Jean-Claude LEMALLE

Une expérience de juge consulaire
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La compétence d'attribution
des tribunaux de commerce

Table des matières

1. – La compétence des tribunaux de commerce definie par l’article 721-3 du code de commerce

La compétence des tribunaux de commerce est, principalement, définie par l’article L.721-3 du code de commerce, qui précise qu’ils connaissent :

1° – des « contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre établissements de crédit ou entre eux »,
2° – des « contestations relatives aux sociétés commerciales »,
3° – des « contestations relatives aux actes de commerce entre toutes personnes ».

1.1 – Article L.721-3 1° : engagements entre commerçants

Il apparaît donc nécessaire, en premier lieu, de définir qui a la qualité de commerçant, puis les litiges visés par cet article.

1.1.1 – La qualification de commerçant

1.1.1.1 – La qualification de commerçant pour une personne physique

La qualification de commerçant est définie par l’article L.121-1 du Code de commerce qui dispose que : « sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle ».

Est donc qualifiée de commerçant une personne qui par profession se livre habituellement à des actes de commerce, la jurisprudence y ajoutant que l’acte de commerce doit être réalisé à titre personnel.

Ces critères légaux et jurisprudentiels sont les seuls exigés.

L’immatriculation au Registre du commerce et des sociétés est donc impuissante à elle seule pour conférer la qualité de commerçant à une personne physique. 

1.1.1.1.1 – 1ière condition : faire acte de commerce

Si, pour avoir la qualité de commerçant, il faut accomplir des actes de commerce, il convient de définir quels sont les actes qu’il convient de définir, comme étant des actes de commerce.

L’article L.110-1 du code de commerce donne une liste d’activité réputée commerciale, à savoir :

  • Tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en œuvre (avec une finalité lucrative). Ainsi, l’achat pour revendre à titre habituel des biens meubles par l’intermédiaire d’un site de vente aux enchères électroniques constitue pour un particulier une activité commerciale (l’activité extractive n’est pas un acte, car il n’y a pas d’achat, sauf pour l’exploitation des mines au regard de l’article L. 131-3 du code minier) ;
  • Tout achat de biens immeubles aux fins de les revendre, à moins que l’acquéreur n’ait agi en vue d’édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre en bloc ou par locaux. Un lotisseur qui se contente d’acheter des terrains, de les viabiliser et de les revendre, réalise une opération commerciale ;
  • Toutes opérations d’intermédiaire pour l’achat, la souscription ou la vente d’immeubles, de fonds de commerce, d’actions ou parts de sociétés immobilières (agent immobilier) ;
  • Toute entreprise de location de meubles ;
  • Toute entreprise de manufactures (y compris l’activité d’édition où la production s’applique à des œuvres de l’esprit), de commissions, de transport, par terre ou eau ;
  • Toute entreprise de fournitures, d’agence commissionnaire, bureaux d’affaires (qui gère les affaires d’autrui, civiles ou commerciales), établissements de ventes à l’encan (vente aux enchères publiques), de spectacles publics (y compris organisateurs professionnels de spectacles).
  • Toute opération de change, banque, courtage, activité d’émission et de gestion de monnaie électronique et tous services de paiement ;
  • Toutes les opérations de banques publiques ;
  • Toutes obligations entre négociants, marchands et banquiers ;
  • Entre toutes personnes, les lettres de change (même établie isolément par des non-commerçants).

A la liste de l’article L.110-1 du Code de commerce, il faut ajouter celle de l’article L.110-2, qui vise les activités maritimes et les inclut dans la commercialité (construction, achats pour reventes, expéditions, affrètements, assurances…). Toutefois le patron pêcheur qui exerce à titre individuel, sur un navire d’une longueur inférieure ou égale à 12 mètres ou effectuant des sorties de moins de 24 heures, n’exerce pas une activité commerciale (loi n° 97-1051 du 18/11/1997, article 14, modifié par l’ordonnance n° 2005-554 du 26/05/2005).

La liste des articles L.110-1 et L110-2 du Code de commerce n’est d’ailleurs pas exhaustive. La jurisprudence reconnaît le caractère commercial à certaines activités que les textes ne visent pas :

  • les personnes qui accomplissent en bourse des opérations fréquentes, importantes et en font leur profession habituelle,
  • les personnes qui exploitent un camping,
  • les activités d’assurances, à l’exception de celles des compagnies d’assurances mutuelles qui ne recherchent pas, en principe, les bénéfices,
  • les opérations de transports (voyageurs ou marchandises), le remorquage, le déménagement).

La juridiction des tribunaux de commerce s’étend aux héritiers du commerçant lorsque le droit litigieux a été recueilli dans la succession du commerçant.

On admet la compétence des tribunaux de commerce à l’égard des personnes qui, sans avoir encore la qualité de commerçant, sont sur le point de l’acquérir. Lorsqu’une telle personne accomplit un acte pour les besoins de son futur commerce, elle est soumise aux règles commerciales. La solution est admise pour l’achat d’un fonds de commerce et même pour la promesse d’achat. Elle doit être étendue à tous les actes qui préparent la création d’un futur commerce lorsqu’ils sont indispensables à son exercice.

1.1.1.1.2 – 2ième condition : caractère habituel de l’acte

La qualification de commerçant, pour une personne physique, suppose :

  • l’accomplissement répété d’actes de commerce à titre professionnel. L’accomplissement d’un seul acte de commerce ou l’accomplissement occasionnel de ce type d’acte ne permet pas de retenir la qualification de commerçant. Il n’est nécessaire que ces actes constituent pour leur auteur leur profession principale,
  • que les actes de commerce, soient accomplis au nom et pour le compte de leur auteur.

L’absence d’immatriculation au registre de commerce et des sociétés n’empêche pas une personne d’être qualifiée de commerçante, si elle remplit les critères de l’article L. 121-1 du code de commerce.

1.1.1.1.3 – 3ième condition : accomplissement de l’acte à titre personnel

Les actes de commerce doivent être accomplis au nom et pour le compte de leur auteur.

Le conjoint commerçant n’est réputé lui-même commerçant que s’il exerce une activité commerciale séparée de celle de son époux (article L. 121-3 du code de commerce).

Les dirigeants des sociétés commerciales, en tant qu’organes  de la société, n’agissent pas en leur nom personnel mais au nom et pour le compte de la société qu’il représente. Ils ne sont pas commerçants.

1.1.1.1.4 – Quelques exemples

N’est pas commerçant :

  • un agent d’assurances, sauf s’il exerce également une activité de courtier (qui rapproche les parties en vue de la conclusion d’un contrat). Il ne représente pas les parties et ne participe pas à la conclusion du contrat,
  • le conjoint collaborateur, immatriculé comme tel au registre de commerce, car il est réputé avoir reçu du chef d’entreprise le mandat d’accomplir en son nom les actes d’administration concernant les besoins de l’entreprise (il en est de même du conjoint salarié),
  • le loueur d’un fonds de commerce, la location-gérance emportant la perte de la qualité de commerçant pour le propriétaire,
  • un gérant mandataire d’une succursale (article L. 146-1 à L. 146-4 du code de commerce),
  • le loueur d’un fonds de commerce,
  • le taxi qui exploite seul son véhicule.

Est commerçant :

  • toutes les personnes qui exploitent ensemble une même entreprise ou un même fonds de commerce alors qu’une seule est immatriculée au RCS en tant que commerçant,
  • le conjoint non immatriculé dès lors qu’il remplit les critères de qualité de commerçant,
  • le locataire-gérant,
  • les membres de société en formation, s’ils accomplissent des actes de commerce à titre professionnel et à titre personnel (sauf en cas de reprise des actes par la société),
  • le prête-nom (théorie de l’apparence).
1.1.1.1.5 – Le cas de l’artisan

A compter du 01/01/2022, les « contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre artisans, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement ou entre eux » relèvent de la compétence des tribunaux de commerce. 

Cette nouvelle compétence concerne les dossiers en cours à cette date (article 114 VIII de la loi  n° 2016-1547 du 18/11/2016)

1.1.1.1.6 – Le cas des assurances mutuelles

La Cour de cassation a décidé qu’en raison de leur objet non commercial, les sociétés d’assurances mutuelles échappent à la compétence des tribunaux de commerce.

1.1.1.1.7 – Le cas des associations

La loi de 1901 écarte en principe l’association de la vie des affaires, celle-ci se caractérisant par son but non lucratif.

Dans ces conditions, l’association n’exerçant aucune activité commerciale ne relève pas de la compétence des juridictions commerciales.

Il en résulte, qu’il peut être démontré que l’association exerce une activité commerciale, en réalisant des bénéfices ou profiter d’économie, elle relève alors du tribunal de commerce.

1.1.1.1.8 – Le cas de l’agent commercial

Celui qui n’accomplit pas d’actes de commerce en son nom et pour son compte personnel, bien qu’agissant à titre professionnel, n’a pas la qualité de commerçant (Cour de cassation chambre commerciale du 24/10/1995 n° 93-21866). Ainsi contrairement au courtier ou au commissionnaire, l’agent commercial n’a pas la qualité de commerçant.

Définition de courtier : professionnel dont le rôle est de mettre en relation deux ou plusieurs cherchant à réaliser des opérations telles que la vente ou l’achat de marchandises, ou la conclusion d’un contrat d’assurance (il n’est pas partie au contrat).

Définition de l’agent commercial : personne physique qui agit comme un simple mandataire indépendant, il n’a pas de clientèle propre et réalise des actes juridiques pour le compte de commerçants ou pour d’autres mandataires commerciaux (il agit pour le compte d’un tiers dont l’identité est connue).

Définition de commissionnaire : le commissionnaire est un intermédiaire de commerce qui agit en son nom mais pour le compte d’un commettant dans les limites du mandat qui lui est conféré et pour les opérations qui lui sont confiées (article 132-1 du code de commerce).

1.1.1.1.9 – Le cas des professions libérales

La loi du 22/03/2012 (n° 2012-387) donne une définition des professions libérales :

« Les professions libérales groupent les personnes exerçant à titre habituel, de manière indépendante et sous leur responsabilité, une activité de nature généralement civile ayant pour objet d’assurer, dans l’intérêt du client ou du public, des prestations principalement intellectuelles, techniques ou de soins mises en œuvre au moyen de qualifications professionnelles appropriées et dans le respect de principes éthiques ou d’une déontologie professionnelle, sans préjudice des dispositions législatives applicables aux autres formes de travail indépendant ».

Si la personne physique entre dans cette définition, elle sera qualifiée de libérale et relèvera en conséquence du tribunal de grande instance, y compris en ce qui concerne les procédures collectives.

S’il réalise des actes de commerce à titre personnel et professionnel, dans des conditions autres qu’accessoire, il pourra être qualifié de commerçant :

  • commissaire-priseur qui se livre régulièrement à des opérations d’achat pour revendre,
  • l’architecte qualifié de marchand de matériaux,
  • notaire qui se livrait habituellement à des opérations bancaires…
    1. Le cas les associés en nom et des associés commandités
1.1.1.1.10 – Le cas des associés en nom et des associés commandités

Article L. 221-1 du code de commerce :

« Les associés en nom collectif ont tous la qualité de commerçant… ».


Article L. 222-1 du code de commerce :

« Les associés commandités ont le statut des associés en nom collectifs ».

1.1.1.2 – La qualification de commerçant pour une personne morale

La loi prévoit dans certains cas que la forme choisie par les fondateurs de l’entreprise sociétaire confère la qualité de commerçant à la structure juridique, sans que l’activité exercée puisse avoir un impact.

Ainsi relèvent de la juridiction commerciale, soit par leur forme, soit par leur objet :

  • les groupements d’intérêt économique dont l’objet est commercial,
  • les sociétés, lorsque leur objet consiste en l’une des activités commerciales énumérées par les articles L.110-1 et L.110-2 du Code de commerce ou ajoutées par la jurisprudence à condition que cette activité ne soit pas artisanale,
  • les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple, les sociétés à responsabilité limitée, les sociétés par actions simplifiées et les sociétés en commandite par actions sont commerciales par leur forme, quel que soit leur objet (code de commerce article L.210-1 alinéa 2),
  • tous les établissements de crédit, y compris ceux qui ne poursuivent pas un but lucratif, caisse de crédit mutuel, ou caisse de crédit agricole,
  • les litiges où est en cause un établissement public à caractère industriel et commercial, dès lors qu’il ne soutient pas « avoir accompli une mission de service public administratif » (Cour de cassation chambre commerciale 06/01/2001 n° 98-15129).

Ne relèvent pas de la compétence des tribunaux de commerce :

  • les sociétés civiles, sauf si elles s’adonnent à une exploitation de nature commerciale,
  • les sociétés civiles professionnelles. Il en va de même des sociétés constituées conformément à la loi relative à l’exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ( n° 90-1258, 31 déc. 1990) qui relèvent, sous réserve des compétences des juridictions disciplinaires, des tribunaux civils (Code de commerce article 721-5),
  • les sociétés d’assurances mutuelles.

1.1.2 – Litiges visées par l’article L. 721-3 1° du Code de commerce

Le terme « engagement », figurant dans l’article L. 721-3 1°, ne comprend pas que les actes juridiques, principalement les relations contractuelles, mais également les rapports extracontractuels, qu’ils soient délictuels, quasi-délictuels ou quasi-contractuels. Ainsi, les tribunaux de commerce sont compétents :

  • pour statuer sur la « réparation des dommages causés par les navires de mer, les bateaux de navigation intérieure et tous engins de transport par voie d’eau » (COJ, art R. 311-5),
  • pour connaître des faits constitutifs de concurrence déloyale,
  • certains tribunaux de commerce ont reçu compétence pour statuer sur les pratiques anticoncurrentielles (Code de commerce article L. 420-7),
  • pour connaître d’une campagne de dénigrement entre deux sociétés commerciales (Cour de cassation chambre civile 2 du 05/07/2000),

Toutefois, deux limitations doivent être apportées à la compétence des tribunaux de commerce, dont l’une est d’ailleurs incertaine :

  • d’’une part, les litiges entre commerçants, sociétés commerciales ou entreprises publics ne relèvent de la compétence des tribunaux de commerce que s’ils sont relatifs à l’activité commerciale des intéressés (COJ art. L.411-7),
  • d’autre part, la jurisprudence apporte une seconde limitation à la compétence des tribunaux de commerce. En principe, ceux-ci ne peuvent pas connaître des actes constitutifs ou translatifs de droit réels immobiliers. L’article 110-2 2° du code de commerce, en commercialisant les entreprises qui achètent des immeubles pour les revendre, a inclus dans la compétence des tribunaux de commerce des litiges concernant des acquisitions et des ventes immobilières. On peut donc penser que, renversant la solution traditionnelle, la jurisprudence décidera que les actes constitutifs et translatifs de droit réel immobiliers ressortissent à la compétence des tribunaux de commerce, lorsqu’ils sont accomplis par un commerçant pour les besoins de son commerce.

1.2 – Article L. 721-3 2° : Contestations relatives aux sociétés commerciales

1.2.1 – Personnes visées par l’article L. 721-3 2° du Code de commerce

Dès lors que la contestation est relative à une société commerciale (par l’objet ou par la forme), les tribunaux de commerce sont compétents :

  • il n’est pas nécessaire que la société ait la personnalité morale. Une contestation relative à une société en participation de nature commerciale ressortit au tribunal de commerce, il en est de même à l’égard d’une société créée de fait,
  • afin de connaître de contestations où sont en cause des dirigeants d’une société commerciale, même si ceux-ci ne sont pas commerçants, dès lors que le litige est relatif à la société. Les contestations relatives à la nomination, à la révocation, à la responsabilité des dirigeants sociaux, relèvent ainsi de la juridiction consulaire.

Les tribunaux de commerce peuvent, également, statuer sur des contestations entre les associés d’une société commerciale, ils connaissent aussi des différends entre la société et ses associés. Ils sont encore compétents à l’égard des héritiers d’un associé, assignés en cette qualité.

On peut soutenir qu’ils peuvent désormais statuer sur une demande dont l’objet est l’existence même de la qualité d’associés, car un tel litige est relatif au pacte social.

1.2.2 – Litiges visés par l’article L.721-3 2° du Code de commerce

L’article L.721-3 2° s’applique aux litiges où est en cause l’existence ou l’application du pacte social tels les différents relatifs à la constitution, au fonctionnement ou à la dissolution d’une société commerciale.

La juridiction consulaire peut ainsi connaître de la demande, par exemples :

  • d’un actionnaire contre la société aux fins de communication d’un document,
  • de la demande d’actionnaires minoritaires tendant à obtenir la désignation d’un expert afin de présenter un rapport sur une opération de gestions susceptible de mettre en jeu la responsabilité des dirigeants,
  • de l’action d’un associé qui réclame sa part de bénéfice,
  • de la souscription d’actions, ou de la nullité de la société,
  • des relations entre une société commerciale et ses associés ou entre associés.

La Cour de cassation a jugé qu’en principe la cession de droits sociaux est de nature civile, et ne ressortit donc pas de la compétence des tribunaux de commerce, car le litige concerne le contrat de cession, et n’est pas rattaché au pacte social.

Toutefois, dans certaines hypothèses, un tel acte peut relever de la connaissance de la juridiction commerciale. Il en est ainsi quand la cession porte sur la totalité des parts ou actions d’une société commerciale, car la cession cache alors une vente de fonds de commerce.

1.3 – Article L. 721-3 3° : Contestations relatives aux actes de commerce entre toutes personnes

L’article L.721-3 3° du Code de commerce attribue à la justice consulaire, compétence pour connaître des contestations relatives aux actes de commerce entre toutes personnes.

Cette compétence concerne certains actes qui sont de nature commerciale, même lorsqu’ils sont accomplis par des non-commerçants.

Entre dans cette catégorie :

  • la lettre de change (Code de commerce article L.110-1). Ainsi un non-commerçant qui signe une lettre de change relève du tribunal de commerce pour tous les litiges qui pourraient en naître, sans devenir pour autant commerçant,
  • l’engagement d’aval porté sur une lettre de change par un non-commerçant est lui aussi de nature commerciale,
  • il en est de même pour le billet à ordre, mais seulement lorsque le billet porte en même temps des signatures de commerçants et de non-commerçants (code de commerce article L. 721-4). Toutefois, le tribunal de commerce, est tenu de renvoyer au tribunal de grande instance s’il en est requis par le défendeur lorsque les billets à ordre ne portent que des signatures de non-commerçants et n’ont pas pour occasion des opérations de commerce (code de commerce article L. 721-4 alinéa 2),
  • il convient sans doute, malgré le silence de la loi, de reconnaître encore le caractère d’acte de commerce quelles que soient les personnes qui les accomplissent, aux actes relatifs à la constitution, au fonctionnement et à la dissolution des sociétés commerciales,
  • la caution, qui, bien que n’ayant pas la qualité de commerçant, a toutefois un intérêt patrimonial personnel à la dette contractée par le débiteur commerçant qu’elle a cautionné, tel le dirigeant social, même non commerçant, pour garantir les dettes de la société qu’il dirige a un caractère commercial,
  • les opérations sur fonds de commerce (vente, nantissement, location-gérance) sont assez rarement conclues entre deux commerçants, l’acheteur n’étant pas encore commerçant, et bien souvent le vendeur ou le loueur du fonds ne l’étant plus. Pourtant, la jurisprudence considère par une interprétation extensive, que ces opérations relèvent de la compétence commerciale puisque ce sont des actes ayant pour objet l’exercice du commerce, qui constitue au demeurant, l’un des premiers actes de l’activité commerciale (pour l’acheteur du fonds ou le locataire-gérant au moins). Il a été ainsi jugé que la promesse d’achat d’un fonds de commerce est un acte de commerce, il en est de même pour la vente du fonds de commerce. Il a également été admis que le fait de prendre à bail un immeuble pour l’exercice du commerce était un acte de commerce.

2. – La compétence des tribunaux de commerce au regard de l’article L. 721-4 du Code de commerce

Article 721-4 du code de commerce :

« Le tribunal de commerce connaît des billets à ordre portant en même temps des signatures de commerçants et de non-commerçants.

Toutefois, il est tenu de renvoyer au tribunal de grande instance s’il en est requis par le défendeur lorsque les billets à ordre ne portent que des signatures de non-commerçants et n’ont pas pour occasion des opérations de commerce, trafic, change, banque ou courtage ».

Si le tribunal de commerce est compétent en ce qui concerne les billets à ordre, portant en même temps des signatures de commerçants et de non-commerçants, il est tenu de renvoyer au TGI si :

  • d’une part, cela lui est demandé par le défendeur,
  • et si d’autre part, les billets à ordre ne portent que des signatures de non-commerçants et n’ont pas pour occasion le commerce.

Cette compétence n’est pas exclusive.

3. – La particularité des sociétés relative à l’exercice sous forme de société des professions libérales

Article L. 721-5 du code de commerce

« Par dérogation au 2° de l’article L. 721-3 et sous réserve des compétences des juridictions disciplinaires et nonobstant toute disposition contraire, les tribunaux civils sont seuls compétents pour connaître des actions en justice dans lesquelles l’une des parties est une société constituée conformément à la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l’exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, ainsi que des contestations survenant entre associés d’une telle société.

Néanmoins, les associés peuvent convenir, dans les statuts, de soumettre à des arbitres les contestations qui surviendraient entre eux pour raison de leur société ».

Ainsi, litiges opposants une SEL (société d’exercice libéral), à un tiers, ainsi que les contestations survenant entre associés de telles sociétés sont la compétence des TGI.

Pour les litiges entre associés, une clause compromissoire peut figurer dans les statuts.

4. – Autres textes relatifs à la compétence d’attribution des tribunaux de commerce

4.1 – Texte étendant la compétence des tribunaux de commerce

La principale extension de la compétence des tribunaux de commerce a pour objet la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires.

L’article L. 621-2 du Code de commerce attribue compétence aux tribunaux de commerce pour connaître des procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire et liquidation judiciaire des entreprises commerciales et également artisanales, qu’elles soient exploitées par des personnes physiques ou sous forme sociale.

Cette compétence commerciale s’applique encore à toute extension de la procédure ouverte devant le tribunal de commerce à d’autres personnes, même non commerçantes.

On pourrait encore citer divers textes.

  • ainsi, l’article L.782-5 du Code de travail confie aux tribunaux de commerce les litiges concernant les modalités commerciales d’exploitation de la succursale, et non la résiliation du contrat de gérant,
  • l’article L.422-4 du code de l’aviation civile fait de même lorsqu’un différend oppose l’exploitant d’aéronef au commandant de bord à l’occasion des actes accomplis par celui-ci dans l’exécution de son mandat.
  • Un décret du 20 novembre 1959 énonce que ressortissent au tribunal de commerce les litiges « survenus entre les armateurs et les capitaines » (Décret n°59-1337, 20/11/1959), compétence qui n’est pas limitée aux périodes d’embarquement.

4.2 – Textes restreignant la compétence des tribunaux de commerce

La compétence des tribunaux de commerce est ainsi très restreinte, en matière de propriété intellectuelle ou même mobilière.

La compétence des tribunaux de commerce est ainsi restreinte en matière de propriété intellectuelle, en faveur du TGI, dont la compétence est ici exclusive (COJ, article L.311-2)

Le tribunal est également incompétent pour connaître des marques de fabrique, de commerce, ou de service, ainsi que des « actions mettant en jeu à la fois une question de marque et une question de dessin et de modèle de concurrence déloyale connexes (Code de la propriété intellectuelle, article L 716-3)

Le tribunal de commerce est incompétent en matière d’obtentions végétales (Code de la propriété intellectuelle article L.623-31) et d’appellations d’origine (Code de consommation article L.115-10)

Les litiges relatifs aux accidents du travail sont également soustraits à la compétence des tribunaux de commerce, Ils relèvent du contentieux de l’incapacité (Code de la sécurité sociale article L. 143-2)

Le tribunal de commerce est également incompétent pour connaître des difficultés d’exécution de ses décisions (CPC, article 877), seul le Juge de l’exécution intervient (Code de l’organisation judiciaire  article L. 213-6).

Voir toutefois l’article L. 131-3 du code des procédures d’exécution, qui précise concernant l’astreinte :

« L’astreinte, même définitive, est liquidée par le juge de l’exécution, sauf si le juge qui l’a ordonnée reste saisi de l’affaire ou s’en est expressément réservé le pouvoir ».

DOCUMENTATION

DALLOZEncyclopédies/Répertoire de droit commercial : Compétence commercialeCommerçant.

DALLOZ Droit et pratique de la procédure civile : Rubrique 235-20

Site A. Bamdé et J. Bourdoiseau: compétence du tribunal de commerce

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