Jean-Claude LEMALLE

Jean-Claude LEMALLE : une expérience de juge-consulaire
Arrêt du 12/06/2024, n° 23-11630 : l'information de l'emprunteur sur les conditions de réalisation d'une garantie (grantie BPI France)
Table des matières

1 – Motivation de l’arrêt

Vu l’article 1231-1 du code civil :

Il résulte de ce texte que la banque dispensatrice de crédit est tenue d’une obligation d’informer l’emprunteur sur les modalités de mise en œuvre d’une garantie souscrite au profit de celle-ci.

Pour rejeter la demande de dommages et intérêts de la société à l’encontre de la banque pour manquement à son obligation d’information, l’arrêt retient que la clause de garantie insérée au contrat de prêt est parfaitement claire en ce qu’elle bénéficie au prêteur, qu’une garantie n’est par définition que subsidiaire et que la communication d’une notice n’est pas utile.

En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que la banque avait informé la société des modalités de la garantie de la société Bpifrance et, en particulier, de son caractère subsidiaire, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision “.

2. – Les faits

Un contrat est conclu entre une banque et une société pour l’octroi d’un prêt de 400 000 €, avec pour garantie la participation au risque de la société Bpifrance à hauteur de 50 %.

Des échéances étant demeurées impayées, la banque a prononcé la déchéance du terme, puis a assigné la société en paiement, laquelle a invoqué un manquement de la banque à son obligation d’information relative à la garantie Bpifrance.

En cause d’appel, les juges du fond estiment que les stipulations contractuelles de la garantie souscrite sont claires et que celles-ci prévoyaient que la garantie bénéficiait au seul prêteur et non au débiteur principal. La société emprunteuse est ainsi déboutée de son action indemnitaire.

Dans l’acte de prêt il était stipulé, dans une rubrique, « Garanties : à la sûreté et remboursement du présent prêt en principal et intérêts, frais et autres accessoires et de l’exécution de toutes les obligations du présent contrat, l’Emprunteur fournit au Prêteur la garantie désignée ci-dessous : BPI France [… ] pour une quotité de 50,00 % ».

La Cour d’appel en a déduit que cette garantie bénéficie clairement au prêteur et non à l’emprunteur puisqu’est indiqué : “ l’Emprunteur fournit au Prêteur la garantie ” ». C’est cette lecture que contestait le demandeur au pourvoi.”

3. – Commentaires

Au regard de l’article L1112-1 la Cout de cassation met à la charge de la banque une obligation d’information.

En effet, l’emprunteur doit pouvoir connaître comment fonctionne la garantie pour savoir comment il s’engage et à quelles conditions. Dans cette affaire, on comprend que la société pensait qu’avant d’être assignée en paiement, la société Bpifrance aurait versé les fonds au prorata de la part de risque assumé.

L’obligation d’information concerne ici les modalités de mise en œuvre de la garantie Bpifrance.

La Cour de cassation a jugé que la stipulation du contrat n’était pas claire et que l’emprunteur pouvait avoir compris que la présence de BPI pouvait limiter le montant de son propre engagement de remboursement. Il pouvait aussi croire qu’il s’agissait d’une garantie à son profit (même si cela ne limitait pas son devoir de remboursement).

Estimant, que la banque n’a pas exécuté son devoir de conseil correctement, la Cour de cassation fait application de l’article 1231-1 du Code civil qui dispose que :

Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure “.

L’information donnée doit donc être plus explicite, d’où l’importance d’une documentation spécifiquement prévue pour ce type d’opération.

4. – Complément d’information

Il ne s’agit pas ici d’un devoir de mise en garde, mais d’un devoir d’information avant la signature d’un contrat de prêt.

Cet arrêt qui concerne l’emprunteur, est probablement applicable à la caution.

Enfin, notons, qu’il appartiendra à la banque, devant la Cour d’appel de BOURGES, de justifier par de nouveau document qu’elle a valablement informé l’emprunteur.  

 

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