L’astreinte est une technique destinée à faire pression sur un débiteur condamné pour l’inciter à exécuter ses obligations et consistant en une condamnation pécuniaire accessoire croissant en fonction de son degré de résistance.
L’astreinte est indépendante des dommages-intérêts.
Toutes les obligations, quelle qu’en soit la source, peuvent donner lieu à une condamnation du débiteur à exécution sous astreinte. L’origine contractuelle ou extracontractuelle de l’obligation importe peu.
L’astreinte consiste ici à amener le débiteur à respecter le jugement qui lui ordonne d’accomplir une prestation. Exemples :
L’astreinte peut être utilisée pour dissuader le débiteur de faire ce qui lui est interdit. Exemples :
L’astreinte peut être ordonnée sur une obligation de payer une somme d’argent, elle constitue alors une sanction à la désobéissance d’une décision de justice.
Concernant la restitution, il s’agit par exemple de la livraison de la chose vendue ou louée.
Toute personne juridique a vocation à bénéficier du prononcé d’une astreinte, dès lors qu’elle fait valoir en justice une obligation susceptible d’en être assortie, peu important qu’il s’agisse d’une personne physique, particulier ou non, ou d’une personne morale, soit française ou étrangère.
L’astreinte est une mesure à caractère personnel concernant seulement le débiteur récalcitrant.
Dans le cas où l’obligation est solidaire, il importe donc que soient bien précisés celui ou ceux des débiteurs concernés par l’astreinte.
L’article L. 131-1 du Code des procédures civiles d’exécution précise dans son alinéa 1 : “Tout juge” peut ordonner une astreinte pour assurer l’exécution de sa décision ».
Mais l’alinéa 2 du même texte prévoit une compétence particulière du juge de l’exécution pour assortir d’une astreinte le jugement d’une autre juridiction.
Au regard du premier alinéa de l’article L. 131-1 du Code des procédures civiles, les tribunaux de commerce ont donc compétence pour mettre en œuvre ce « dispositif de soutien à la force exécutoire des jugements ».
Le juge des référés peut sans aucun doute « prononcer des condamnations à des astreintes » pour assurer l’exécution de ses décisions.
Le juge de l’exécution, en dehors de sa compétence de droit commun en matière d’astreinte, peut, en vertu de l’alinéa 2 de l’article L. 131-1 du Code des procédures civiles d’exécution, “assortir d’une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité”.
Destinée à souligner la nécessité de se conformer à la décision du juge, l’astreinte peut être prononcée à la demande d’une partie ou d’office, le juge n’étant pas tenu de provoquer préalablement les explications contradictoires des parties.
Le juge apprécie souverainement l’opportunité d’assortir d’une astreinte le jugement qu’il prononce.
La Cour de cassation décide même qu’il n’a pas à motiver sa décision, que celle-ci prononce l’astreinte ou rejette une demande la sollicitant.
Le juge dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour apprécier le montant susceptible de faire réfléchir sérieusement le débiteur aux conséquences de l’inexécution en lui faisant comprendre qu’il lui en coûtera davantage que de se soumettre à l’ordre du juge.
Le juge peut même fixer le montant de l’astreinte à un taux supérieur à celui sollicité par le justiciable (Cour de cassation, chambre sociale du 10/01/1980, n°78-41250).
Alinéa 1 de l’article R. 131-1 du Code des procédures civiles d’exécution : « L’astreinte prend effet à la date fixée par le juge, laquelle ne peut pas être antérieure au jour où la décision portant obligation est devenue exécutoire ».
Cela suppose que la décision « portant obligation », ait été régulièrement notifiée au débiteur condamné.
Si le jugement est assorti de l’exécution provisoire, il convient de prendre en compte la date fixée par le juge du premier degré, juge dont la décision n’est pas suspendue par l’appel.
En l’absence d’exécution provisoire, si le jugement est confirmé, l’astreinte ne court que du jour où l’arrêt devient exécutoire, à moins que les juges d’appel ne fixent un point de départ postérieur.
Alinéa 2 et 3 de l’article L.131-2 du Code des procédures civiles d’exécution :
« L’astreinte est provisoire ou définitive. L’astreinte est considérée comme provisoire, à moins que le juge n’ait précisé son caractère définitif.
Une astreinte définitive ne peut être ordonnée qu’après le prononcé d’une astreinte provisoire et pour une durée que le juge détermine. Si l’une de ces conditions n’a pas été respectée, l’astreinte est liquidée comme une astreinte provisoire ».
Si elle est ordonnée pour la première fois, au regard d’une condamnation, elle est, en application de l’article L. 131-2 alinéa 3, obligatoirement provisoire.
Elle peut devenir définitive que par un deuxième jugement, par exemple en cas de liquidation provisoire, le débiteur n’ayant toujours pas exécuté son obligation.
Une astreinte définitive doit obligatoirement comporter un terme.
Si une astreinte était qualifiée d’emblée de définitive, ou ne mentionnerait aucune durée, elle sera traitée par le juge ayant à la liquider comme une astreinte provisoire et donc révisable.
Une astreinte qualifiée, légalement, de définitive par le juge, n’est pas modifiable, sauf cas de force majeure.
Nous avons déjà indiqué que l’astreinte en première condamnation, ne peut être que provisoire.
Si l’astreinte provisoire, contrairement à l’astreinte définitive, peut avoir une durée indéterminée, il est conseillé d’en fixer un terme. En effet à défaut d’une telle précision l’astreinte peut courir indéfiniment jusqu’à une lointaine demande de liquidation portant sur des montants importants.
Concernant la possibilité de la modifier, voir les explications ci-dessous et ceci au regard de l’alinéa 1 et 2 de l’article L. 131-4 :
« Le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter.
Le taux de l’astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation ».
Contrairement au pouvoir dont il dispose lors du prononcé, le juge ne peut déclencher d’office la liquidation de l’astreinte, que celle-ci est définitive ou provisoire.
La liquidation de l’astreinte est en outre une nécessité pour le créancier voulant mettre un point final au bras de fer qui l’oppose à son débiteur récalcitrant.
Il en résulte que la liquidation doit être sollicitée et constitue une véritable demande en justice.
Comme pour toute demande en justice, l’exercice de l’action tendant à la liquidation est libre et facultatif ; c’est au créancier d’apprécier l’opportunité et le moment d’agir.
Au moment de la liquidation, le juge doit s’assurer que le débiteur a véritablement manqué à l’obligation qui lui a été judiciairement imposée. Il doit au besoin rectifier le point de départ de l’astreinte si celui prévu par le juge au moment de son prononcé s’avère illégal.
Lorsqu’une astreinte assortit une décision de condamnation à une obligation de faire, il incombe au débiteur de rapporter la preuve qu’il a exécuté son obligation (Cour de cassation, chambre civile 1 du 28/11/2007, n°06-12897). Il en résulte qu’en présence d’une obligation de ne pas faire, la charge de la preuve incomberait alors au créancier, qui doit démontrer le manquement de son adversaire à l’obligation mise à sa charge.
La liquidation demandée peut avoir pour objet de prendre acte de l’inexécution (totale ou partielle) ou de l’exécution tardive, et d’en tirer toutes les conséquences financières.
Mais il est fréquent que la demande de liquidation n’ait pas pour objet de tirer un trait définitif sur le litige, mais de faire le point sur la résistance du débiteur en obtenant du juge une liquidation partielle pour la période écoulée.
Le juge pourra ainsi délivrer un titre correspondant à cette période, et le cas échéant, modifier les conditions de l’astreinte pour la rendre plus efficace ; l’opération pourrait d’ailleurs se renouveler et aboutir à autant de liquidations partielles.
Article L. 131-3 du Code des procédures civiles d’exécution :
« L’astreinte, même définitive, est liquidée par le juge de l’exécution, sauf si le juge qui l’a ordonnée reste saisi de l’affaire ou s’en est expressément réservé le pouvoir ».
Tout juge peut donc valablement se réserver la liquidation de l’astreinte qu’il ordonne, cela nécessite que la juridiction ait « expressément » fait connaître sa volonté à cet égard. Dans le doute, pouvant résulter de formules ambiguës, la compétence appartient au juge de l’exécution.
La juridiction des référés n’échappe pas au principe. Elle peut incontestablement ordonner une astreinte et s’en réserver la liquidation
La liquidation de l’astreinte n’a pas lieu d’être si la décision de condamnation a été exécutée en temps voulu avant même que l’astreinte prononcée ait commencé à courir, la charge de la preuve reposant désormais sur le débiteur, du moins lorsqu’il s’agit d’une obligation de faire.
Il appartient au juge chargé de la liquidation de trancher toute difficulté d’appréciation relativement au point de savoir si le débiteur a véritablement manqué à l’obligation mise à sa charge, en interprétant si besoin est, le dispositif d’ordonnance de l’astreinte.
L’astreinte perd encore sa raison d’être quand l’exécution de la condamnation est devenue impossible, l’allocation de dommages-intérêts est dans ce cas la mesure la plus appropriée.
Pour la période postérieure à la mise en place de l’astreinte et antérieure à la constatation du caractère définitif de l’inexécution, rien ne s’oppose à la liquidation de l’astreinte.
Alinéa 3 de l’article L. 131-4 du Code de procédure des voies d’exécution :
« L’astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient, en tout ou partie, d’une cause étrangère ».
Un événement extérieur au débiteur, qu’il ne pouvait ni prévoir ni maîtriser, fait obstacle à la liquidation d’une astreinte qui disparaît dans son principe, que celle-ci soit définitive ou provisoire.
La Cour de cassation reconnaît au juge du fond un pouvoir souverain d’appréciation à cet égard.
Exemple : Des documents détruits par un tiers que le débiteur condamné à les produire sous astreinte ne peut plus remettre.
Rien n’interdit au juge liquidateur de constater la présence d’une cause étrangère justifiant la suppression partielle de l’astreinte pour une première période et d’en augmenter le taux pour une seconde période.
Alinéa 1 de l’article L. 131-4 :
« Le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter ».
L’appréciation tant des conditions de la révision que de ses modalités relève du pouvoir souverain du juge chargé de la liquidation.
Pour la Cour de cassation, le juge qui réduit le montant d’une astreinte provisoire se doit de motiver sa décision en ne se bornant pas à des considérations d’équité.
L’astreinte provisoire ne peut être réduite ou même anéantie, par le juge, qu’au regard du seul comportement du débiteur ou des difficultés rencontrées pour l’exécution et non par exemple, au regard d’une disproportion flagrante entre ladite somme et l’enjeu du litige.
Alinéa 2 de l’article L. 131-4 :
« Le taux de l’astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation ».
Rappelons qu’une astreinte définitive :
Jusqu’à la liquidation de l’astreinte, même si celle-ci était définitive, son bénéficiaire ne peut se prétendre titulaire d’un droit qui ne sera véritablement constitué que par le juge liquidateur.
Le jugement qui liquide l’astreinte est revêtu de l’autorité de la chose jugée au sens plein du terme. Une nouvelle demande de liquidation serait donc irrecevable, dès lors qu’elle serait identique à une précédente déjà jugée.
L’article R. 131-4 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit que « la décision du juge est de plein droit exécutoire par provision ».
DIT que la condamnation en principal sera assortie d’une astreinte provisoire de …… € par jour de retard, et ce à compter d’un délai de 8 jours de la signification de la présente décision.
DIT que l’astreinte provisoire court pendant un délai maximum de … (délai à fixer), à charge pour xx, à défaut de paiement à l’expiration dudit délai, de solliciter du juge de l’exécution (voir la possibilité pour le juge de se réserver la liquidation de l’astreinte), la liquidation de l’astreinte provisoire et le prononcé de l’astreinte définitive.
CONDAMNE xx à restituer à yy le véhicule de marque sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et ce à compter d’un délai de 8 jours de la signification de la présente décision,
DIT que l’astreinte provisoire court pendant un délai maximum de 3 mois, à charge pour xx, à défaut de restitution à l’expiration dudit délai, de solliciter du juge de l’exécution, la liquidation de l’astreinte provisoire et le prononcé de l’astreinte définitive.
CONDAMNE Monsieur DUPONT à procéder à la coupe des branches des arbres qui avancent sur la propriété de Madame DUPUY en limite contiguë des parcelles B 18 et B19 situées commune de LENS au lieudit « Les Ruches » dans le délai d’UN MOIS à compter de la signification de la présente décision.
DIT que faute par Monsieur DUPONT de procéder à la coupe ordonnée, il sera redevable, passé ce délai, d’une astreinte dont le montant sera provisoirement fixé jusqu’au 30 novembre 2006, à 45 € par jour de retard.
ORDONNE à Monsieur DURANT de ne pas garer son véhicule sur les places de parking N° 31 à 33 de la résidence du parc sise à BORDEAUX 23 rue Duchesne à compter de la présente décision.
DIT que faute par Monsieur DURANT de ne pas respecter cette interdiction, il sera redevable par infraction constatée d’une astreinte dont le montant est provisoirement fixé à la somme de 200 euros.
DALLOZ – Documentation/Encyclopédie/Répertoire de procédure civile : Astreinte.
Site A. Bambé et J. Bourdoiseau – L’astreinte judiciaire : fixation, point de départ et liquidation
LEXIS 360 Entreprise – Les tribunaux de commerce n’ont plus d’accès au contenu de la documentation concernant la procédure civile.
Articles L. 131-1 à L.131-4 et R. 131-1 à R. 131-4 du Code des procédures civiles d’exécution