Pour faire échec aux prétentions du requérant, la partie adverse peut, pour assurer sa défense, soutenir trois sortes de moyens qui consisteront à faire déclarer la demande :
La demande irrégulière, est celle qui tombe sous le coup soit d’une exception de procédure à savoir : incompétence, litispendance, connexité, exceptions dilatoires et les exceptions de nullité (nullité des actes pour vice de forme ou irrégularité de fond).
La demande irrecevable, est celle qui tombe sous le coup d’une fin de non-recevoir, à savoir un défaut de droit d’agir.
La demande mal fondée, est celle qui n’est pas justifiée en droit et/ou en fait, de sorte que le juge, après examen du fond de cette demande, ne peut pas l’accueillir favorablement. Il s’agit de l’examen du fond du litige.
Nous étudierons ici, la fin de non-recevoir, à savoir le défaut du droit d’agir.
Article 122 du Code de procédure civile :
« Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande sans examen au fond, pour défaut du droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».
L’article 122 précise que le défaut du droit d’agir peut donc résulter :
soit éventuellement de plusieurs de ces faits combinés.
La fin de non-recevoir se caractérise donc par trois éléments :
Dans toutes ces hypothèses, le droit d’agir n’existe pas ou n’existe plus.
Le juge, s’il retient la fin de non-recevoir, doit alors indiquer dans le dispositif de son jugement :
Dans le cas contraire, le juge déboutera le demandeur (ou le défendeur) de sa demande de fin de non-recevoir.
Il est à noter qu’il ne s’agit pas d’une énumération limitative, le défaut du droit d’agir pourra avoir une origine contractuelle et en particulier une clause imposant une conciliation, une médiation ou une expertise avant toute action judiciaire :
Cour de cassation, chambre mixte du 14/02/2003 n° 00-19424 :
» Mais attendu qu’il résulte des articles 122 et 124 du nouveau Code de procédure civile que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées ;
Que, licite, la clause d’un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en œuvre suspend jusqu’à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s’impose au juge si les parties l’invoquent ;
Qu’ayant retenu que l’acte de cession d’actifs prévoyait le recours à une procédure de conciliation préalable à toute instance judiciaire pour les contestations relatives à l’exécution de la convention, la cour d’appel en a exactement déduit l’irrecevabilité du cédant à agir sur le fondement du contrat avant que la procédure de conciliation ait été mise en œuvre « .
A noter que d’une part, le juge ne peut relever d’office cette fin de non-recevoir et que d’autre part, cette clause n’est pas applicable aux fins d’obtenir une mesure conservatoire.
Il est donc admis qu’une partie qui s’oblige contractuellement à une solution alternative et contraignante préalable à l’action en justice, ne peut ester en justice en se dispensant d’exercer ce préalable.
De plus, dans un arrêt du 12/12/2014 (n° 13-19684) la chambre mixte de la Cour de cassation a rendu un arrêt concernant la régularisation de cette fin de non-recevoir en cours d’instance :
» la situation donnant lieu à la fin de non-recevoir tirée du défaut de mise en œuvre d’une clause contractuelle qui institue une procédure, obligatoire et préalable à la saisine du juge, favorisant une solution du litige par le recours à un tiers [en l’espèce, une saisine pour avis du Conseil régional de l’Ordre des Architectes], n’est pas susceptible d’être régularisée par la mise en œuvre de la clause en cours d’instance «
La clause d’un contrat imposant aux parties de solliciter l’avis d’un expert choisi d’un commun accord, avant toute action judiciaire, constitue une clause de conciliation préalable. Encore faut-il que la clause ne soit pas rédigée de manière elliptique et en termes très généraux.
Il appartient au juge du fond de déterminer s’il s’agit d’une clause instituant une procédure de conciliation et ceci par recherche de la commune intention des parties.
Le défaut de mise en œuvre de cette clause constitue une fin de non-recevoir.
Cour de cassation, chambre commerciale du 06/06/2024, n° 22-24784
Avoir qualité à agir,, c’est être titulaire d’un droit.
Ainsi, pour qu’une action (demande ou défense) en justice soit recevable, il est donc obligatoire que la personne justifie de la qualité à laquelle se trouve attaché ce à quoi elle prétend (par exemple, sa qualité de propriétaire, d’usufruitier, d’héritier ou de créancier…).
Exemple : un commandement de payer un loyer délivré par une personne dépourvue de qualité pour le faire (par exemple l’épouse du propriétaire alors qu’ils sont mariés sous le régime de la séparation de biens) ne peut entraîner l’application de la clause résolutoire d’un bail.
Autre exemple ; le débiteur mis en liquidation judiciaire est irrecevable à interjeter appel d’un jugement concernant son patrimoine (dessaisissement article L. 641-9 du Code de commerce) et cette fin de non-recevoir, qui est d’ordre public, doit être relevée d’office par le juge (article 125 du Code de procédure civile) (Cour de cassation, chambre commerciale du 18/01/2023, n° 21-17581).
A noter qu’une société absorbante peut agir en paiement d’une créance de l’absorbée dès la date d’effet de la fusion.
Il peut également s’agir de la disparition (provisoire ou non) du droit d’agir, ainsi, en application de l’article L. 622-21 du Code de commerce, un créancier ne pourra agir contre son débiteur en procédure collective, pour une condamnation au paiement d’une somme d’argent (Cour de cassation, chambre commerciale du 12/01/2010, n° 08-19645).
Arrêt de la Cour d’appel d’Angers du 30/01/2020, n° 19/01001, qui reconnaît un défaut de qualité à agir.
» Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la SA My Money Bank
L’article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
L’article 123 du même code précise que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu’il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.
Conformément à l’article L.670-1 du code de commerce, l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire civile peut être prononcée à l’égard des personnes physiques, domiciliées dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, et à leur succession, qui ne sont ni des agriculteurs, ni des personnes exerçant une activité commerciale, artisanale ou toute autre activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire, lorsqu’elles sont de bonne foi et en état d’insolvabilité notoire.
L’article L.640-5 du même code précise que la procédure de liquidation judiciaire peut être ouverte sur l’assignation d’un créancier, quelle que soit la nature de sa créance.
Le crédit impayé dont se prévaut la SA My Money Bank pour exciper de sa qualité de créancière avait été octroyé par la SCA GE Money Bank.
C’est d’ailleurs cette dernière société qui avait sollicité le juge de l’exécution afin d’obtenir l’appréhension du véhicule gagé.
Or, la SA My Money Bank, demanderesse en première instance, ne répond pas à la fin de non-recevoir soulevée par M. Z et elle ne justifie pas de ce qu’elle vient aux droits de la SCA GE Money Bank pour le contrat de prêt du 4 mars 2013.
En conséquence, elle n’établie pas sa qualité de créancière et donc de sa qualité à agir.
La cour déclare irrecevable l’action engagée par la SA My Money Bank pour défaut de qualité à agir et dit en conséquence n’y avoir lieu à ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire.
Le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions « .
Arrêt de la Cour d’appel de CAEN du 06/12/2022, n° 22/00105, qui déboute de la demande de défaut de qualité à agir
Sur le défaut de qualité à agir de Monsieur [K]
» L’article 31 du code de procédure civile dispose :
‘ L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserves des cas, dans laquelle la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé.’
En l’espèce, s’il est exact que les factures afférentes à la pose des deux chaudières (Cf. Pièces 1 et 2), sont libellées à l’ordre de la société New York Applications Plastiques dont Monsieur [K] est le gérant, ce dernier démontre par la production de son avis de taxe foncière, ainsi que de la notification d’un arrêté de protection des monuments historiques (Cf. Pièces N°15 et 15 bis), qu’il est le propriétaire du château de [Localité 8] dans lequel ont été installées les chaudières litigieuses.
Il a donc la possibilité comme il l’indique à juste titre dans ses écritures, de rechercher la responsabilité délictuelle de la société QLS pour manquement à ses obligations contractuelles afin de solliciter l’indemnisation de ses propres préjudices, notamment de jouissance.
L’ordonnance entreprise sera donc infirmée en ce qu’elle a déclaré son action irrecevable pour défaut de qualité à agir « .
Il convient de ne pas confondre le défaut de qualité pour agir et le défaut de capacité à représenter une partie.
La qualité pour agir vise le titulaire de l’action, c’est-à-dire le droit de solliciter du juge qu’il examine le bien-fondé d’une prétention découlant d’un droit dont il est titulaire.
Une société mère, en sa qualité d’actionnaire de sa filiale, ne peut se substituer à celle-ci pour intenter à ses lieu et place une action qui lui permettrait d’obtenir réparation d’un préjudice personnel prenant sa source dans le préjudice subi par la seule filiale (Cour de cassation, chambre commerciale du 17/12/1991, n° 89-21607).
La représentation concerne la capacité à représenter une personne devant les juridictions, tels les mandataires sociaux. Il ne s’agit donc pas de défendre un droit propre au demandeur ou au défendeur.
Le défaut de capacité constitue une irrégularité de fond qui peut être couverte si la cause de nullité a disparu au moment où le juge statue.
Cette distinction n’est pas toujours aisée et l’intention du législateur n’est pas toujours claire. L’intérêt pratique de cette distinction se trouve heureusement limité en raison de la similitude des régimes respectifs des fins de non-recevoir et des nullités pour irrégularité de fond ?
» Extrait d’un arrêt de la Cour d’appel de PARIS du 28/01/2021, 18/04254
Sur le défaut de qualité à agir de la SCI SMCF :
Les appelants reprochent au premier juge d’avoir déclaré la SCI SMCF irrecevable pour défaut de qualité à agir. Ils exposent que les consorts B sont devenus propriétaires indivis du local objet du bail en suite de la liquidation partage de la SCI HANDAO par acte authentique du 15 janvier 2010 ; que la SCI SMCF a par suite été constituée par les propriétaires indivis en vue de la gestion locative de la boutique ; que la SCI SMCF dont les associés sont les propriétaires du bien et le gérant le mari de l’une d’elle, intervenait ainsi en qualité de gestionnaire des loyers et non de propriétaire ; que la société RYTHMES ET MUSIQUES qui réglait les loyers entre les mains de cette dernière avait parfaitement connaissance de cette qualité et ne l’a pas contestée dans le cadre de l’action en référé ayant précédé la saisine du juge du fond.
Il n’est pas discuté que la SCI SMCF n’a pas la qualité de propriétaire des locaux loués à la société RYTHMES ET MUSIQUES et que seuls les consorts B en sont propriétaires indivis en suite de la liquidation-partage de la société HANDAO par acte authentique du15 janvier 2010. Pour autant, l’assignation a été délivrée à la demande des consorts B et de la SCI SMCF sans qu’il ne soit fait mention de la qualité de mandataire des bailleurs dont elle se prévaut à ce jour. A défaut d’indication de cette qualité, elle est réputée agir en son nom personnel alors qu’elle n’a aucune qualité pour ce faire et que cette qualité ne saurait découler de la circonstance que ses associés sont les propriétaires indivis des lieux loués, lesdits locaux n’ayant fait l’objet d’aucun apport en société.
Le jugement entrepris la déclarant irrecevable pour défaut de qualité à agir sera donc confirmé, la qualité à agir des consorts B n’étant pas contestée.
Sur la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire :
Les consorts B reprochent au premier juge d’avoir retenu la nullité des commandements délivrés au visa de la clause résolutoire du bail et font valoir qu’il ne pouvait soulever d’office le moyen tiré du défaut de pouvoir de la SCI SMCF ; que la société locataire qui avait présenté des défenses au fond ne l’avait jamais soulevé avant la réouverture des débats ; qu’en tout état de cause, le défaut de pouvoir lors de la délivrance des commandements ne cause aucun grief puisque la société RYTHMES ET MUSIQUES connaissait parfaitement l’intervention de la SCI SMCF pour lui adresser le règlement des loyers ainsi que toutes correspondances concernant les lieux loués.
La société RYTHMES ET MUSIQUES reproche à la SCI SMCF de ne pas justifier du mandat l’autorisant à agir au nom des propriétaires indivis et soutient en tout état de cause que le mandat l’autorisant à percevoir les loyers n’emporte pas celui de représenter en justice.
La cour rappelle que par application des dispositions des articles 117 et suivants du code de procédure civile, le défaut de pouvoir d’une personne assurant la représentation d’une partie en justice constitue une irrégularité de fond qui affecte la validité de l’acte sans qu’il soit besoin de justifier d’un grief.
En l’espèce, deux commandements visant la clause résolutoire ont successivement été délivrés à la société RYTHMES ET MUSIQUES, le premier le 7 avril 2015 pour paiement de la somme totale de 10.690,32 euros, le second le 10 avril 2015 comportant dénonciation d’un procès-verbal de constat dressé le 7 avril 2015 et faisant commandement de ‘immédiatement et sans délai de cesser toutes activités qui sont en contradiction avec le bail commercial sus énoncé et qui ne vous ont pas été autorisées par le bailleur, et vous conformer aux clauses et conditions dudit bail dont notamment l’activité pour lequel ce bail a été consenti, à savoir : la production et distribution, vente en gros et détail de cassette vidéo et audio CD et DVD à l’exclusion de tout autre’. Ces commandements ont été délivrés à la demande de Mme Mamma DAOUD née A, Mme Ab B, Mme Ac B épouse C, Mme Ad B épouse X représentés par la SCI SMCF (…)agissant elle-même poursuites et diligences de son gérant associés M. C A.
Ces actes ont ainsi été délivrés non par les consorts B ayant pour mandataire la SCI SMCF mais par la SCI SMCF représentant les consorts B. La SCI SMCF ne justifie en cause d’appel d’aucun pouvoir de représentation en justice de nature à régulariser les actes en cause par application des dispositions de l’article 121 du code de procédure civile, un tel pouvoir ne pouvant découler du mandat apparent dont elle se prévaut. Ce pouvoir ne résulte pas davantage des statuts de la SCI SMCF produits aux débats qui ne confèrent nullement pouvoir à cette dernière d’agir en justice au nom et pour le compte de ses associés.
Il est inopérant pour les appelants de tenter de tirer argument du fait que la nullité des commandements visant la clause résolutoire n’a été invoquée par la société locataire qu’après avoir conclu sur le fond, après la réouverture des débats ordonnée par le premier juge qui s’interrogeait sur la qualité à agir de demandeurs, dès lors qu’aux termes de l’article 118 du code de procédure civile, les exceptions de nullité fondées sur l’inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédures peuvent être proposées en tout état de cause.
Il résulte de ce qui précède que les commandements visant la clause résolutoire du bail ont été délivrés à la demande d’une personne morale sans pouvoir de représentation du bailleur en justice et que la cause de nullité n’a pas disparu à la date à laquelle la cour statue. Le jugement entrepris déclarant nuls lesdits commandements et rejetant par voie de conséquence la demande de constatation de l’acquisition de la clause résolutoire sera dès lors confirmé « .
En application de l’article 31 du Code de procédure civile, le principe est que le droit d’agir, droit de former la demande afin d’obtenir un jugement sur le fond de la prétention qui s’y exprime ou de défendre à la demande, appartient à celui qui trouve intérêt au succès ou au rejet de la prétention formulée.
L’existence d’un intérêt est une condition nécessaire de celle du droit d’obtenir un jugement.
L’intérêt à l’action doit réunir trois conditions, à savoir être :
L’exigence d’un intérêt qui soit personnel au demandeur caractérise le contentieux. Elle traduit l’idée que nul n’est admis, en principe, à défendre les intérêts d’autrui, et notamment l’intérêt collectif.
Il convient de préciser que lorsqu’un demandeur invoque un droit (créancier, propriétaire …) dont il se prétend titulaire, à tort ou à raison, il invoque, à coup sûr, un intérêt personnel.
Il a été jugé que ne justifie pas d’un intérêt personnel à exercer en son nom propre une action engagée conjointement avec une société, la partie dont l’action ne tend qu’à obtenir la réparation du préjudice subi par cette société.
L’intérêt invoqué ne peut être pris en considération que s’il existe au moment où la demande est formée.
L’idée est que le rôle du juge est de trancher des litiges déjà nés.
Un intérêt éventuel ne peut être pris en considération.
Est irrecevable la demande tendant à mettre en œuvre la responsabilité d’un notaire à propos d’une vente de fonds de commerce faute pour le vendeur d’établir que le solde du prix ne sera pas payé dans la procédure de liquidation judiciaire ouverte contre l’acquéreur (Cour de cassation, chambre civile 1 du 30/04/2009, n° 07-21881)
Il convient toutefois de noter, qu’il est toujours possible d’être autorisé à prendre des mesures conservatoires, ou demander des mesures d’instruction (en particulier en application de l’article 145 du Code procédure civile), car il ne s’agit pas ici de jugement sur le fond du litige.
Arrêt de la Cour d’appel de RENNES du 08/10/2021, n° 21/00902
» EXPOSÉ DU LITIGE
Désireux de réaliser des investissements susceptibles de leur faire bénéficier d’avantages fiscaux, les époux B C ont, par l’intermédiaire de la société Atypik Patrimoine exerçant l’activité de conseil en gestion de patrimoine, réalisé divers investissements par souscription de parts sociales de PME de production audiovisuelle éligibles au dispositif de défiscalisation de la loi Tepa, notamment :
* le 20 décembre 2011, à hauteur de 3 000 euros au capital de la société Atypik Film,
* le 23 décembre 2014, à hauteur de 10 000 euros au capital de la société Plein feu Productions, * le 15 décembre 2015, à hauteur de 7 500 euros au capital de la société 3 +,
* le 6 décembre 2016, à hauteur de 4 995 euros au capital de la société Cinéastre.
Prétendant que ces placements leur avait fait subir des pertes financières, notamment du fait de la liquidation judiciaire des sociétés Atypik Film et Plein feu Productions, et faisant grief à la société Atypik Patrimoine d’avoir manqué à ses obligations d’information et de conseil, les époux B C l’ont fait assigner en paiement de dommages-intérêts devant le tribunal de grande instance de Quimper.
Par conclusions d’incident du 21 octobre 2020, la société Atypik Patrimoine a saisi le juge de la mise en état à l’effet de faire déclarer l’action des époux B C au titre des investissements des 20 décembre 2011 et 23 décembre 2014 irrecevable car prescrite, et celle exercée au titre des investissements des 20 décembre 2011, 15 décembre 2015 et 6 décembre 2016 irrecevables pour défaut d’intérêt à agir en l’absence de préjudice actuel et certain.
…
Sur l’intérêt à agir
La société Atypik Patrimoine soutient par ailleurs qu’en dehors de l’investissement réalisé par souscription de parts sociales de la société Plein Feu productions dont la liquidation judiciaire a été clôturée pour insuffisance d’actifs depuis le 18 décembre 2019 et pour laquelle le liquidateur a délivré aux époux B C un certificat d’irrécouvrabilité de leur créance, les pertes invoquées ne seraient que latentes, de sorte que le préjudice allégué n’est qu’hypothétique et que les demandes formées au titre des investissements réalisés par souscription de parts sociales dans le capital des sociétés Atypik Films, 3 + et Cinéastre seraient par conséquent irrecevables pour défaut d’intérêt à agir.
Il est cependant de principe que l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l’action, et que l’existence du préjudice invoqué par les demandeurs n’est pas une condition de recevabilité de l’action mais de son succès.
Il appartiendra donc au tribunal statuant au fond de déterminer si le préjudice invoqué au titre des investissements réalisés par souscription de parts sociales, dont les époux B C sont toujours détenteurs, dans le capital de la société Atypik Films, dont la liquidation judiciaire est toujours en cours, et des sociétés 3 + et Cinéastre, qui sont in boni, est bien certain et indemnisable, et non simplement hypothétique.
L’ordonnance attaquée sera par conséquent de ce chef confirmée, sauf à la rectifier en précisant que la fin de non-recevoir rejetée est tirée du défaut d’intérêt à agir, et non du défaut de qualité à agir « .
L’exigence de légitimité de l’intérêt est comprise en jurisprudence comme l’autorisation donnée au juge de porter un jugement de valeur sur le recours fait à la justice.
Ainsi l’article 1965 du Code civil dispose que « la loi n’accorde aucune action pour une dette du jeu ou payement d’un pari (sauf en ce qui concerne les jeux autorisés par la loi) ».
En présence des turpitudes réciproques du vendeur d’un fonds de commerce, poursuivi pour proxénétisme, et de l’acquéreur, qui connaissait cette situation, il y a lieu de déclarer d’office irrecevable la demande en garantie de ce dernier (Cour de cassation, chambre commerciale du 27/04/1981, n° 80-11200).
L’action en responsabilité délictuelle pour rupture brutale de relations commerciales établies appartient à toute personne qui invoque avoir subi un préjudice causé par un tel manquement, ce qui requiert, quand elle est un tiers à la relation commerciale rompue, qu’elle ait subi personnellement le dommage qu’elle invoque, sans quoi elle se trouve dépourvue d’intérêt à agir. En l’espèce, la relation a commencé avec un entrepreneur individuel qui a ensuite apporté son fonds de commerce à une SARL, laquelle a poursuivi la relation commerciale avec la société cliente. La rupture par cette dernière étant postérieure à l’apport du fonds de commerce, l’entrepreneur individuel est irrecevable à agir contre la société cliente, la rupture ne lui ayant pas causé de préjudice personnel.
Rappelons que l’article L. 110-4 du Code de commerce dispose que les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
L’article 224 du Code civil dispose quant à lui que » les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exerce « .
La prescription fait l’objet d’une étude spéciale.
Rappelons que la fin de non-recevoir tirée de la prescription extinctive est d’intérêt privé : le juge ne peut la relever d’office (article 2247 du Code civil).
Le délai préfix est un délai, fixé par la loi, qui court sans être susceptible de suspension ni d’interruption (différence avec le délai de prescription).
C’est un délai accordé pour accomplir un acte à l’expiration duquel on est frappé d’une forclusion (c’est-à-dire, le moment où l’on est plus recevable).
Le délai de dix ans dont bénéficie le maître d’ouvrage pour agir contre le constructeur sur le fondement de l’article 1792-4-3 du Code civil est un délai de forclusion qui n’est pas, sauf dispositions contraires, régi par les dispositions concernant la prescription, de sorte qu’il n’est ni interrompu, ni suspendu.
Contrairement à la prescription, l’extinction de l’action à l’expiration d’un délai de forclusion peut être relevée d’office ou ne pas l’être selon le caractère d’ordre public ou d’intérêt privé attribué à la forclusion concernée. La forclusion résultant, par exemple, de l’expiration des délais impartis pour exercer une voie de recours est d’ordre public (article 125 du Code de procédure civile).
Le délai de 2 mois (à compter de la parution au BODACC de l’ouverture d’une procédure collective à l’encontre de son débiteur) dont dispose le créancier pour effectuer sa déclaration de créance est un délai de forclusion, d’ordre public, que le juge a l’obligation de relever d’office.
L’autorité de la chose jugée : c’est l’impossibilité de revenir judiciairement sur un fait ayant fait l’objet d’une décision de justice. Un même litige avec les mêmes parties, un objet identique et un fondement similaire ne peut pas de nouveau être soumis au juge.
L’autorité de la chose jugée suppose donc, que l’on soit en présence d’un jugement contentieux définitif, par opposition à provisoire (à savoir un jugement avant dire droit ou référé, par exemple).
Une décision de justice passée en force de chose jugée est une décision qui peut être exécutée. La décision acquiert force de chose jugée lorsque les délais de recours contre cette décision sont écoulés, ou lorsque tous les recours ont été épuisés. La force de chose jugée permet de demander l’exécution forcée de la décision, et empêche qu’on soit à nouveau jugé pour les mêmes faits.
Une ordonnance d’injonction de payer a l’autorité de la chose jugée à défaut d’opposition dans le délai ou si celle-ci a été déclarée irrecevable.
Le juge peut soulever d’office une fin de non-recevoir résultant de la chose jugée.
L’autorité de la chose jugée fait l’objet d’une étude séparée.
Tandis que l’exception de procédure (article 112 à 121 du Code de procédure civile) est une irrégularité qui concerne le fond ou la forme des actes de procédure qui affecte la validité de la procédure, la fin de non-recevoir (articles 122 à 126 du Code de procédure civile) est une irrégularité qui touche au droit d’agir : elle affecte l’action elle-même, la justification même de l’acte.
Les fins de non-recevoir sont soumises au même régime que les défenses au fond :
Contrairement au juge de mise en état, de la procédure civile, le juge chargé d’instruire l’affaire ne dispose pas du pouvoir de trancher par ordonnance une demande d’irrecevabilité d’une action au motif d’une fin de non-recevoir (article 789 6° du Code de procédure civile concernant le juge de mise en état).
En application de l’article 125 du Code de procédure civile, le juge est investi du pouvoir de relever d’office les fins de non-recevoir, dès lors qu’elles ont un caractère d’ordre public.
Par exemple : le juge doit relever d’office la fin de non-recevoir d’ordre public tirée de l’expiration du délai de 6 mois après la parution au BODACC de l’ouverture d’une procédure collective, pour agir en relevé de forclusion.
De plus, le deuxième alinéa de l’article 125 du Code de procédure civile donne le pouvoir au juge de relever d’office la fin de non-recevoir, en cas de :
Il en résulte que juge ne peut relever d’office la fin de non-recevoir en cas de prescription et de délai préfix (sauf si d’ordre public).
Chaque fois que le juge soulève d’office une fin de non-recevoir, il doit au préalable provoquer l’explication des parties.
L’irrecevabilité déclarée ne permet plus au juge d’examiner le fond.
L’article 126 du Code de procédure collective prévoit que l’irrégularité tirée d’une fin de non-recevoir peut être couverte si elle a disparu au moment où le juge statue.
Est recevable l’action directe de sous-traitants ayant assigné en paiement du prix de leurs travaux le maître de l’ouvrage sans avoir au préalable mis en demeure l’entrepreneur principal, dès lors que ce dernier avait été mis en demeure et que le maître de l’ouvrage avait reçu copie de la mise en demeure plus d’un mois avant que les juges ne statuent.
Il en est de même lorsque, avant toute forclusion, la personne ayant qualité pour agir devient partie à l’instance.
Un changement de qualité équivalant à un changement de partie (administrateur judiciaire désigné en qualité de commissaire à l’exécution du plan), l’action, engagée dans le délai de prescription par une personne n’ayant pas qualité pour agir (action en paiement des dettes sociales engagée par l’administrateur), ne peut être régularisée en application de l’article 126 que par l’intervention de la personne ayant cette qualité (commissaire à l’exécution du plan) avant l’expiration du délai de prescription; en aucun cas, la régularisation n’est possible après l’expiration du délai de prescription, et ce même si la personne ayant qualité pour agir acquiert cette qualité après la forclusion.
DALLOZ : Documentation/Encyclopédie/Répertoire de procédure civile : Défense, exceptions fin de non-recevoir.
LEXIS 360 Entreprise :
Les tribunaux de commerce n’ont plus d’accès au contenu de la documentation concernant la procédure civile.
Site A. Bamdé et J. Bourdoiseau : les fins de non-recevoir