).

Le droit français distingue le moyen de l’argument :

  • le moyen consiste en un raisonnement juridique (la nullité du contrat est demandée, le moyen invoqué est le vice du consentement),
  • l’argument est de pur fait (le vice du consentement résulte de manœuvres dolosives de l’autre partie, qui a trompé son cocontractant sur la portée de l’engagement souscrit, par exemple en rédigeant de faux documents).

3.2 – L’exposé des moyens des parties

L’exposé des moyens des parties doit permettre de définir le cadre juridique dans lequel s’inscrivent les faits litigieux.

Mais il convient de distinguer :

  • l’objet du litige, que le juge ne peut pas modifier (c’est l’affaire des parties, selon le principe de procédure dit « principe dispositif ») ;
  • la qualification juridique du litige, qui appartient à la fois aux parties et au juge.

3.2.1 – L’objet du litige et moyens

II est déterminé par les prétentions respectives des parties, telles qu’exprimées dans leurs écritures.

Il est intangible pour le juge.

D’où, pour le juge, trois obligations : 

  • exposer les prétentions et moyens des parties, afin de délimiter ce qui sera l’objet du jugement. Cet exposé sera « succinct », aux termes du nouveau Code de procédure civile (art. 455) ;
  • ne pas dénaturer les pièces, spécialement les conclusions des parties, en prêtant à une partie des prétentions ou moyens qu’elle n’a pas invoqués. Exemple classique de la formule : « il n’est pas contesté que… », alors qu’une contestation existe ;
  • respecter les limites du litige, telles que les parties l’ont défini. C’est l’interdiction, pour le juge, de modifier l’objet du litige. Ainsi, le juge ne peut pas introduire dans le débat un fait que les parties n’ont pas invoqué (il s’agit, en fait, d’une violation du principe de la contradiction, le fait ainsi introduit dans le débat n’ayant pas fait l’objet d’une discussion contradictoire).

Si le fait et les prétentions sont le domaine des parties, le droit relève, principalement, de l’office du juge (« Donne moi les faits, je te donnerai le droit »).

Cet office du juge s’exprime d’abord dans la qualification juridique du litige.

3.2.2 – La qualification juridique du litige

Définition : il s’agit, à partir des faits mis dans le débat par les parties, et des prétentions que ces parties ont émises, de définir la question de droit à résoudre, ce qui implique à la fois l’identification de la situation de fait à une notion juridique, et l’énoncé de la règle juridique applicable.

Les deux opérations sont, en effet, nécessairement liées : si, victime d’une chute au cours d’une promenade à cheval organisée, je demande une indemnité à l’organisateur, j’invoque nécessairement sa responsabilité, cette responsabilité est nécessairement de nature contractuelle, et il s’en déduit l’application du régime juridique de cette responsabilité (articles 1147 et suivants du Code civil).

Il existe donc un lien logique qui conduit de l’appréhension d’une situation de fait (la chute, le dommage, la réclamation de la victime) à sa qualification c’est-à-dire son identification au regard des catégories juridiques admises (il s’agit de responsabilité contractuelle), et à l’affirmation du droit substantiel qui s’y applique.

Cette chaîne logique constitue la première étape du raisonnement du juge dans l’appréhension du litige et la préparation de la décision. Ce cheminement intellectuel est donc essentiel, car il va déterminer la première orientation du juge dans son travail de résolution du litige. A ce stade, déjà, il aura souvent à trancher une difficulté de qualification.

Exemple : un agriculteur prend un tracteur en location, puis le contrat est transformé, d’un commun accord, en location avec option d’achat, et il lève l’option (il achète l’engin). Des désordres mécaniques s’étant révélés, il en demande réparation à son bailleur-vendeur. Deux qualifications sont possibles : s’agit-il de la mise en œuvre de la garantie du vendeur pour les vices cachés de la chose vendue (il a levé l’option, il y a donc eu vente), ou de la garantie du bailleur pour les défauts empêchant l’usage de la chose louée (obligation moins rigoureuse que la garantie du vendeur, et qui n’obéit pas aux mêmes règles juridiques) ?

La qualification que le juge doit donner à ce litige va déterminer la règle de droit applicable (article 1641-1648 du Code civil pour la garantie du vendeur, article 1721 pour celle du bailleur).

Comme on le voit, la qualification est une des expressions les plus caractéristiques de cette fonction rationnelle et normative du juge, qui procède ainsi à l’analyse du rapport de droit litigieux, pour lui appliquer la règle de droit adéquate : il y a effort de rationalisation (analyse critique des faits et demandes des parties pour en retenir la substance « qualifiable juridiquement ») et exercice du pouvoir normatif (la qualification est déjà une décision du juge, qui énonce la norme compétente).

La qualification juridique, ainsi analysée, conduit à trois conséquences :

  • Le juge doit procéder à la qualification juridique du litige, avant d’examiner la valeur des prétentions respectives des parties. Exigence de pure logique : il faut définir et délimiter la question posée avant de tenter d’y répondre.
  • Le juge doit, au besoin, rectifier la qualification donnée par les parties. Il lui appartiendra, en ce cas, de veiller au respect du principe de la contradiction, en invitant les parties à s’expliquer sur la qualification qu’il entend retenir.
  • Le produit de l’effort de qualification sera le recensement précis des questions en litige, qui est un préalable indispensable à la rédaction d’une décision cohérente.

4. – La motivation

Les motifs sont l’exposé des raisons qui déterminent le juge.

L’obligation, quasi absolue, de motiver les jugements est une garantie essentielle pour le justiciable, car elle est destinée à le protéger contre l’arbitraire du juge : le juge doit s’expliquer et expliquer pourquoi il s’est déterminé.

L’obligation de motiver trouve sa source dans les textes de procédure : l’article 455 du nouveau Code de procédure civile l’énonce de manière lapidaire, à propos du jugement, au moyen de cette simple proposition : « II doit être motivé ».

Ce texte ne donne pas d’autre indication au juge, mais il est évident que le jugement doit être motivé en fait et en droit.

En ce qui concerne les faits, le juge est confronté à une double exigence :

  • d’une part, un libre pouvoir d’appréciation des faits (appréciation que la Cour de cassation qualifie de « souveraine »),
  • et, d’autre part, l’obligation de décider du fait, de donner une version des circonstances de la cause qui soit fondée sur l’affirmation et la certitude.

Sur le droit, le juge doit exposer clairement et complètement le cheminement de sa réflexion et les étapes intellectuelles de la prise de décision, en un mot, le raisonnement judiciaire.

4.1 – Le raisonnement judiciaire

Les motifs constituent, pour l’essentiel, l’exposé du raisonnement suivi par le juge.

Le raisonnement judiciaire consiste à appliquer la règle de droit adéquate à une situation de fait.

La première étape de ce raisonnement est, nous l’avons vu, la qualification juridique du litige.

Une fois la situation litigieuse qualifiée, et la règle de droit énoncée, il reste au juge à en faire une application logique : si le juge constate qu’un accident est dû à une faute, il doit obliger le responsable de cette faute à réparer le dommage, à moins qu’il ne trouve dans les faits du litige une cause d’exonération (la force majeure, par exemple).

On a souvent parlé à propos de ce type de raisonnement de syllogisme judiciaire. C’est en effet la forme la plus simple et la plus forte du raisonnement logique :

  • la loi prescrit que celui qui a causé à autrui un dommage doit le réparer ;
  • en l’espèce, X est responsable, par sa faute, du préjudice causé à Y ;
  • il s’en déduit logiquement que X doit réparation à Y.

Exemple : décision de la Cour de cassation, chambre civile 1 du 16/04/1996, n° 94-16528.

Il résulte de la loi (article 1101 et 1108 du Code civil, définissant le contrat) la règle, non-écrite, selon laquelle le silence, en principe, ne vaut pas acceptation.

Une Cour d’appel condamne une personne à payer le coût de réparations faites sur un bateau, mais non prévues par le devis initialement établi, au motif que le propriétaire du bateau, averti de l’utilité de ces travaux, s’est abstenu de répondre au réparateur.

La décision est cassée, car elle a méconnu la règle selon laquelle le silence ne vaut pas, à lui seul, acceptation d’une proposition de contrat.

La motivation apparaît ici dans sa fonction primordiale de justification rationnelle de la décision. L’on observera, en même temps, l’extrême brièveté de la décision de la Cour de cassation : huit lignes pour énoncer la règle de droit et l’appliquer au litige.

Cela étant, la motivation, pour être régulière et répondre à l’attente légitime du justiciable, doit satisfaire à plusieurs conditions.

4.2 – Les conditions d’une motivation régulière

Ces conditions, qui résultent de la jurisprudence par laquelle la Cour de cassation exerce son contrôle sur la motivation des décisions judiciaires, peuvent être regroupées sous cinq rubriques :

  • les motifs doivent exister, être réels,
  • ils doivent être pertinents,
  • suffisants,
  • rationnellement corrects,
  • et répondre aux moyens invoqués.

4.2.1 – Existence des motifs

Le défaut de motifs est, évidemment, un vice majeur de la décision judiciaire.

Ce n’est pas une hypothèse d’école, car souvent, dans les affaires par défaut, le juge se croit autorisé à faire droit à la demande du seul fait de la défaillance du défendeur, ce qui donne un simulacre de motivation tel que :

« Attendu que la défaillance du défendeur fait présumer qu’il n’a aucun moyen à opposer à la demande, qui est fondée ».

Le jugement doit donc exprimer de vrais motifs, qui justifient légalement et intellectuellement la décision.

La carence de motivation peut revêtir d’autres formes :

  • les motifs illusoires ou factices, tels : « Attendu que la demande est fondée » ; « Attendu qu’il résulte des débats que X a commis une faute dont il doit réparation à Y ».
  • la simple affirmation, ou le motif d’ordre général

Au motif d’ordre général est assimilé le motif imprécis, qui reste dans le vague, sans aborder le cas d’espèce de manière concrète.

De même sont proscrits, en principe, les motifs procédant par référence à une autre décision, même rendue entre les mêmes parties : le jugement doit se suffire à lui-même et contenir tous les motifs propres à justifier la solution retenue.

4.2.2 – Pertinence des motifs

II ne faut pas entendre par là que les motifs doivent être « intelligents », ou « de bonne qualité », ce qui va de soi, mais qu’ils doivent être en relation avec la question juridique soumise à la juridiction.

Le juge, chargé d’appliquer le droit, doit le faire sans s’écarter de la logique juridique.

Exemple : Ayant à juger de la responsabilité résultant d’un accident survenu au cours d’une randonnée à cheval, le juge ne peut pas appliquer à cette question d’autres critères que ceux de la loi, qui impose à l’organisateur une obligation de veiller à la sécurité des participants, en estimant qu’il devait rechercher si la situation de fait était ou non, « normale ».

Réels, pertinents, les motifs doivent également être suffisants, car l’insuffisance de motivation équivaut au défaut de motifs.

4.2.3 – L’insuffisance de motifs

Elle caractérise ce que la Cour de cassation appelle le manque de base légale : le jugement comporte des motifs, mais ils sont insuffisants pour justifier juridiquement la solution donnée, et pour permettre à la Cour de cassation d’exercer son contrôle sur l’application du droit.

Il en serait ainsi d’un motif fondé sur l’équité, mais également de motifs de droit insuffisamment complets au regard des exigences du texte appliqué.

Exemple : L’obligation du vendeur d’un matériel complexe (informatique, par exemple) comporte, non seulement la livraison du matériel, mais sa mise au point, avec, en plus une obligation accessoire d’information et de conseil du client. Est donc insuffisamment motivé (et manque de base légale au regard de la règle de droit applicable), la décision qui condamne l’acquéreur à payer le prix, au motif que la livraison a été acceptée, sans rechercher si le vendeur avait, en l’espèce, exécuté son obligation d’information et de conseil.

 Les motifs doivent, en outre, répondre à des critères minimums de rationalité.

4.2.4 – Rationalité des motifs

Les principaux vices qui peuvent affecter les motifs sont :

  • l’ambiguïté. Le motif doit être clair et affirmatif, il ne doit pas laisser la place à l’interprétation.
  • le caractère dubitatif ou hypothétique. Le motif est dubitatif « s’il laisse planer une incertitude sur l’exactitude de ses énonciations ». Ainsi, le motif énonçant que « dans ces conditions, il pourrait s’agir d’une faute contractuelle ».

Le motif hypothétique est celui qui « repose sur la supposition de faits dont la réalité n’est pas établie ».

Exemple : le juge estime qu’une clause contractuelle « semble impliquer » le droit de résiliation par une des parties.

4.2.5 – Le caractère contradictoire

La contradiction des motifs entre eux n’est sanctionnable au titre du défaut de motifs que dans le cas où il s’agit de motifs de faits, car la contradiction de droit se résout en violation de la loi ou manque de base légale.

Exemple : la Cour d’appel qui déboute le défendeur à une action en divorce pour rupture de la vie commune de sa demande en dommages-intérêts, au motif qu’il ne justifie pas d’un préjudice distinct de la rupture de la vie commune, tout en admettant que l’abandon dont il avait été victime avec ses enfants avait eu, à l’époque où il s’est produit, des conséquences considérables.

4.2.6 – La dénaturation

C’est l’erreur manifeste du juge, qui donne à un écrit un sens qu’il n’a manifestement pas selon ses termes clairs et précis. L’acte, en effet, pour être dénaturé, doit être clair, car toute ambiguïté laisse place à une interprétation qui exclut la dénaturation.

Peuvent être dénaturées les conventions, les décisions de justice, les pièces de la procédure, et la loi étrangère. Exemple de dénaturation d’une convention : la Cour d’appel qui juge qu’une partie, désignée dans la convention comme « caution », s’était en réalité engagée comme débiteur principal, en se fondant sur des éléments extérieurs au contrat.

Enfin, la motivation doit comporter la réponse à tous les moyens invoqués par les parties. En effet, le jugement tranche un débat, qui est fait de l’affrontement de thèses juridiques opposées, sur lesquelles le juge doit s’expliquer.

4.2.7 – L’obligation de répondre aux moyens des parties

L’obligation de réponse ne s’applique qu’aux conclusions régulières, pertinentes (ayant un rapport avec la question litigieuse) et articulant précisément un moyen de droit de nature à influencer la décision.

Il peut donc ne pas être répondu à des conclusions imprécises, ou ne comportant que des allégations de fait, ou un moyen de droit inopérant.

Ainsi peuvent être résumées les conditions nécessaires à une véritable motivation, celle qui expose le raisonnement juridique du juge et explique les raisons de la solution apportée au litige.

5. – Le dispositif

C’est l’énoncé synthétique de la décision du juge, partie finale de la décision, précédée de la mention « par ces motifs » formule traditionnelle, qui exprime le lien essentiel entre la décision et les motifs qui l’expliquent.

Tous les points en litige doivent trouver dans le dispositif une réponse décisoire, en cohérence avec les motifs qui en sont le soutien.

Il ne convient cependant pas de reprendre, dans le dispositif, les motifs sous forme de décision, mais seulement d’y exprimer les conséquences juridiques de la motivation. Ainsi, en matière de responsabilité, la motivation explicite les raisons qui permettent de déclarer une personne responsable, et le dispositif se limite à la déclarer responsable et à en déduire toutes conséquences (paiement d’indemnités, intervention de l’assureur, recours en garantie, etc.).

La décision du juge, « mémorisant et rationnalisant », doit avoir pour fonction principale de répondre à l’attente du justiciable qui, légitimement, peut exiger un « procès équitable » — au sens de la Convention européenne, c’est-à-dire, notamment, une décision fondée en fait et en droit sur des raisons clairement et logiquement exprimées.

@media print { @page { margin: 5mm !important; } }