Article 1137 du Code civil :
« Le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.
Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation ».
Article 1138 du Code civil
« Le dol est également constitué s’il émane du représentant, gérant d’affaires, préposé ou porte-fort du contractant.
Il l’est encore lorsqu’il émane d’un tiers de connivence ».
Article 1139 du Code civil
« L’erreur qui résulte d’un dol est toujours excusable ; elle est une cause de nullité alors même qu’elle porterait sur la valeur de la prestation ou sur un simple motif du contrat ».
Le dol dans la formation du contrat est usuellement défini comme une tromperie destinée à surprendre le consentement du cocontractant.
La qualification de dol, vice du consentement, suppose que soient remplies trois séries de conditions relatives :
Le dol n’est en principe sanctionné que s’il a pour auteur l’une des parties au contrat et non un tiers.
Sur ce point, le dol s’oppose à la violence, dont l’article 1142 du Code civil précise qu’elle est une cause de nullité qu’elle ait été exercée par une partie ou par un tiers.
Ainsi, un prêt destiné au financement d’une vente n’est pas vicié par le dol du vendeur, étranger au contrat du prêt litigieux.
L’application la plus fréquente du principe est celle qui se rencontre en matière de cautionnement. Le contrat de cautionnement étant conclu entre le créancier et la caution, celle-ci ne peut invoquer que les manœuvres ou mensonge dont se seraient rendus coupables le créancier lui-même et non ceux dont elle a pu être victime de la part du débiteur cautionné, tiers au contrat de cautionnement.
Toutefois, l’erreur provoquée par le dol d’un tiers à la convention peut entraîner la nullité du contrat lorsqu’elle porte sur la substance de ce contrat.
De plus, la victime du dol peut en toute hypothèse engager la responsabilité civile extracontractuelle du tiers.
Aux termes de l’article 1138, alinéa 1ier du Code civil : « le dol est également constitué s’il émane du représentant, gérant d’affaires, préposé ou porte-fort du contractant.
Ce texte doit être compris comme assimilant le dol des personnes qu’il énumère à celui du contractant, et cela sans autre condition que celle tenant à la qualité de ces personnes : il n’est pas nécessaire que le tiers ait agi de connivence avec le contractant.
Le contractant peut se voir imputer les conséquences du dol commis par son représentant conventionnel, c’est-à-dire ordinairement son mandataire.
Le contractant peut également se voir reprocher le dol commis par son représentant légal. Tel est spécialement le cas lorsque sont en cause les agissements dolosifs du dirigeant de la société contractante.
Le dol du dirigeant social ne peut cependant être opposé à la société qu’autant que les manœuvres ont été commises en cette qualité.
La gestion d’affaires est la qualification donnée aux engagements pris sans mandat par une personne dite » le gérant » qui s’immisce volontairement dans les affaires d’un tiers dit » le maître de l’affaire » pour sauvegarder les intérêts de ce dernier.
Exemple : réalisation de travaux urgents dans la maison d’un voisin, en son absence (fuite d’eau, vitres cassées…).
Le comportement dolosif du préposé est assimilé à celui de son commettant. Un vendeur peut se voir imputer les artifices utilisés par ses employés pour tromper l’acheteur.
La « convention de porte-fort » est une disposition conventionnelle par laquelle une personne s’engage envers une autre à rapporter le consentement d’un tiers à la constitution d’un droit déterminé. Caractérise une promesse de porte-fort la convention par laquelle un associé s’engage à faire agréer à certaines conditions un tiers qui souhaite acquérir des parts sociales dont il est propriétaire.
Le dol émanant d’un tiers, autre que ceux énumérés par le 1ier alinéa de l’article 1138 du Code civil, ne constitue un vice du consentement, qu’à la condition de démontrer une connivence entre le contractant et le tiers.
La connivence se situe au-dessus de la simple connaissance et se rapproche de la complicité. Cette entente pouvant être tacite.
A noter, que celui qui contracte en connaissant les agissements dolosifs d’un tiers se rend nécessairement coupable soit d’un dol par commission s’il a suscité ces manœuvres ou y a participé, soit pour le moins, d’un dol par réticence s’il s’est borné à les taire.
Toutes espèces d’agissements tendant à créer une fausse apparence :
Le dol est caractérisé en cas d’intervention d’un tiers complice.
En revanche ne constituent pas, en principe, des manœuvres dolosives les simples pressions exercées sur le consentement en dehors de toute tromperie.
Le dol peut résulter d’un simple mensonge, même en l’absence de manœuvres destinées à lui donner crédit.
Il importe peu que le mensonge soit oral ou écrit, ni qu’il figure dans l’acte.
Exemple : mensonge fait à la caution quant à la solvabilité du débiteur principal ou quant à l’affectation des fonds objet du prêt cautionné.
La jurisprudence reste cependant sensible à l’idée selon laquelle le dol ne commence qu’au-delà d’un certain seuil d’exagération. L’action en annulation est rejetée dès lors que l’exagération commise dans la description publicitaire ne dépasse pas ce qui est habituel dans les pratiques commerciales.
Il convient ici de faire la distinction entre le devoir général d’information précontractuelle et le fait de s’abstenir intentionnellement de dire ce que l’on avait l’obligation de dire.
A noter de plus, que le 3ième alinéa de l’article 1137 du Code civil précise que « ne constitue un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation ».
Exemple : le dol par dissimulation intentionnelle (anciennement dénommée réticence dolosive) sera retenu, en matière de vente automobile, à l’encontre du vendeur, même non-professionnel, qui n’a pas révélé que le véhicule avait été accidenté.
A également été sanctionné le vendeur d’un fonds de commerce qui garde le silence sur le fait que seule une fraction de la terrasse du fonds de commerce de restauration rapide pouvait être légalement exploitée.
Le dol suppose, en tant que délit civil, l’existence d’une faute intentionnelle. La jurisprudence exige que l’auteur du comportement dolosif invoqué ait agi intentionnellement pour tromper le contractant et le déterminer à conclure le contrat.
L’existence ou l’absence d’intention de tromper fournit le critère essentiel de distinction entre le dol par réticence et le simple manquement à une obligation d’information.
Il convient de rappeler que le 2ième alinéa de l’article 1137 du Code civil précise que le silence n’est dolosif que s’il est gardé sur une information dont on sait le caractère déterminant pour l’autre partie.
Le comportement dolosif de l’un ne vicie pas le consentement de l’autre en lui-même mais seulement par la méprise qu’il a provoquée.
Le dol doit être écarté s’il est constaté, par exemple, que l’acquéreur d’un immeuble se plaignant de ne pas avoir été informé de l’insalubrité des lieux « avait pu procéder à toutes constatations utiles » et « avait signé le « compromis » en toute connaissance de cause », ou que celui soutenant que lui ont été cachées les défectuosités affectant le chauffage « avait reçu toutes les informations nécessaires portant sur la chaudière dont il ne pouvait ignorer qu’elle datait de plus de vingt ans ».
Dès lors qu’elle résulte d’un comportement dolosif, l’erreur commise par la victime peut être sanctionnée quel qu’en soit l’objet (y compris l’erreur sur la valeur), elle est toujours excusable, de sorte que la seule condition exigée est qu’il s’agisse d’une erreur déterminante.
Elle pèse naturellement sur le demandeur en nullité, c’est-à-dire sur la victime du dol.
Spécialement, le dol ne peut se présumer du simple fait que le contrat est objectivement déséquilibré.
Les moyens de preuve sont libres : le dol est un fait juridique qui peut être établi par tout moyen.
Le dol doit comme tout vice du consentement s’apprécier au moment de la formation du contrat. Par suite, il y a lieu de se placer, par exemple, au jour de la promesse synallagmatique valant contrat et non au jour de sa réitération devant notaire.
La preuve du dol peut cependant être déduite d’indices tirés de faits postérieurs à la conclusion du contrat.
Le dol est, en tant que vice du consentement, une cause de nullité relative du contrat et non d’une résiliation ou d’une résolution.
L’article 1184 du Code civil prévoit la faculté de prononcer, sous certaines conditions, une nullité partielle limitée aux clauses affectées par le vice.
Cette nullité relative, suppose, en principe, une décision judiciaire, mais l’ordonnance de 2016 a en outre institué une nullité conventionnelle en conférant aux parties la faculté de se dispenser de recourir au juge et de constater la nullité d’un commun accord (article 1178 1ier alinéa du Code civil).
L’article 1183 du Code civil offre à l’auteur du dol de mettre en œuvre l’action interrogatoire en demandant par écrit, à la partie qui pourrait se prévaloir de la nullité, soit de confirmer le contrat, soit d’agir en nullité dans un délai de 6 mois à peine de forclusion. Cette action n’est possible que si la cause de nullité a cessé.
L’écrit doit mentionner qu’à défaut d’action en nullité exercée avant l’expiration du délai de 6 mois, le contrat sera réputé confirmé.
L’action en nullité se prescrit, en principe, comme toute action en nullité, par 5 ans.
Le délai de prescription court, en principe du jour de la découverte du vice. La Cour de cassation a cependant admis que le point de départ du délai pouvait être fixé, non à la date de la découverte effective, mais à celle où le contractant aurait pu déceler le vice allégué.
En tant que délit civil, le dol ouvre à la victime une action en réparation du préjudice subi, ce qui suppose évidemment que soit rapportée la preuve d’un tel préjudice.
Article 1178 alinéa 3 du Code civil : « Indépendamment de l’annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité du droit commun ».
Rappelons que nul ne pouvant se prévaloir de sa propre turpitude, aucune clause du contrat ne peut empêcher le contractant d’exercer à l’encontre de la personne ayant commis un dol, une action en dommages et intérêts.
Notons également que la réparation peut être demandée en plus de l’annulation, si celle-ci laisse subsister un préjudice tel que manque à gagner ou frais du contrat par exemple.
De même la réparation peut aussi être demandée à la place de l’annulation.
Cour de cassation, chambre civile 3 du 07/11/2019, n° 18-13463
« Attendu, selon l’arrêt attaqué (Orléans, 18 décembre 2017), que, par acte authentique du 1er octobre 2010, dressé par M. D…, notaire, M. K… a vendu à M. I… une maison d’habitation ;
Que, se plaignant de l’apparition de fissures importantes affectant l’immeuble, M. I… a assigné M. K… en annulation de la vente pour dol ;
Attendu que M. K… fait grief à l’arrêt de prononcer l’annulation du contrat de vente ;
Mais attendu qu’ayant relevé que l’expertise avait révélé que l’immeuble était situé dans le périmètre d’une zone qui avait été concernée par des mouvements de terrain consécutifs à la sécheresse de mai 1989 à septembre 1996, qu’un arrêté de catastrophe naturelle avait été pris et que M. K… avait bénéficié d’une indemnité, que celui-ci avait omis de porter à la connaissance de l’acquéreur, lors de la conclusion de la vente, l’existence de cet épisode de sécheresse et qu’il avait fait une déclaration mensongère dans l’acte authentique de vente en indiquant qu’à sa connaissance le bien n’avait jamais connu de sinistres résultant de catastrophes naturelles, et souverainement retenu que l’information tenant à l’existence d’un précédent sinistre sécheresse avec mouvement de terrain constituait une information essentielle pour l’acquéreur et que le silence fautif de M. K… avait vicié le consentement de M. I… sur un élément déterminant et l’avait conduit à contracter à des conditions qu’il n’aurait pas acceptées s’il avait eu connaissance, même au dernier moment, de cette information, la cour d’appel a pu déduire de ces seuls motifs que le comportement de M. K… était constitutif d’une réticence dolosive et que la vente devait être annulée ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ».
Site “A. Bamdé et J. Bourdoiseau” : vice du consentement : le dol notion éléments constitutifs et réforme des obligations, la réticence dolosive.
DALLOZ – Documentation/ répertoire de droit civil : dol
LEXIS 360 : Encyclopédies/JCL. Civil Code/Art. 1137 à 1139 : dol.