Jean-Claude LEMALLE

Jean-Claude LEMALLE : une expérience de juge-consulaire

Responsabilité des prestataires de service de paiement dans l'exécution d'un ordre de paiement

Table des matières

⇒ Responsabilité des prestataires de service de paiement dans l’exécution d’un ordre de paiement (Cour de cassation, chambre commerciale du 15/01/2015, n° 23-15437 – voir également l’arrêt 23-13579)

1. – Les faits

Des époux sont titulaires d’un compte joint ouvert dans les livres d’un établissement bancaire, ils réalisent depuis ce compte deux virements le 14 août 2019, pour financer l’achat d’un véhicule automobile. Afin de procéder à ces opérations, l’épouse a communiqué, à la banque, par voie électronique, l’IBAN fourni par le vendeur. Mais le 21 août 2019, les fonds ne sont toujours pas parvenus sur le compte dudit vendeur.

Les époux acquéreurs se rendent compte qu’un tiers s’est immiscé sur leur messagerie pour substituer à l’IBAN de leur cocontractant son propre IBAN. La banque refuse de restituer les fonds de sorte que ses clients saisissent le tribunal sur le fondement des dispositions du Code monétaire et financier.

En cause d’appel, les juges du fond condamnent la banque en précisant que l’article L. 133-21 du Code monétaire et financier ne dispense pas le banquier de son obligation de vigilance. Selon la cour d’appel, la banque aurait dû vérifier la régularité de l’opération en contrôlant l’absence d’anomalie apparente.

2. – Motivation de l’arrêt

 » Il s’ensuit que, dès lors que la responsabilité d’un prestataire de services de paiement est recherchée en raison d’une opération de paiement non autorisée ou mal exécutée, seul est applicable le régime de responsabilité défini aux articles L. 133-18 à L. 133-24 du code monétaire et financier, qui transposent les articles 71 à 74 de la directive (UE) 2015/2366 du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, modifiant les directives 2002/65/CE, 2009/110/CE et 2013/36/UE et le règlement (UE) n° 1093/2010, et abrogeant la directive 2007/64/CE, à l’exclusion de tout régime alternatif de responsabilité résultant du droit national.

Selon l’article L. 133-21 du code précité, qui transpose l’article 88 de la directive du 25 novembre 2015, un ordre de paiement exécuté conformément à l’identifiant unique fourni par l’utilisateur du service de paiement est réputé dûment exécuté pour ce qui concerne le bénéficiaire désigné par l’identifiant unique. Si l’identifiant unique fourni par l’utilisateur du service de paiement est inexact, le prestataire de services de paiement n’est pas responsable de la mauvaise exécution ou de la non-exécution de l’opération de paiement.

Pour condamner la banque à verser à M. et Mme [H] certaines sommes en réparation des préjudices résultant de l’exécution des ordres de virement et de transfert litigieux, l’arrêt retient que si, en application de l’article L. 133-21 du code monétaire et financier l’identifiant unique fourni par l’utilisateur du service de paiement est inexact, le prestataire de services de paiement n’est pas responsable de la mauvaise exécution ou la non exécution de l’opération de paiement ; que ce texte ne dispense cependant pas le banquier de son obligation de vigilance en vertu de laquelle il lui appartient de vérifier la régularité des opérations bancaires qui lui sont soumises en contrôlant l’absence d’anomalie apparente.

En statuant ainsi, alors que l’article L. 133-21 du code monétaire et financier est exclusif de toute application des règles de droit commun, la cour d’appel a violé les textes susvisés, le premier par fausse application, le second par refus d’application « .

3. – Note

En application de l’article L. 133-21 du Code monétaire et financier, un ordre de paiement exécuté conformément à l’identifiant unique fourni par l’utilisateur du service de paiement est réputé être correctement exécuté, en ce qui concerne le bénéficiaire désigné par l’identifiant unique.

Si l’identifiant unique fourni par l’utilisateur est inexact, le prestataire de paiement n’est pas responsable de cette mauvaise exécution. Dans cette hypothèse le banquier n’a aucune obligation de vigilance ou de vérifier la vérifier la régularité de l’opération, en l’absence d’anomalies apparentes.

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