Jean-Claude LEMALLE

Une expérience de juge consulaire
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Les modalités de réalisation des actifs d'un débiteur en liquidation judiciaire : immeubles et autres biens

Table des matières

1. Règles communes à toutes réalisations d’actifs d’un débiteur en liquidation judiciaire

L’article L. 641-7 dispose que ” le liquidateur tient informés, au moins tous les trois mois, le juge-commissaire, le débiteur et le ministère public du déroulement des opérations “. Ainsi, le débiteur dessaisi de la gestion de ses biens sera donc informé quand même du sort de son patrimoine.

1.1 – Concernant le patrimoine de l’entrepreneur individuel (applicable aux ouvertures de liquidation judiciaires postérieures au 15/05/2022)

L’article L. 641-9 alinéa 1 dispose que :

Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens composant le patrimoine engagé par l’activité professionnelle, même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur “.

Au regard des articles L. 641-9 alinéa 1 et L. 681-2, l’ouverture d’une liquidation judiciaire, concernant un entrepreneur individuel, peut s’effectuer suivant 3 schémas différents :

  •  cas n° 1 : ouverture d’une liquidation judiciaire unipatrimoniale, limitée au seul patrimoine professionnel, dans l’hypothèse où d’une part, concernant le patrimoine professionnel, les conditions d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire collective sont remplies, et d’autre part, concernant le patrimoine personnel, l’entrepreneur individuel n’est pas en situation d’endettement  (application de l’article L. 681-2 II),
  • cas n° 2 : ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire ” bipatrimoniale ” englobant le patrimoine professionnel et personnel, dans l’hypothèse où les conditions d’ouverture d’une liquidation judiciaire et celles d’une procédure de surendettement des particuliers sont remplies, et que l’entrepreneur individuel, soit n’a pas respecté strictement la séparation du patrimoine professionnel et du patrimoine personnel, soit un créancier professionnel peut se faire payer sur le patrimoine personnel  (article L. 681-2 III),
  • cas n° 3 : ouverture d’une liquidation judiciaire sur le seul patrimoine professionnel, dans l’hypothèse où d’une part les conditions d’ouverture d’une liquidation judiciaire et celles d’une procédure de surendettement des particuliers sont remplies, et d’autre part, la séparation des patrimoines a été respectée par l’entrepreneur individuel et aucun créancier professionnel ne pouvant se faire payer sur le patrimoine personnel  Dans cette hypothèse,  le tribunal saisit la commission de surendettement avec l’accord du débiteur (article L. 681-2 IV).   

1.1.1 – Cas n° 1 : ouverture d’une liquidation judiciaire limitée au seul patrimoine professionnel

Le débiteur personne physique n’est pas dessaisi de la gestion de son patrimoine personnel, dont il conserve l’entière disposition et ceci au regard des engagements qu’il aurait pu prendre.

Il en résulte que le liquidateur judiciaire ne dispose d’aucun pouvoir sur ce patrimoine professionnel.

1.1.2 – Cas n° 2 : ouverture d’une liquidation ” bipatrimoniale ” englobant le patrimoine professionnel et le patrimoine personnel

Dans ce cas, comme avant la réforme, le débiteur personne physique est dessaisi de son patrimoine professionnel et de son patrimoine personnel.

Si le liquidateur peut appréhender l’ensemble des biens (professionnels et personnels) , il ne pourra distribuer les produits des ventes indifféremment entre les créanciers professionnels et les créanciers personnels, il devra respecter les gages de chacun.

1.1.3 – Cas n° 3 : ouverture par le tribunal de commerce d’une liquidation judiciaire limitée au seul patrimoine professionnel.

Situation identique au cas n° 1 si ce n’est qu’éventuellement une procédure de surendettement à été ouverte par la commission de surendettement, ce qui aura des conséquences concernant le patrimoine personnel.

1.1.4 – Biens communs

Aux termes de l’article 1413 du Code civil ” le paiement des dettes dont chaque époux est tenu, pour quelque cause que ce soit, pendant la communauté, peut toujours être poursuivi sur les biens communs… “, les biens communs sont donc soumis aux contraintes de la procédure collective

Le liquidateur peut donc vendre les biens communs pour payer les dettes de l’époux en liquidation judiciaire, à la condition que le tribunal est ouvert une liquidation ” bipatrimoniale ” (cas n° 2), à défaut le liquidateur n’a aucun pouvoir sur les biens appartenant à la communauté.

Rappelons de plus, que le liquidateur judiciaire ne peut répartir les sommes acquises par ces cessions qu’aux créanciers personnels, sauf engagements spécifiques du débiteur  (sûreté réelle, créanciers fiscaux et sociaux, renonciation à la séparation des patrimoines).

1.1.5 – Biens indivis

Comme précédemment ce paragraphe ne peut trouver à s’appliquer que si le tribunal a ouvert une liquidation judiciaire ” bipatrimoniale ” (cas n° 2).

Contrairement aux biens communs, les biens indivis (régime de séparation de biens ou indivision ordinaire entre deux ou plusieurs personnes) n’appartiennent au débiteur qu’à proportion de sa part indivise.

1.1.5.1 – Indivision avant l’ouverture de la procédure collective

L’article 815-17 alinéa 1 du Code civil dispose que ” les créanciers qui auraient pu agir sur les biens indivis avant qu’il y eût indivision, et ceux dont la créance résulte de la conservation ou de la gestion des biens indivis, seront payés par prélèvement sur l’actif avant le partage. Ils peuvent en outre poursuivre la saisie et la vente des biens indivis “.

Cet article ne concerne donc que les créanciers de la totalité des indivisaires, qui seuls peuvent saisir le bien indivis sans avoir à déclarer leur créance. Ils ont le droit d’être payés sur le bien avant tout partage. C’est donc le droit de l’indivision qui s’applique et non le droit des procédures collectives (Cour de cassation, chambre commerciale du 20/09/2017, n° 16-14295).

Ce même créancier de l’indivision qui entend poursuivre la saisie d’un bien indivis du droit qu’il tient de l’article 815-17 alinéa 1 du Code civil n’est pas tenu de saisir le juge-commissaire (Cour de cassation, chambre civile 1 du 24/05/2018, n° 16-26378). 

Si la personne n’est pas créancière de la totalité des indivisaires, elle perd le droit de saisir le bien avant tout partage. Toutefois, ce créancier ” la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur ou d’intervenir dans le partage provoqué par lui. Les coïndivisaires peuvent arrêter le cours de l’action en partage en acquittant l’obligation au nom et en l’acquit du débiteur. Ceux qui exerceront cette faculté se rembourseront par prélèvement sur les biens indivis ” ((alinéa 3 de l’article 815-17 du Code civil). 

De son côté, le liquidateur peut demander le partage et la licitation du bien, sans avoir besoin de l’autorisation du juge-commissaire.

1.1.5.2 – Indivision après l’ouverture de la procédure collective

Si l’indivision est apparue après l’ouverture de la procédure collective, l’indivision est ici dominée par la procédure collective qui l’a précédée.

L’indivision apparue après l’ouverture de la procédure collective – par exemple celle résultant du décès du débiteur – restera en conséquence inefficace ( Cass. com., 18 févr. 2003, n° 00-13.100). Le liquidateur aura, seul la possibilité de vendre le bien indivis, sous réserve du jeu de l’article L. 643-2 du Code de commerce qui autorise les créanciers inscrits sur un bien à réaliser celui-ci en cas d’inaction du liquidateur.

1.1.6 – Concernant le sort des biens successoraux

Article L. 642-22 I

”  I. — Le liquidateur ne peut, sauf accord du débiteur, réaliser les biens ou droits acquis au titre d’une succession ouverte après l’ouverture ou le prononcé de la liquidation judiciaire, ni provoquer le partage de l’indivision pouvant en résulter.

A noter que la question concernant la cession de ses biens ne se pose que dans l’hypothèse de l’ouverture d’une liquidation judiciaire ” bipatrimoniale “.
 

1.1.7 – Réalisation de biens insaisissables

 
Article L. 642-22 II et III
 
II. — Sur la demande du débiteur et avec l’autorisation du juge-commissaire ou du tribunal, le liquidateur peut réaliser des biens ou droits composant un autre patrimoine de l’entrepreneur ou insaisissables par les créanciers dont les droits naissent à l’occasion de l’activité professionnelle de celui-ci, lorsque cette cession facilite la réalisation des actifs du patrimoine saisi par l’effet de l’ouverture de la liquidation judiciaire.
 
III. — La contrepartie de la valeur de ces biens ou droits s’y substitue dans le patrimoine dont ils sont issus “.
 

1.1.8 – La création d’un nouveau patrimoine professionnel en cas de reprise d’une activité par l’entrepreneur individuel en liquidation judiciaire

 
Article L. 681-2 :
 
VII. — Lorsqu’une procédure de liquidation judiciaire est ouverte, l’entrepreneur individuel peut exercer une nouvelle activité professionnelle. Un nouveau patrimoine professionnel est alors constitué. Ce patrimoine professionnel n’est pas concerné par la procédure ouverte.
 
Le débiteur ne peut constituer plus de deux patrimoines distincts de son patrimoine personnel.
 
La faculté d’exercer une nouvelle activité professionnelle dans les conditions prévues au premier alinéa du présent VII ne s’applique pas au débiteur qui, au titre de l’un quelconque de ses patrimoines, a fait l’objet, depuis moins de cinq ans, d’une procédure de liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d’actif ou d’une décision de clôture d’une procédure de rétablissement professionnel.
 
En cas de scission du patrimoine professionnel prévue au présent VII, le jugement de liquidation judiciaire emporte interdiction de toute opération entraînant une diminution de l’actif du patrimoine faisant l’objet de la procédure au profit de toute autre activité exercée par le débiteur “.

1.2 – Publicités préalables à la vente

L’article L. 642-22-1 du Code de commerce précise que ” toute cession d’entreprise et toute réalisation d’actif doivent être précédées d’une publicité... “.

L’article R. 642-40 en défini les modalités, à savoir :

En application de l’article L. 642-22-1, la publicité des cessions d’entreprises et des réalisations d’actifs est faite par les mandataires de justice au moyen d’un service informatique accessible par l’internet.

 Toute cession d’entreprise fait l’objet d’une publicité par voie de presse. Son étendue est définie par le juge-commissaire. Le juge-commissaire détermine s’il y a lieu d’effectuer une publicité par voie de presse pour les actifs de faible valeur.
 
Le liquidateur, ou l’administrateur lorsqu’il en a été désigné, communique au greffe les caractéristiques essentielles de l’entreprise ou de la ou des branches d’activité susceptibles d’être cédées. Tout intéressé peut prendre connaissance de ces informations au greffe…”. 
 

1.3 – Transmission du contrat d’assurance du bien cédé

En application de l’article L. 121-10 du Code des assurances, l’assurance continue de plein droit au profit de l’acquéreur en cas d’aliénation de la chose assurée.
 
La solution vaut pour les meubles et les immeubles et pour toute forme d’aliénation. Elle s’applique en conséquence en cas de vente d’un fonds de commerce en liquidation judiciaire.
 

1.4 –  Autorisation de vente donnée par le juge-commissaire

1.4.1 – Caractère obligatoire

La réalisation d’un actif du débiteur, ne pourra s’effectuer qu’après une ordonnance rendue par le juge-commissaire. Toutefois, en liquidation judiciaire simplifiée, le juge-commissaire n’aura pas à intervenir dans le processus de réalisation des actifs du débiteurs (paragraphe 1.4.2).

Le juge-commissaire ne peut être saisi que par le liquidateur, sauf en cas d’inaction du liquidateur (article L. 643-2).

L’article L. 643-2 précise en effet que ” les créanciers titulaires d’un privilège spécial, d’un gage, d’un nantissement ou d’une hypothèque et le Trésor public pour ses créances privilégiées peuvent, dès lors qu’ils ont déclaré leurs créances même s’ils ne sont pas encore admis, exercer leur droit de poursuite individuelle si le liquidateur n’a pas entrepris la liquidation des biens grevés dans le délai de trois mois à compter du jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire “.

A noter également, que le plan de cession, dont l’arrêté est possible en liquidation judiciaire, suppose une décision du tribunal et non du juge-commissaire.

L’ordonnance du juge-commissaire constitue une véritable habilitation et non une homologation, ce qui justifie sont caractère obligatoirement antérieur à la vente. La vente sans ordonnance préalable du juge-commissaire est nulle, peu important que l’autorisation ait été donné postérieurement 

Trois formes de vente sont prévus pour les immeubles (saisie immobilière ou par adjudication judiciaire, vente par adjudication amiable, vente de gré à gré), deux seulement pour les meubles (vente aux enchères publiques, vente de gré à gré)  Il appartient au juge-commissaire de déterminer la forme de la vente. .

La pratique de la vente sous pli cacheté devant le juge-commissaire, sorte de vente de gré à gré aux enchères, est discutée, admise par certaines cours d’appel, elle a été jugée illégale par d’autres.

1.4.2 – Une exception : la vente des biens meubles en procédure de liquidation judiciaire simplifiée

Quand le tribunal ouvre une liquidation judiciaire simplifiée, le liquidateur peut vendre, de sa propre initiative, sans demander l’autorisation du juge-commissaire, les biens meubles de l’entreprise, de gré à gré ou aux enchères publiques pendant 4 mois. Au-delà de 4 mois, le liquidateur vend aux enchères les biens meubles (article L. 644-2).

 Rappelons qu’il est fait application de la procédure de liquidation simplifiée si l’actif du débiteur ne comprend pas de bien immobilier, et si le chiffre d’affaires hors taxes égal ou inférieur à 750.000 euros à la date de clôture du dernier exercice et pour un nombre de salariés égal ou inférieur à 5 dans les 6 mois de l’ouverture de la procédure collective.

Si le débiteur est une personne physique il suffit simplement qu’il n’est pas d’actif immobilier, les autres critères n’étant pas applicables. Etant précisé que la propriété de la résidence principale ne peut faire obstacle à l’ouverture d’une liquidation judiciaire simplifiée (article L. 641-2).   

1.4.3 – Interdiction d’acquérir du débiteur, des alliés et des contrôleurs

L’article L. 642-20 dispose que ” les cessions d’actifs réalisées en application des articles L. 642-18 (vente d’immeuble) et L. 642-19 ( autres biens) sont soumises aux interdictions prévues au premier alinéa de l’article L. 642-3. Toutefois, le juge-commissaire peut, sur requête du ministère public, y déroger et autoriser la cession à l’une des personnes visées à ce texte à l’exception des contrôleurs et du débiteur au titre de l’un quelconque de ses patrimoines “.

L’article L. 642-3 précise qu’en a lui :

Ni le débiteur, au titre de l’un quelconque de ses patrimoines, ni les dirigeants de droit ou de fait de la personne morale en liquidation judiciaire, ni les parents ou alliés jusqu’au deuxième degré inclusivement de ces dirigeants ou du débiteur personne physique, ni les personnes ayant ou ayant eu la qualité de contrôleur au cours de la procédure ne sont admis, directement ou par personne interposée, à présenter une offre. De même, il est fait interdiction à ces personnes d’acquérir, dans les cinq années suivant la cession, tout ou partie des biens compris dans cette cession, directement ou indirectement, ainsi que d’acquérir des parts ou titres de capital de toute société ayant dans son patrimoine, directement ou indirectement, tout ou partie de ces biens, ainsi que des valeurs mobilières donnant accès, dans le même délai, au capital de cette société “.

L’alinéa 2 de l’article L. 642-3 prévoit que le tribunal, sur requête du ministère public, peut autoriser la cession à l’une des personnes visées au premier alinéa, à l’exception des contrôleurs, par un jugement spécialement motivé, après avoir demandé l’avis des contrôleurs. (voir également article L. 642-20 2ième phrase de l’alinéa qui reprend les mêmes dispositions, sans toutefois faire mention de demander l’avis des contrôleurs).

De même, l’alinéa 2 de l’article L. 642-20 précise que le juge-commissaire peut être saisi, par le ministère public, le liquidateur ou le débiteur (article R. 642-39),aux fins d’accorder la même dérogation pour les cessions d’actifs mobiliers de faible valeur nécessaires aux besoins de la vie courante. 

 Noter que le juge-commissaire statue par ordonnance spécialement motivée après avoir recueilli l’avis du ministère public lorsque celui-ci n’est pas l’auteur de la requête.

1.4.4 – Auditions préalables à l’ordonnance d’autorisation de vente d’actifs du débiteur

L’article R. 642-36-1 dispose que le juge-commissaire statue sur la vente après avoir recueilli les observations des contrôleurs et entendu ou dument appelé le débiteur et son conjoint, en cas de vente d’un bien de la communauté, ainsi que le liquidateur.

Cette obligation s’impose à toutes les ventes isolées d’actifs du débiteur en liquidation judiciaire.

Le non-respect de cette formalité est une cause de nullité de l’ordonnance.

Les textes n’exigent pas la convocation du candidat repreneur, lequel ne peut s’appuyer sur ce motif pour prétendre un excès de pouvoir. 

1.4.5 – Voies de recours sur l’ordonnance d’autorisation de vente

Les recours contre l’ordonnance autorisant la vente d’un actif du débiteur (immeubles ou autres biens) sont formés devant la Cour d’appel (articles R. 642-37-1 et R. 642-37-3).

Le débiteur peut, malgré son dessaisissement, contester seul les décisions du juge-commissaire autorisant la vente de biens lui appartenant. Il a là un droit propre.
 
Bien que le contrôleur se voie avisé par le greffier de l’ordonnance ordonnant la vente des immeubles et communiquer par lettre simple celle autorisant la vente des meubles du débiteur, il n’acquiert pas pour autant la qualité de partie. Mais il n’est pas davantage un tiers. En réalité, sur un plan procédural, il n’émet pas de prétention et ne peut donc exercer de recours.

« L’auteur d’une offre d’acquisition de gré à gré d’un actif d’un débiteur en liquidation judiciaire, n’ayant aucune prétention à soutenir au sens des articles 4 et 31 du code de procédure civile, n’est pas recevable à exercer un recours contre la décision du juge-commissaire autorisant ou ordonnant la vente aux enchères publiques de l’immeuble appartenant à ce débiteur » (Cour de cassation, chambre commerciale du 30/03/2010 n° 09-12234).

2. – Vente d’un bien immobilier d’un débiteur en liquidation judiciaire.

2.1 – Les règles communes à la réalisation des immeubles

2.1.2 – Les divers droits de préemption

Les droits de préemption institués par le Code rural ou le Code de l’urbanisme ne peuvent s’exercer sur un bien compris dans une cession d’une ou plusieurs activités, décidée en application de l’article L. 626-1 du Code de commerce ni dans le cadre d’un plan de cession en liquidation (article L. 626-1 et L. 642-5, alinéa 4).

L’interprétation a contrario s’impose, qui conduit à maintenir les droits de préemption en liquidation judiciaire, en dehors de la cession totale ou partielle d’une entreprise.

Le droit de préemption de la SAFER est expressément écarté en cas de plan de cession. Faute d’une disposition générale dans les procédures collectives, il est donc par principe maintenu en liquidation judiciaire.

De même, le droit de préemption du locataire devra être respecté. La solution a été spécialement posée pour le droit de préemption du locataire à bail rural.

La vente de l’immeuble autorisée par ordonnance du juge-commissaire au titre des opérations de liquidation judiciaire d’une société ne pouvant donner lieu à l’exercice d’un droit de préemption par son locataire, les droits et obligations de celui-ci ne sont pas affectés par cette ordonnance. Le locataire n’est donc pas recevable à former un recours contre celle-ci.

2.1.3 – L’insaisissabilité de la résidence principale (article L. 526-1 et suivants, R. 526-1 et suivants)

Désormais, la loi prévoit l’insaisissabilité de plein droit de la résidence principale de l’entrepreneur individuel à l’égard de ses seuls créanciers professionnels. Les autres biens fonciers non affectés à un usage professionnel appartenant à l’entrepreneur individuel peuvent également être rendus insaisissables, mais moyennant l’établissement d’une déclaration faite devant notaire.

Pour bénéficier de la protection offerte par la loi, c’est au débiteur qui se prévaut de l’insaisissabilité de l’immeuble dont la vente est requise par le liquidateur de prouver qu’à la date du jugement d’ouverture de la procédure collective, le bien constituait sa résidence principale.

 il a été jugé que lorsque le juge impose à l’entrepreneur individuel, dans le cadre d’une procédure de divorce, de quitter le logement familial, ce dernier n’est plus sa résidence principale et il peut être saisi par ses créanciers professionnels (Cour de cassation, chambre commerciale du 18/05/2022 n° 20-22768).

Ce dispositif est ouvert à toute « personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel ou exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante ». Sont visés au premier chef les commerçants immatriculés au registre du commerce et des sociétés (RCS), mais sont également éligibles les artisans inscrits au répertoire des métiers ou encore les agents commerciaux inscrits au registre national des agents commerciaux.

Les exploitants agricoles, même non immatriculés au registre de l’agriculture, ainsi que tous les autres professionnels indépendants, notamment libéraux (avocats, etc.), bénéficient également du dispositif. Les entrepreneurs ayant adopté le régime de l’EIRL sont également éligibles au dispositif.

2.2 – Vente sur saisie immobilière (L. 642-18)

La rédaction de l’article L. 642-18 semble indiquer la préférence du législateur pour la saisie immobilière. En effet, après avoir énoncé à l’alinéa 1er que “ les ventes d’immeubles ont lieu conformément aux articles 2204 à 2212 du Code civil à l’exception des articles 2206 et 2211 ”, le législateur poursuit, à l’alinéa 3, en indiquant que “ le juge-commissaire peut, si la consistance des biens, leur emplacement ou les offres reçues sont de nature à permettre une cession amiable dans de meilleures conditions ”, autoriser ou ordonner une autre forme de vente.

Ce n’est donc, que si la vente sous une autre forme permet de dégager un meilleur prix qu’elle sera autorisée. Il est donc difficile d’affirmer qu’il n’existe pas de hiérarchie dans les formes de vente.

La solution consistant à privilégier la saisie immobilière sur la cession de gré à gré peut pourtant se comprendre, pour éviter toute discussion sur le favoritisme consenti à tel ou tel acquéreur. Il est sûr que seule la meilleure offre pourra être retenue, ce qui n’est pas nécessairement le cas des ventes de gré à gré. À l’inverse, il n’est pas certain que ce soit toujours la meilleure solution pour obtenir le prix le meilleur.

Alors on comprend que le juge-commissaire, dans certaines circonstances, sur lesquelles il semble devoir s’expliquer, puisse autoriser une autre forme de vente.

2.2.1 – Saisie immobilière entamée au jour du jugement d’ouverture

L’article L. 642-18 alinéa 2 dispose que ” lorsqu’une procédure de saisie immobilière engagée avant l’ouverture de la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires a été suspendue par l’effet de cette dernière, le liquidateur peut être subrogé dans les droits du créancier saisissant pour les actes que celui-ci a effectués, lesquels sont réputés accomplis pour le compte du liquidateur qui procède à la vente des immeubles. La saisie immobilière peut alors reprendre son cours au stade où le jugement d’ouverture l’avait suspendue “.

Si le liquidateur veut reprendre la procédure de saisie immobilière, il lui appartient d’obtenir l’ordonnance du juge-commissaire prévoyant la subrogation, dans le délai de 3 mois de la liquidation judiciaire. Une fois l’ordonnance autorisant le liquidateur à reprendre la procédure devenue définitive, la « subrogation » du liquidateur dans les droits du créancier poursuivant est de droit.

Comme pour toute les ventes en liquidation judiciaire, le juge-commissaire statue après avoir recueilli les observations des contrôleurs et entendu ou dûment appelé le débiteur et son conjoint marié sous le régime de ma communauté, ainsi que le liquidateur (article R. 642-36-1).

L’article L. 642-24 précise que le juge-commissaire dans son ordonnance fixe la mise à prix, les modalités de la publicité et les modalités de visite du bien. Le juge-commissaire statue après avoir recueilli les observations des contrôleurs et entendu ou dûment appelé le débiteur et son conjoint lorsque celui-ci est marié sous le régime de la communauté.

Une fois que l’ordonnance autorisant la subrogation est devenue définitive, le créancier poursuivant ne peut plus discuter de la question de savoir qui de lui ou du liquidateur peut poursuivre la saisie.

2.2.2 – Saisie immobilière non entamée au jour du jugement d’ouverture

Indiquons d’abord que la règle de l’arrêt des voies d’exécution s’applique à la saisie immobilière (l’article L. 622-21, II, du Code de commerce visant les saisies sur les immeubles). Il en résulte que la saisie immobilière ne peut être, par principe, commencée, par un créancier antérieur inscrit sur l’immeuble du débiteur, après jugement d’ouverture. Seul le liquidateur, en conséquence, vendra sur saisie immobilière l’immeuble du débiteur.

Les règles de la saisie immobilière, telles qu’elles sont réglementées par le Code des procédures civiles d’exécution, trouvent ici pleine application, à moins qu’il n’y soit expressément dérogé par les textes de la procédure collective.

Notons quelques particularités :

  • impossibilité de conversion en vente volontaire (Cour de cassation, chambre commerciale du 11/04/1995, n° 92-12254),
  • passage obligé par une ordonnance du juge-commissaire (voir paragraphe 5.1.2.1),
  • inutilité de la mainlevée des précédents commandements (article R. 642-23 alinéa 3),
  • particularités relatives au cahier des conditions de la vente (article R. 642-224),
  • impossibilité pour le débiteur saisi de solliciter le renvoi de l’audience d’adjudication (Cour de cassation, chambre commerciale du 07/12/1999, n° 97-11426),
  • régles régissant la vente multiple d’immeubles (paragraphe 5.1.2.2),
  • la qualité de l’adjudicataire (paragraphe 5.1.2.3).
2.2.1.1 – Passage obligé par une ordonnance du juge-commissaire

La saisie ne commence pas par un commandement aux fins de saisie, mais par une requête présentée au juge-commissaire.

L’article R. 642-22 dispose le juge-commissaire qui ordonne la vente des immeubles par voie d’adjudication judiciaire ou amiable détermine :

  1. La lise à prix de chacun des biens à vendre et les conditions essentielles de la vente ;
  2. Les modalités de la publicité compte tenu de la valeur, de la nature et de la situation des biens ;
  3. Les modalités de visite des biens.

Lorsque la vente est poursuivie par un créancier, la mise à prix est déterminée en accord avec le créancier poursuivant.

Il est à noter que le juge-commissaire, si la valeur des biens le justifient, pourra faire procéder à leur estimation.

Le juge-commissaire peut préciser qu’à défaut d’enchères atteignant cette mise à prix la vente pourra se faire sur une mise à prix inférieure qu’il fixe.

Comme pour toute les ventes en liquidation judiciaire, le juge-commissaire statue après avoir recueilli les observations des contrôleurs et entendu ou dûment appelé le débiteur et son conjoint marié sous le régime de ma communauté, ainsi que le liquidateur (article R. 642-36-1).

De plus, l’article R. 642-23 précise que ” ordonnance est notifiée à la diligence du greffier par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au débiteur et aux créanciers inscrits à domicile élu dont les noms sont indiqués dans l’ordonnance. Les contrôleurs en sont avisés par le greffier “.

En pratique, le liquidateur annexe à sa requête un projet d’ordonnance.

2.2.1.2 – Ventes de plusieurs immeubles

L’article R. 642-29 dispose que ” le juge-commissaire peut autoriser le liquidateur ou le créancier à poursuivre simultanément la vente de plusieurs immeubles, même s’ils sont situés dans des ressorts de tribunaux judiciaires» différents.

Il décide si la vente de ces biens sera poursuivie devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire dans le ressort duquel chaque immeuble se trouve ou devant celui dans le ressort duquel est situé l’adresse de l’entreprise ou de l’activité déclarée par le débiteur personne physique ou le siège du débiteur personne morale ». 

2.2.1.3 – Précisions relatives à la qualité de l’adjudicataire

Le liquidateur ne peut, en qualité de mandataire, être déclaré adjudicataire des immeubles du débiteur (article R. 642-26).

Il convient également de citer l’article L. 654-12 II qui stipule que “ est puni des mêmes peines le fait, pour tout administrateur, mandataire judiciaire, liquidateur, commissaire à l’exécution du plan ou toute autre personne, à l’exception des représentants des salariés, de se rendre acquéreur pour son compte, directement ou indirectement, de biens du débiteur ou de les utiliser à son profit, ayant participé à un titre quelconque à la procédure. La juridiction saisie prononce la nullité de l’acquisition et statue sur les dommages et intérêts qui seraient demandés “.

A défaut d’interdiction, possibilité pour le créancier poursuivant d’être adjudicataire.

2.3 – Vente sur adjudication amiable (enchères devant notaire)

L’article L. 642-18, alinéa 3, du Code de commerce envisage la possibilité pour le juge-commissaire d’autoriser une forme de vente autre que la saisie immobilière. On a vu que la vente sur saisie immobilière était le principe. Cela doit conduire le juge-commissaire à motiver son ordonnance autorisant une forme autre.

Le juge-commissaire autorisera la vente sur adjudication amiable si la consistance des biens, leur emplacement ou les offres reçues sont de nature à permettre une cession dans de meilleures conditions.

L’ordonnance du juge-commissaire, en dehors qu’elle doit motiver le choix de l’adjudication amiable comporte les mêmes mentions que celles autorisant l’adjudication judiciaire (article R. 642-22).

L’ordonnance doit désigner le notaire qui procédera à l’adjudication.   

Les conditions de la vente sur adjudication amiable d’un immeuble d’un débiteur en liquidation judiciaire, sont fixées par les articles R. 642-22 à R. 642-26 et R. 642-30 à R. 642-35, dont il convient de se reporter.

L’article R. 642-52 précise que ” si aucune enchère n’atteint le montant de la mise à prix, le notaire constate l’offre la plus élevée et peut adjuger le bien à titre provisoire pour le montant de cette offre. Le juge-commissaire qui a fixé la mise à prix, saisi à la requête du notaire ou de tout intéressé, peut soit déclarer l’adjudication définitive et la vente réalisée, soit ordonner qu’une nouvelle vente aura lieu suivant l’une des formes prescrites par l’article L. 642-18. Si la nouvelle vente est une vente aux enchères, il fixe le délai de la nouvelle vente sans que ce délai puisse être inférieur à quinze jours, la mise à prix ainsi que les modalités de publicité“.

L’article R. 642-33 quant à lui dispose que ” dans les quinze jours qui suivent l’adjudication, toute personne peut faire surenchère du dixième par requête remise ou adressée au greffe du juge de l’exécution du tribunal judiciaire dans le ressort duquel réside le notaire qui a procédé à la vente “.

Le surenchérisseur dénonce cette enquête par acte de commissaire de justice à la personne ou au domicile de l’adjudicataire dans le délai de l’article R. 322-52 du code des procédures civiles d’exécution et informe le notaire de cette requête. Le tribunal, par le jugement qui valide la surenchère, renvoie la nouvelle adjudication devant le même notaire qui procède selon le cahier des conditions de vente précédemment dressé.
 
Lorsqu’une seconde adjudication a lieu après surenchère, aucune autre surenchère des mêmes biens ne peut avoir lieu “. 
 

2.4 – Vente de gré à gré des immeubles

2.4.1 – L’ordonnance du juge commissaire autorisant la cession de gré à gré

L’article L. 642-18 alinéa 3 envisage une dernière forme de réalisation des immeubles : la cession de gré à gré.

Comme pour la vente par adjudication amiable, le juge-commissaire devra motiver son ordonnance par la considération que la consistance des biens, leur emplacement ou les offres reçues permettent une cession dans les meilleures conditions que la vente sur saisie immobilière.

Le liquidateur devra solliciter du juge-commissaire une ordonnance, qui contiendra le prix et les conditions de la vente (article R. 642-36).

Le liquidateur prêtera attention à faire préciser dans l’ordonnance le sort de la TVA.

L’ordonnance pourra viser plusieurs immeubles. En ce cas, le prix et les conditions de vente de chaque immeuble devront être déterminés.

 L’article R. 642-36-1 précise que le juge-commissaire devra, avant de statuer sur la vente , recueillir les observations des contrôleurs et entendu ou dûment appelé le débiteur et son conjoint lorsque l’immeuble appartient à la communauté.

L’ordonnance qui autorise la vente de gré à gré au profit d’une personne déterminée ne peut valoir qu’au profit de l’auteur de l’offre, sauf prévision d’une possibilité de substitution.

Si le candidat acquéreur abandonne son projet d’acquisition, le juge-commissaire devra impérativement autoriser la vente au profit d’un autre acquéreur, par une nouvelle ordonnance.

2.4.2 – Fixation de la date de la vente de gré à gré

La vente de l’immeuble est parfaite, comme en matière de meubles, dès l’ordonnance du juge-commissaire qui l’autorise, sous la condition suspensive que la décision acquière force de chose jugée, même si elle n’est réalisée que par l’accomplissement d’actes postérieurs à la décision du juge-commissaire.

Comme en matière de meubles, si l’ordonnance du juge-commissaire rend la vente parfaite, le transfert de propriété est en revanche différé au jour de la signature de l’acte de cession.

2.4.3 – Impossibilité de rétractation de l’ordonnance

Le refus de signer les actes de cession de la part de la personne désignée par la décision du juge-commissaire, pourra être sanctionné par des dommages et intérêts, s’il en résulte pour la collectivité des créanciers un préjudice.

Le liquidateur pourra préférer obtenir l’exécution forcée de la vente (Cour de cassation, chambre commerciale du 01/10/2013, n° 12-23999). 

3.-  Ventes des biens meubles isolés d’un débiteur en liquidation judiciaire

3.1 – De quel biens s’agit-il

La vente des ” autres biens de l’entreprise ” est régie par l’article L. 642-19 et L. 642-37-2 à  L. 342-39.

Par ” autres biens de l’entreprise ” il faut comprendre tous les biens autres qu’immeubles, sous réserve des biens exclus (voir le cas de l’entrepreneur individuel), il s’agit donc des marchandises, des meubles meublants,  du matériel et outillage, du matériel de transport, des droits incorporels, des valeurs mobilières, des brevets, les marques, du droit au bail et du fonds de commerce…

Il s’agit des biens se trouvant dans le patrimoine du débiteur au jour du jugement d’ouverture, mais encore, de ceux qui lui échoient à titre gratuit ou onéreux jusqu’au jour de la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif.

Le tiers qui entend distraire un bien mobilier des actifs du débiteur doit présenter une demande en revendication.

A défaut de revendication, le droit de propriété du tiers devient inopposable à la procédure, c’est-à-dire aux créanciers et au liquidateur judiciaire. Il résulte de l’inopposabilité du droit de propriété la possibilité pour le liquidateur judiciaire de vendre le bien litigieux. Le produit de la vente sera appréhendé par l’ensemble des créanciers, dont fait partie le propriétaire, s’il est admis au passif. 

3.2 – Dispositions communes aux deux formes de ventes (aux enchères publiques ou de gré à gré).

3.2.1 – Caractère obligatoire de l’ordonnance du juge-commissaire

L’article L. 642-19 dispose que ” le juge-commissaire soit ordonne la vente aux enchères publiques, soit autorise, aux prix et conditions qu’il détermine, la vente de gré à gré des autres biens du débiteur lorsqu’elle est de nature à garantir les intérêts de celui-ci. Lorsque la vente a lieu aux enchères publiques, il y est procédé dans les conditions prévues, selon le cas, au second alinéa de l’article L. 322-2 ou aux articles L. 322-4 ou L. 322-7 “.

L’article R. 642-37-2 précise que ” le juge-commissaire statue sur la vente après avoir recueilli les observations des contrôleurs et entendu ou dûment appelé le débiteur et son conjoint, lorsque celui-ci se trouve dans l’une des situations prévues à l’article R. 641-30, ainsi que le liquidateur “. 

L’ordonnance du juge-commissaire devra nécessairement être antérieure à la réalisations de la vente, sous peine de nullité absolue de celle-ci, que tout intéressé peut invoquer, même sans avoir à invoquer un grief, et sans possibilité de ratification.

L’ordonnance devra, à la diligence du greffier, être notifiée au débiteur, et communiquée par lettre simple aux contrôleurs (article R. 642-37-3).

Une fois l’ordonnance devenue définitive, l’acquéreur est dans l’obligation d’y donner suite.

L’article L. 643-2 alinéa 1 autorise les créanciers titulaires d’un privilège spécial, d’un gage, ou d’un nantissement et le Trésor public pour ses créanciers privilégiées peuvent dès lors qu’ils ont déclaré leurs créances, même s’ils ne sont pas encore admis, exercer leur droit de poursuite si le liquidateur n’a pas entrepris la vente des biens grevés dans le délai de trois mois à compter du jugement qui a prononcé la liquidation judiciaire.

Lorsque la vente est poursuivie par un créancier, la mise à prix est fixée par le juge-commissaire en accord avec le créancier poursuivant. Il convient donc d’en déduire que le créancier privilégié devra au préalable, pour exercer son droit de poursuite, obtenir l’autorisation du juge-commissaire.

3.2.2 – Choix du type de vente (aux enchères publiques ou de gré à gré) et conditions de la vente.

Le texte n’impose aucun critère de choix au juge-commissaire qui pourra choisir, de façon discrétionnaire, que la vente intervienne soit aux enchères publiques, soit de gré à gré sous réserve d’éventuels recours.

L’article L. 642-19 alinéa 2 précise que ” le juge-commissaire peut demander que le projet de vente amiable lui soit soumis afin de vérifier si les conditions qu’il a fixées ont été respectées “.

Au-delà du choix dans la forme de la vente, le juge-commissaire doit aussi, le cas échéant, faire un choix entre les offres. Les objectifs de la liquidation judiciaire devront par principe le guider. Il devra, en conséquence, tenir compte de l’intérêt des créanciers.

3.2.3 – Interdiction d’acquisition des biens 

L’article L. 642-20 dispose que les cessions d’actifs de biens mobiliers (article L. 642-19) sont soumises aux interdictions directement ou par personne interposée, les dirigeants de droit ou de fait de la personne morale en liquidation judiciaire, les parents ou alliés jusqu’au deuxième degré inclusivement de ces dirigeants, la débiteur personne physique, les personnes ayant ou ayant eu la qualité de contrôleur au cours de la procédure.

Toutefois, le juge-commissaire peut, sur requête du ministère public, y déroger et autoriser la cession à l’une des personnes visées à ce texte à l’exception des contrôleurs et du débiteur au titre de l’un quelconque de ses patrimoines.

Le liquidateur ne peut acquérir personnellement, soit directement, soit indirectement, tout ou partie de l’actif mobilier du débiteur, sous peine de sanctions pénales.

3.2.4 – Recours sur l’ordonnance du juge-commissaire autorisant la vente d’un bien meuble

Le recours contre les décisions, concernant la cession des biens, autres que les immeubles (article L. 642-19) sont formés devant la Cour d’appel.

L’appel doit être formé dans le délai de 10 jours qui court à compter de la notification de l’ordonnance aux parties (allongement d’un mois pour l’appelant en dehors du territoire métropolitain et deux mois pour l’appelant situé à l’étranger). 

3.3 – Ventes aux enchères

En cas de ventes aux enchères, le juge-commissaire n’a pas à fixer de mise à prix.

L’ordonnance du juge-commissaire autorisant la vente aux enchères ne valant pas vente, il convient d’en déduire que le juge-commissaire, non dessaisi; peut convenir d’autres modalités de réalisation des actifs.

La propriété et les risques du bien vendu ne seront transférés qu’à compter de l’adjudication.

La ventes aux enchères ne peut être réalisée que par un officier public (commissaire de justice, notaire, greffiers du tribunal judiciaire). Ce monopole s’étend à l’organisation matérielle de la vente, le prononcé de l’adjudication, et la rédaction du procès-verbal de vente (article L. 322-22 du Code commerce).

Le lieu de la vente aux enchères peut être choisi librement même en dehors du ressort du tribunal qui a prononcé la liquidation judiciaire.

Il appartient au liquidateur de veiller à l’organisation matérielle de la vente, sous peine d’engager sa responsabilité.

L’article 1649 du Code civil porte que la garantie du vendeur contre les vices cachés n’a pas lieu dans les ventes faites par autorité de justice. La vente aux enchères des meubles du débiteur en liquidation judiciaire est considérée comme une vente par autorité de justice au sens de l’article 1649 ; en conséquence, la garantie contre les vices cachés n’est pas due.

3.4 – Vente de gré à gré

L’ordonnance du juge-commissaire ordonnant la vente présente une nature juridictionnelle. Il est impossible au juge-commissaire de la modifier une fois qu’elle est rendue. La règle du dessaisissement du juge s’impose ici pleinement.

La réalisation de la vente amiable n’exige aucune forme particulière propre.

Si la vente des meubles est faite à l’initiative du liquidateur, il appartient à ce dernier de veiller à l’organisation matérielle de celle-ci, sous peine d’engager sa responsabilité.

La jurisprudence décide que la vente de gré à gré reste une vente par autorité de justice, pour laquelle la garantie des vices cachés ne peur trouver à s’appliquer.

La vente est parfaite dès l’ordonnance du juge-commissaire, sous la condition suspensive que l’ordonnance du juge-commissaire acquière l’autorité de la chose jugée.

L’ordonnance doit indiquer à qui incombent les frais de vente. Faute d’une telle précision, le candidat acquéreur, informé qu’il doit ajouter au prix mentionné dans son offre, les frais de la vente, est en droit de retirer son offre (Cour de cassation, chambre commerciale du 06/10/2009, n° 08-19857).

La vente de gré à gré se forme ainsi par la rencontre entre une offre et l’ordonnance du juge-commissaire ordonnant la vente. La perfection de la vente au jour de l’ordonnance interdit la présentation ultérieure d’une offre concurrente. Le juge-commissaire ne peut connaître de difficultés d’exécution de son ordonnance d’autorisation de vente.

Pour cette même raison, le juge-commissaire qui a ordonné la cession à une personne ne peut, au prétexte qu’une meilleure offre aurait ensuite été présentée, rétracter la première ordonnance. Cependant, si le candidat acquéreur refuse de signer les actes de cession, le juge-commissaire retrouve alors pouvoir pour autoriser la cession à une autre personne, la première ordonnance étant alors atteinte de caducité (Cour de cassation, chambre commerciale du 27/03/ 2012, n° 11-15423). Il ne peut cependant prononcer, à l’encontre du candidat acquéreur ou d’un tiers, d’astreinte, car seul le juge de l’exécution a ce pouvoir.

L’acquéreur ne peut plus se délier de son offre, à l’identique de la situation d’une offre acceptée. Spécialement, la rétractation de l’acquéreur pour convenance personnelle est impossible, du fait de la perfection de la vente (Cour de cassation, chambre commerciale du 28/10/2008, n° 07-15286).

Bien que la vente soit parfaite au jour de l’ordonnance du juge-commissaire, le transfert de propriété ne se produit pas à cette date. Il est différé au jour de la rédaction des actes de cession.

3.5 – Règles particulières à la cession du fonds de commerce

Le fonds de commerce entre incontestablement dans la cession des actifs isolés en liquidation judiciaire, dès lors du moins qu’il ne constitue pas une entreprise pouvant faire l’objet d’une cession d’entreprise. La présence de salariés semble bien constituer le critère distinctif. un autre critère a toutefois été suggéré pour distinguer, en liquidation judiciaire, cession du fonds de commerce et cession d’entreprise, il s’agit de la poursuite provisoire d’activité en liquidation judiciaire. Il faudra toutefois que la continuité d’activité ait été décidée pour permettre la cession partielle ou totale de l’entreprise en liquidation judiciaire.

3.5.1 – Vente de gré à gré du fonds de commerce

Depuis le 21/07/2019, l’acte de cession d’un fonds n’est plus assorti d’aucune mention obligatoire spécifique (article L. 141-1 abrogé).

L’article L. 141-2 alinéa 1 prévoit seulement que ” au jour de la cession, le vendeur et l’acquéreur visent un document présentant les chiffres d’affaires mensuels réalisés entre la clôture du dernier exercice comptable et le mois précédant celui de la vente  “.

Le liquidateur doit porter à la connaissance de l’acquéreur l’existence de prescriptions administratives de sécurité. La mention selon laquelle l’acquéreur achète le bien « en l’état » ne dispense pas le liquidateur d’informer l’acheteur des vices qu’il connaît, sous peine de se rendre coupable de réticences dolosives, susceptibles d’entraîner l’annulation de la vente. C’est ainsi que l’acquéreur doit être exactement informé des prescriptions administratives de sécurité concernant l’exploitation de l’immeuble.

Les ventes intervenant en liquidation judiciaire, en dehors du plan de cession, ne permettent pas la cession judiciaire des contrats annexes au fonds de commercer (Cour de cassation, chambre commerciale du 28/06/2017, n° 15-17394).

La mention de l’ordonnance selon laquelle le repreneur ferait son affaire personnelle d’un contrat de fourniture exclusive est sans portée ( Cour de assation, chambre commerciale du 15/02/2005, n° 03-17019).

3.5.1.1 – Publication de la vente

L’article L. 141-12 du Code de commerce qui oblige l’acquéreur à publier la vente dans les 15 jours de sa date, sous forme d’avis ou d’extrait au BODACC, d’une part, sur un support habilité à recevoir des annonces légales dans le département de situation du fonds, d’autre part, et l’article L. 141-13 du Code qui prévoit que cette publication ne peut intervenir qu’après enregistrement de l’acte contenant la vente, sont applicables à la cession du fonds de commerce d’un débiteur en liquidation judiciaire.

Par contre ces articles ne sont pas applicables en cas de plan de cession, totale ou partielle de l’entreprise.

3.5.1.2 – Purge des inscriptions et radiations des inscriptions

La vente de gré à gré n’emporte pas purge des inscriptions. Il appartiendra, en conséquence, à l’acquéreur du fonds de commerce, de se préoccuper de la purge des inscription grevant éventuellement le fonds de commerce.

Le terme de purge est employé quand il s’agit de ” purger “, c’est-à-dire de mettre un terme, à un droit potentiel d’un tiers. Les créanciers “inscrits” sur un bien, c’est à dire par exemple les créanciers nantis sur un fonds de commerce, disposent d’un droit de surenchère en cas de vente du bien correspondant, et d’un droit de suite, c’est à dire de se prévaloir de leur garantie entre les mains de l’acquéreur suivant, qui a acquis le bien de leur débiteur (le bien vient toujours en garantie de la créance, peu important qu’il ait changé de propriétaire).

En  liquidation judiciaire, il faut protéger d’une part les créanciers en leur proposant d’exercer leur droit de surenchère s’ils estiment le prix trop bas, et d’autre part l’acheteur qui a payé le prix convenu en faisant arrêter, par le juge commissaire, les effets du droit de suite.

La réalisation de la purge est règlementée par les articles R. 143-1 à  143-5 du Code de commerce.

L’article R. 642-38 dispose que ” en cas de cession d’un fonds de commerce, le cessionnaire peut saisir le juge-commissaire pour faire prononcer la radiation des inscriptions. Il joint à sa demande un état des inscriptions, la justification de l’accomplissement des formalités de purge ou de l’accord des créanciers inscrits pour l’en dispenser, et la justification du paiement des frais préalables de vente.

Le greffier du tribunal avise par lettre recommandée avec demande d’avis de réception les créanciers qui n’ont pas donné mainlevée de leurs inscriptions qu’ils disposent d’un délai de trente jours à compter de l’envoi de la lettre pour contester, par requête ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, la demande de radiation pour tout motif tiré du non-paiement du prix “. 
 
3.5.1.3 – Surenchère

La procédure de purge entraine l’ouverture de surenchère. La surenchère du dixième, prévue par l’article L. 143-3 alinéa 1 n’est ouverte qu’aux créanciers inscrits sur le fonds. 

Elle doit être faite dans les quinze jours de la notification aux créanciers inscrits. La réquisition d’une mise aux enchères faite par le déclarant doit être signifiée à l’acquéreur et au débiteur, c’est-à-dire du fait du dessaisissement, à son liquidateur. Dans ce même délai, une assignation devant le tribunal de commerce du lieu du fonds doit être lancée, pour voir statuer, en cas de contestation, sur la validité de la surenchère, sur l’admissibilité de la caution ou la solvabilité du surenchérisseur, et voir ordonner qu’il sera procédé à la mise aux enchères publiques du fonds avec le matériel et les marchandises qui en dépendent, et que l’acquéreur surenchéri sera tenu de communiquer son titre et l’acte de bail ou de cession de bail à l’officier public commis.

3.5.1.4 – Distribution du prix de vente du fonds – Séquestre

Il convient d’abord de préciser que l’acquéreur du fonds de commerce ne pourra prétendre compenser le prix de cession avec une créance détenue sur le débiteur, ce qui emporterait paiement préférentiel du créancier.

La distribution du prix de vente du fonds de commerce est de la compétence du liquidateur

3.5.2 – Vente aux enchères du fonds de commerce

La vente aux enchères amiables n’est pas praticable, les formes de ventes déterminées par le législateur étant exclusives d’autres formes. La solution a été spécialement posée à propos de la pratique des enveloppes sous pli cacheté devant le juge-commissaire, le mieux disant étant désigné acquéreur du fonds de commerce (Cour d’appel de Paris du 21/02/2003, n° 2002/07878).

La vente aux enchères, étant une vente judiciaire, de façon classique, n’autorisera pas le jeu de l’action en garantie des vices cachés.

Il y aura purge par l’effet de la loi en cas de ventes aux enchères. 

L’article L. 141-19 du Code de commerce exclut la surenchère si la vente est faite aux enchères publiques, à l’initiative d’un liquidateur judiciaire. En conséquence, la vente aux enchères d’un fonds de commerce, à l’initiative du liquidateur n’ouvre pas droit au profit des créanciers inscris, à la surenchère.

Les ventes aux enchères entraînent purge des inscriptions.

3.5.3 – Le bail commercial face à la procédure collective du locataire

Voir l’étude concernant ce problème ” Le bail commercial face à la procédure collective du locataire “.

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