Article 1112 du Code civil :
« L’initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi.
En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d’obtenir ces avantages ».
Il est fréquent, avant de parvenir à un accord, que les parties à un contrat discutent entre elles pendant un certain temps des conditions de leurs engagements réciproques : c’est ce qu’on appelle la période des pourparlers.
Durant cette période, par hypothèse, les parties ne sont encore pas contractuellement engagées l’une envers l’autre. Le principe est donc qu’à tout moment, elles peuvent, l’une comme l’autre, décider de ne pas poursuivre les pourparlers et reprendre ainsi leur entière liberté de négociation, avec notamment un autre partenaire. Bien évidemment, comme tout principe qui se respecte, celui-ci connaît une exception importante.
La liberté de négociation ne doit en effet pas dégénérer en abus de droit sous peine pour le partenaire malhonnête d’engager sa responsabilité.
La responsabilité de l’auteur de la rupture fautive est de nature délictuelle, puisque l’on se situe dans la période précontractuelle et qu’aucun contrat n’a pu être conclu du fait de la rupture des pourparlers. Le fondement de la responsabilité est donc l’article 1240 (anc. art. 1382).
Il convient de rappeler que chaque partie peut rompre les négociations, sauf le cas d’un contrat de pourparlers délimitant les conditions de rupture, si elle estime ne pas avoir intérêt à conclure le contrat projeté.
Elle risque néanmoins d’être condamnée à indemniser son partenaire du préjudice subi par lui si sa décision est intempestive ou abusive.
Les juridictions ont souvent été appelées à se prononcer sur le caractère fautif d’une rupture.
Le plus souvent, l’abus est retenu lorsque la rupture :
L’abus peut également résulter de la mauvaise foi de l’auteur de la rupture qui, sans motif réel et sérieux, a sciemment maintenu son partenaire dans la croyance d’une signature définitive de l’accord, l’intention de nuire n’étant alors nullement requise.
Inversement, la jurisprudence refuse de considérer comme abusive une rupture qui intervient alors que les pourparlers n’avaient pas atteint un stade suffisamment avancé. En pareille hypothèse ce n’est pas la durée des pourparlers qui est retenue (cette dernière pouvant être également longue) mais l’absence d’accord des parties sur l’une des conditions essentielles du contrat tel que le prix.
Ainsi, n’ont pas été jugées fautives :
Lorsque la juridiction compétente a retenu le caractère intempestif ou abusif de la rupture des pourparlers, il y a lieu de statuer sur les dépenses susceptibles d’ouvrir droit à remboursement ainsi que sur les préjudices indemnisables.
Bien souvent, la phase des pourparlers engendre certaines dépenses ayant trait à l’étude de la faisabilité du projet objet des pourparlers ou bien encore au commencement d’exécution de la convention.
Pareilles dépenses exposées en vain ouvrent droit à remboursement telles que :
Il est à noter également que les actes accomplis pendant les pourparlers en vue de la conclusion du contrat projeté peuvent donner lieu à restitution ; ainsi, le droit au bail consenti dans la perspective de la constitution d’une société doit être « restitué » en valeur par le locataire à qui il avait été accordé en vue d’une exploitation et avec lequel le bailleur avait formé le projet avorté de créer une société.
Enfin, il est également possible de revendiquer l’indemnisation du préjudice résultant de l’atteinte au crédit et l’altération de l’image auprès d’autres partenaires par contrecoup d’une rupture qui fait douter du sérieux du négociateur délaissé.
Le préjudice réparable en cas de rupture abusive des pourparlers se limite à la perte subie et exclut le gain espéré de la conclusion du contrat (article 1112, alinéa 2).
La « perte d’une chance de réaliser les gains que permettait d’espérer la conclusion du contrat ».
Article 1112-1 du Code civil (à lire attentivement) :
« Celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.
Néanmoins, ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation.
Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie là lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie.
Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.
Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants ».
L’obligation de renseigner autrui relève, désormais, de l’ordre public.
Cela étant, l’étendue et l’intensité de cette obligation générale d’information varient en fonction de l’objet concerné par la vente, de la qualité des parties, ou encore de la nature du contrat.
Il convient donc de faire une distinction entre :
L’information doit avoir une importance déterminante pour le consentement du cocontractant. Dûment informé, le contractant, soit n’aurait pas conclu le contrat, soit l’aurait conclu à des conditions différentes.
L’alinéa 2 de l’article 1112-1 précisant que le devoir d’information ne porte pas sur « l’estimation de la valeur de la prestation ».
Le devoir d’informer ne pèse ensuite que sur celui qui « connaît » l’information déterminante, et non, sur celui qui « devrait connaître » l’information.
Toutefois, le professionnel averti d’une part a un devoir de se renseigner pour informer et d’autre part il pèse sur lui une présomption de connaissance.
Ce devoir d’informer ne profite enfin qu’à celui qui, « légitimement, ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant ».
Ainsi, l’ignorance d’une information largement diffusée, ou ne pouvant échapper à un contractant normalement vigilant, sera jugée « illégitime ».
Cette confiance dans le cocontractant pourrait recouvrir l’hypothèse d’un consommateur profane traitant avec un professionnel averti.
Le législateur a également précisé d’une part, qu’il appartient à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie là lui devait, c’est-à-dire que les trois conditions précitées étaient réunies et d’autre part, si ces conditions sont remplies, il appartient alors au débiteur du devoir d’information de prouver qu’il l’a fournie
(Cour de cassation, chambre civile 1 du 15/05/2002, n° 99-21521).
« Attendu que Mme X… a acquis un véhicule automobile d’occasion auprès de M. Y…, garagiste ;
Qu’une expertise ordonnée en référé a établi que le véhicule avait été accidenté ;
Qu’au soutien de son action en nullité de la vente pour réticence dolosive, Mme X… a fait valoir que le vendeur lui avait dissimulé cet accident ;
Attendu que pour rejeter la demande, l’arrêt retient que Mme X… ne rapportait pas la preuve de cette dissimulation ;
Qu’en statuant ainsi, alors que le vendeur professionnel est tenu d’une obligation de renseignement à l’égard de son client et qu’il lui incombe de prouver qu’il a exécuté cette obligation, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».
Le vendeur, Monsieur Y avait une obligation d’information au bénéfice de l’acheteur Madame X.
La connaissance par Madame X que le véhicule avait été accidenté avait une importance déterminante sur son consentement. Si elle avait eu connaissance elle n’aurait peut-être pas conclu le contrat, ou probablement à des conditions différentes.
Monsieur Y avait connaissance de cette information, il avait donc une obligation d’en informer l’acheteur, d’autant plus que Madame X était dans l’ignorance totale de ce fait.
Monsieur Y qui avait donc une obligation précontractuelle d’information, à défaut de prouver qu’il a exécuté cette obligation, le contrat encourt la nullité.
L’article 1112-1 du Code civil rappelle les deux sanctions possibles en cas de manquement au devoir d’information :
En jurisprudence, la Cour de cassation indemnise la perte de chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses.
Cour de cassation, chambre commerciale du 31/01/2012, n° 11-10834 (un exemple intéressant concernant un contrat de franchise).
Le manquement au devoir d’information pourra également entraîner « l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants », c’est-à-dire lorsqu’il aura provoqué un vice du consentement.
Il en résulte, que si le débiteur invoque une erreur, il devra établir qu’elle porte sur les qualités essentielles de la chose ou de la personne. S’il invoque un dol, il devra apporter la preuve de l’intention de tromper.
En revanche, le caractère déterminant de l’information étant une condition du devoir d’information, le caractère déterminant du vice sera d’ores et déjà établi.
Comme pour le devoir de bonne foi, dont il n’est qu’une application, l’ordonnance précise que les parties « ne peuvent ni limiter, ni exclure » le devoir d’information.
On s’est demandé si l’article 1112-1, alinéa 5, ne pourrait pas remettre en cause la validité des clauses exclusives de garantie des vices cachés, dites clauses de « vente en l’état », traditionnellement valables entre professionnels. Cette crainte ne paraît pas fondée. L’objet de cette clause est de prémunir le vendeur professionnel contre la garantie des vices « cachés », c’est-à-dire des vices dont il n’avait pas connaissance, Par conséquent, de deux choses l’une : soit le vendeur n’avait pas connaissance du vice, et il n’était alors guère tenu d’en informer l’acquéreur en application de l’article 1112-1; soit le vendeur avait connaissance du vice, et la clause de « vente en l’état» était d’ores et déjà inefficace.
« Celui qui utilise ou divulgue sans autorisation une information confidentielle obtenue à l’occasion des négociations engage sa responsabilité dans les conditions du droit commun ».
L’ordonnance consacre officiellement l’existence et l’efficacité du devoir de confidentialité, en prévoyant que celui qui, non seulement « utilise », mais également « divulgue », une information confidentielle obtenue lors des négociations engage sa responsabilité.
L’information confidentielle recouvre toute information sensible dont la mise à profit par le partenaire ou par un tiers en ayant eu connaissance pourrait nuire à celui que le secret protège.
C’est-à-dire que toutes les informations communiquées dans le cadre des pourparlers ne sont pas présumées confidentielles, mais qu’elles ne le seront qu’en raison d’une déclaration expresse des parties en ce sens ou en considération de la nature des informations ou de la qualité des partie
Première partie : rupture des pourparlers
♦ Site « A. Bamdé et J. Bourdoiseau » : liberté et rupture des négociations
♦ DALLOZ : Documentation/Répertoire de droit civil/Bonne foi dans la négociation du contrat.
♦ LEXIS 360 : Encyclopédies/JCL. Civil Code/Art. 1112 à 1112-2
Deuxième partie : obligation précontractuelle d’information
♦ Site « A. Bamdé et J. Bourdoiseau » : l’obligation précontractuelle d’information –
♦ DALLOZ : Documentation/Répertoire de droit civil/Bonne foi dans la formation du contrat.
♦ LEXIS 360 : Encyclopédies/JCL. Civil Code/Art. 1112 à 1112-2
Troisième partie : devoir de confidentialité
♦ DALLOZ : Obligation de confidentialité.
♦ LEXIS 360 : Obligation de confidentialité