Jean-Claude LEMALLE : une expérience de juge-consulaire

Jean-Claude LEMALLE

Obligation conjointe, solidaire, in solidum

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1. – ⚖️ Introduction

Ordinairement, une obligation met seulement deux personnes en relation : un créancier et un débiteur.

Cependant, il est fréquent qu’une même obligation concerne plusieurs sujets, soit plusieurs créanciers pour un même débiteur, soit un créancier unique pour plusieurs codébiteurs.

On parle alors d’obligations à pluralité de sujets.

Le principe est simple : lorsqu’une obligation naît d’une source unique, elle se divise de plein droit entre les créanciers ou entre les débiteurs.

Chaque créancier n’a droit qu’à sa part, et chaque débiteur n’est tenu que de la sienne. On qualifie alors l’obligation de conjointe ou de divisée.

Par dérogation à ce principe du partage, il peut arriver que l’un des créanciers puisse réclamer la totalité de la prestation, ou que l’un des débiteurs soit tenu pour le tout.

C’est l’hypothèse des obligations solidaires ou des obligations in solidum, qui permettent au créancier d’obtenir le paiement intégral auprès du débiteur de son choix.

Nous allons donc examiner les conséquences de ces trois types d’obligations :

  • conjointes,
  • solidaires,
  • in solidum.

2. – ⚖️ L’obligation conjointe

L’obligation conjointe correspond à la situation dans laquelle plusieurs créanciers ou plusieurs débiteurs sont parties à une même obligation, sans solidarité entre eux.

L’article 1309, alinéas 1 et 2 du Code civil, fixe le principe

« L’obligation qui lie plusieurs créanciers ou débiteurs se divise de plein droit entre eux. »

« La division a lieu également entre leurs successeurs, l’obligation fût-elle solidaire. »

« Si elle n’est pas réglée autrement par la loi ou par le contrat, la division a lieu par parts égales. »

Chacun des créanciers n’a droit qu’à sa part de la créance commune, chacun des débiteurs n’est tenu que de sa part de la dette commune.

👉 Le Code civil ne parle jamais d’« obligation conjointe » : c’est la doctrine qui utilise ce terme pour désigner l’obligation divisible, c’est-à-dire répartie entre les sujets en présence.

2.1 – 🔷 En quoi cela diffère-t-il d’une obligation solidaire ?

Dans l’obligation conjointe → chaque débiteur ne paie que sa part.

Dans l’obligation solidaire → chaque débiteur peut être poursuivi pour le tout.

L’obligation conjointe est donc le droit commun de la pluralité de débiteurs ou de créanciers.

La solidarité constitue une exception, qui doit être prévue par la loi ou par le contrat (sauf en matière commerciale où elle est présumée).

2.2 – 🔷 Principe : division par parts égales

À défaut de règle spéciale, la dette (ou la créance) se divise en parts égales entre les codébiteurs ou les cocontractants.

2.2.1 – 🔸 Exemple 1 : indivision simple

Monsieur X et Madame Y possèdent un appartement en indivision (50 % chacun).

Le syndicat des copropriétaires réclame des charges impayées.

🔹 Sans clause de solidarité, Monsieur X ne peut être poursuivi que pour sa quote-part de 50 %.

La solidarité n’est pas attachée à la qualité d’indivisaire.

2.2.2 – 🔸 Exception : le régime matrimonial

Si X et Y sont mariés sous un régime communautaire, l’article 220 du Code civil impose une solidarité légale pour les dettes ménagères.

🔹 Dans ce cas, Monsieur X pourrait être poursuivi pour la totalité, par exception au principe de division.

2.2.3 – 🔸 Exemple 2 : concubins co-emprunteurs

Deux concubins signent une reconnaissance de dette sans clause de solidarité.

🔹 Chacun n’est tenu que pour sa moitié, même si l’un des deux a profité seul du prêt.

Le créancier ne peut pas exiger le tout d’un seul.

2.2.4 – 🔸 Application aux dettes légales

En l’absence de disposition contraire, certaines dettes légales se divisent également, par exemple :

  • la condamnation aux dépens entre plusieurs parties perdantes,
  • un remboursement dû par plusieurs héritiers en proportion de leurs droits.

2.3 – 🔷 Dérogations au principe de division

La division par parts égales n’est qu’un principe supplétif.

Elle peut être modifiée :

  • par la loi (par exemple l’article 220 du Code civil, époux solidaires pour les dettes ménagères),
  • par le contrat, qui peut prévoir une répartition différente.

Exemples :

  • Dans une acquisition immobilière, le compromis précise souvent la quote-part de chacun (70 % / 30 %).
    → La dette d’achat se divise en proportion de ces pourcentages.
  • Dans un contrat à plusieurs débiteurs, les parties peuvent établir une répartition inégale des contributions (par exemple 60 % / 40 %).

➡ Dans tous les cas, l’obligation reste conjointe tant qu’aucune solidarité n’est prévue.

3. – ⚖️ L’obligation solidaire

Lorsque plusieurs sujets sont parties à une même obligation, celle-ci peut être solidaire, c’est-à-dire que chacun peut être tenu pour le tout.

Le Code civil distingue :

  • la solidarité active (pluralité de créanciers),
  • la solidarité passive (pluralité de débiteurs).
L’article 1310 du Code civil pose le principe

« La solidarité est légale ou conventionnelle ; elle ne se présume pas. »

Ce principe vaut aussi bien pour la solidarité active que pour la solidarité passive.

3.1 – 🔷 Solidarité active : pluralité de créanciers

Il y a solidarité active lorsque plusieurs créanciers sont titulaires ensemble d’une même créance contre un débiteur unique.

Un exemple classique est celui du compte joint bancaire : chaque cotitulaire peut disposer de la totalité du solde, en vertu de la convention de compte.

En droit commun, une obligation liant plusieurs créanciers se divise entre eux (obligation conjointe). La solidarité active est donc l’exception, ce qui explique que l’article 1310 exige un texte ou une stipulation contractuelle.

3.1.1 – 🔸 Effets principaux de la solidarité active (article 1311 du Code civil)

👉 Chaque créancier peut réclamer le tout :
Chacun est en droit d’exiger du débiteur le paiement de l’intégralité de la créance, sans que celui-ci puisse imposer une division proportionnelle entre les créanciers, même si le droit de chacun ne porte, en définitive, que sur une fraction.

👉 Le paiement à un seul libère le débiteur :
Le paiement fait à l’un des créanciers solidaires libère le débiteur à l’égard de tous.
Les autres créanciers ne peuvent plus lui réclamer le paiement de leur part.

L’article 1311, alinéa 2, précise que le débiteur peut payer l’un ou l’autre des créanciers tant qu’il n’est pas poursuivi par l’un d’eux.

3.1.2 – 🔸 Effets secondaires et rapports entre créanciers

👉 Prescription :
L’article 1312 du Code civil dispose que tout acte interrompant ou suspendant la prescription au profit de l’un des créanciers solidaires profite aux autres.

👉 Remise de dette :
Aux termes de l’article 1350-1, alinéa 2, la remise de dette consentie par un seul créancier solidaire ne libère le débiteur qu’à hauteur de la part de ce créancier.

👉 Recours entre créanciers :
Si, vis-à-vis du débiteur, la créance ne se divise pas, elle se divise entre créanciers.
Le créancier qui a reçu la totalité de la somme doit, en l’absence de stipulation contraire, restituer aux autres leur part, déterminée selon l’article 1309, alinéa 2 (division en principe par parts égales).

3.2 – 🔷 Solidarité passive : pluralité de codébiteurs

Il y a solidarité passive lorsqu’un même créancier dispose d’une créance unique à l’encontre de plusieurs débiteurs, chacun étant tenu pour le tout.

Conséquence directe : le créancier peut exiger l’intégralité de la dette de l’un quelconque des codébiteurs, sans être tenu de diviser ses poursuites.

Comme la solidarité active, la solidarité passive peut avoir deux sources :

  • la loi,
  • le contrat (elle doit alors être expressément stipulée).

Exemples de solidarités d’origine légale :

  • article 220 du Code civil : dettes ménagères entre époux ;
  • article 1242, alinéa 4 du Code civil : responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs ;
  • article L. 511-44 du Code de commerce : signataires d’une lettre de change ;
  • article L. 131-51 du Code monétaire et financier : signataires d’un chèque ;
  • article L. 221-1 du Code de commerce : associés d’une société en nom collectif.

3.2.1 – 🔸 Les effets de la solidarité passive (articles 1313 à 1319 du Code civil)

La solidarité passive permet au créancier de réclamer à chacun des codébiteurs le paiement de l’intégralité de la dette, sans avoir à diviser ses poursuites ni à mettre tous les débiteurs en cause.

3.2.1.1 – 🔺 Rapports entre le créancier et les débiteurs

L’article 1313, alinéa 1, dispose que chaque débiteur solidaire est tenu de la totalité de la dette.

L’alinéa 2 ajoute que :

  • le créancier peut demander le paiement au débiteur solidaire de son choix ;
  • il n’a pas l’obligation d’assigner les autres ni même de les avertir ;
  • les poursuites engagées contre un débiteur n’empêchent pas d’en engager de nouvelles contre les autres, pour le solde restant dû.

Le paiement fait par un seul débiteur libère tous les autres vis-à-vis du créancier, à hauteur de ce qui a été payé.

3.2.1.1.1 – 🔻 Le régime des exceptions (article 1315 du Code civil)

La question la plus délicate est celle des exceptions que le débiteur actionné peut opposer au créancier.

On distingue traditionnellement trois catégories :

3.2.1.1.2 – Les exceptions inhérentes à la dette

Elles touchent à la dette elle-même (existence, étendue, modalités) : nullité de l’obligation, prescription, paiement, compensation, confusion, résolution, caducité, novation, et ainsi de suite.

📌 Elles peuvent être invoquées par tout débiteur solidaire, car elles affectent la dette dans son ensemble.

Attention : toutes les nullités ne sont pas nécessairement inhérentes à la dette. Lorsqu’une nullité résulte d’un vice du consentement propre à un codébiteur, elle se rapproche des exceptions purement personnelles.

3.2.1.1.3 – Les exceptions purement personnelles

Elles tiennent au lien individuel entre un débiteur et le créancier.
L’article 1315 précise qu’un débiteur ne peut opposer les exceptions personnelles à un autre débiteur.

Exemples :

  • vice du consentement (dol, erreur, violence) affectant seulement un codébiteur ;
  • extinction de la créance à l’égard d’un débiteur pour défaut de déclaration dans une procédure collective ;
  • suspension des poursuites à l’égard d’un débiteur placé en sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire.

Dans ces hypothèses :

  • le débiteur concerné peut se libérer totalement en opposant l’exception,
  • les autres codébiteurs restent tenus pour le tout.
3.2.1.1.4 – Les exceptions simplement personnelles

Elles ne concernent qu’un débiteur, mais éteignent la dette seulement à hauteur de sa part.
L’article 1315 vise notamment :

  • la compensation,
  • la remise de dette.

📌 Effet :

  • le débiteur bénéficiant de l’exception est totalement libéré,
  • les autres ne restent tenus que pour le reste.

Exemple simple — remise de dette

Dette solidaire : 90 €

Trois codébiteurs A, B et C, tenus à parts égales (30 € chacun).

Le créancier accorde une remise totale à A :

  • A est libéré complètement,
  • la dette est éteinte à hauteur de 30 €,
  • B et C ne sont plus solidaires que pour 60 €.

Exemple plus complexe — compensation

Même dette de 90 €, avec A, B et C tenus à parts égales.

A dispose d’une créance de 60 € contre le créancier.
La compensation éteint la dette à hauteur de 60 € (montant de la créance réciproque) :

  • les débiteurs solidaires ne doivent plus que 30 € au créancier,
  • A a « payé » 60 € par compensation, soit plus que sa part théorique de 30 €,
  • A dispose donc d’un recours contre B et C (15 € chacun) sur le fondement de l’article 1317, alinéa 2.
3.2.1.1.5 – 🔻 Effets secondaires de la solidarité passive

👉 Intérêts moratoires :
L’article 1314 du Code civil prévoit que la demande d’intérêts formée contre un seul débiteur solidaire fait courir les intérêts à l’égard de tous.
En revanche, seul le débiteur mis en demeure peut être condamné à des dommages-intérêts pour retard fautif.

👉 Prescription :
Tout acte interruptif de prescription accompli par le créancier contre l’un des débiteurs solidaires produit effet à l’égard de tous.

3.2.1.2 – 🔺 Rapports entre codébiteurs

Une fois le créancier désintéressé, la solidarité cesse de jouer.
On revient à une logique de répartition interne de la charge.

L’article 1317 du Code civil prévoit que :

  • le débiteur qui a payé plus que sa part dispose d’un recours contre les autres à proportion de leur propre part ;
  • à défaut de stipulation contraire, la division se fait par parts égales ;
  • si l’un des codébiteurs est insolvable, sa part se répartit par contribution entre les codébiteurs solvables, y compris celui qui a payé et celui qui a bénéficié d’une remise de solidarité.

3.2.2 – 🔸 Exemple chiffré : cautions solidaires

Trois cautions solidaires garantissent une dette de 120 000 € :

  • A s’est engagé à hauteur de 100 000 € ;
  • B à hauteur de 50 000 € ;
  • C à hauteur de 30 000 €.

Le total des engagements est de 180 000 €.

La part contributive de chacun (charge finale théorique) se calcule au prorata :

  • A : 100 000 / 180 000 × 120 000 = 66 666,67 € ;
  • B : 50 000 / 180 000 × 120 000 = 33 333,33 € ;
  • C : 30 000 / 180 000 × 120 000 = 20 000 €.

Si A a payé seul les 120 000 € au créancier, il dispose d’un recours contre :

  • B pour 33 333,33 €,
  • C pour 20 000 €.

3.3 – ⚠️ Exception importante : les obligations commerciales

En matière commerciale, la Cour de cassation admet que la solidarité passive est présumée entre codébiteurs, lorsque l’obligation est commerciale pour tous les débiteurs.

Dans ce domaine, le mécanisme est inversé :

  • à défaut de clause contraire, les débiteurs sont présumés solidaires,
  • l’exclusion de la solidarité doit donc être expressément stipulée.

🔎 À noter : en matière de cautionnement souscrit par une personne physique, l’absence ou la non-conformité de la mention manuscrite relative à la solidarité peut empêcher le créancier de se prévaloir de la solidarité annoncée dans l’acte.
Il s’agit d’un régime spécial qui sera examiné dans une fiche distincte consacrée au cautionnement.

4. – ⚖️ L’obligation in solidum

L’obligation in solidum est une figure jurisprudentielle par laquelle plusieurs personnes sont condamnées chacune pour le tout, comme dans la solidarité, mais sans que les effets juridiques complets de la solidarité ne s’appliquent.

Autrement dit :

👉 « In solidum » = obligation au tout, mais sans solidarité.

C’est une création de la jurisprudence, totalement absente du Code civil.

Son domaine naturel est la responsabilité civile, spécialement lorsqu’un même dommage résulte de plusieurs fautes ayant concouru ensemble à sa réalisation.

Ainsi, la Cour de cassation (chambre commerciale, 19 avril 2005, n° 02-16676) juge que :

« Chacune des fautes commises avait concouru à la réalisation de l’entier dommage, de sorte que la responsabilité de leurs auteurs devait être retenue in solidum envers la victime. »

La jurisprudence étend également « l’in solidum » à certains cas où la victime exerce une action directe contre un responsable et son assureur, afin de faciliter son indemnisation.

4.1 – 🔷 Les effets de l’obligation in solidum

Les effets principaux ressemblent à la solidarité, mais uniquement sur le terrain de l’obligation à la dette :

  • la victime peut demander l’intégralité du dommage à n’importe quel codébiteur in solidum ;
  • le créancier n’a pas à diviser ses poursuites.

⚠️ Attention : contrairement à la solidarité civile, l’obligation in solidum ne repose sur aucun accord entre les débiteurs, et elle n’emporte pas les effets secondaires de la solidarité (par exemple, l’interruption de prescription ne profite pas aux autres).

Très important :

👉 Le partage de responsabilité entre les co-auteurs n’a aucun effet au stade de l’obligation à la dette.
Même si l’un n’est responsable qu’à 30 % et l’autre à 70 %, chacun doit garantir l’intégralité du dommage envers la victime.

Le partage ne joue qu’entre les co-auteurs, jamais à l’égard de la victime.

4.2 – 🔷 Les recours entre codébiteurs in solidum

Une fois la victime indemnisée, le codébiteur qui a payé plus que sa part dispose d’un recours subrogatoire contre les autres.

Mais, contrairement à la solidarité :

  • il n’existe aucune solidarité interne entre eux ;
  • les parts contributives sont fixées en fonction de la gravité des fautes, ou de tout autre critère retenu par le juge.

Exemples :

  • Si l’un des responsables est jugé fautif à hauteur de 70 % et l’autre à 30 %,
    → celui qui a tout payé pourra récupérer 70 % ou 30 % selon son propre niveau de faute.
  • Si le partage n’est pas fixé, le juge procède à un partage en équité.

4.3 – 🔷 Illustration jurisprudentielle : condamnation in solidum entre responsables et assureurs

Arrêt de la Cour d’appel de Riom, 4 mai 2022, n° 20/01157

La cour condamne in solidum :

  • un maître d’œuvre (Monsieur Jacques E.),
  • son assureur (MAF),
  • l’entreprise Chaumette-Dupleix Bat,
  • son assureur (SMABTP),

à payer 82 916,29 euros à la victime, au titre de la responsabilité contractuelle.

Puis la cour précise :

  • Dans leurs rapports internes, la charge définitive du dommage est répartie :
    • 60 % pour Monsieur Jacques E. (et son assureur),
    • 40 % pour la société Chaumette-Dupleix Bat (et son assureur).

Ainsi :

  • la victime peut réclamer 100 % à n’importe lequel des quatre débiteurs ;
  • mais le débiteur qui paye pourra exercer un recours contre les autres, en respectant le partage 60 % / 40 %.

4.4 – 🔷 Conclusion

L’obligation in solidum :

  • ressemble à la solidarité, car le créancier peut demander l’intégralité à l’un quelconque des débiteurs ;
  • s’en distingue profondément, car elle ne produit pas les effets annexes de la solidarité (interruption commune de prescription, mise en demeure valable pour tous, et ainsi de suite) ;
  • est une création prétorienne essentiellement utilisée en responsabilité civile et en assurance ;
  • organise une répartition a posteriori entre les responsables selon leur degré de faute, et non par parts égales.

5. – ⚖️ Tableau comparatif – Obligation conjointe / solidaire / in solidum

AspectObligation conjointeObligation solidaireObligation in solidum
DéfinitionChaque débiteur ne doit qu’une part de la dette. Le créancier ne peut réclamer à chacun que sa fraction.Chaque débiteur est tenu pour le tout envers le créancier, qui peut demander l’intégralité à l’un quelconque d’entre eux.Plusieurs personnes sont condamnées chacune à réparer l’intégralité d’un même dommage, sans que le régime technique de la solidarité s’applique entre elles.
Source du régimePrincipe de droit commun posé par l’article 1309 du Code civil (division de plein droit, sauf texte ou contrat contraire).Articles 1310 à 1319 du Code civil. La solidarité est légale ou conventionnelle et ne se présume pas, sauf en matière commerciale pour la solidarité passive.Création purement jurisprudentielle, principalement en matière de responsabilité civile (co-auteurs de dommages, responsable et assureur, intervenants multiples dans une même opération).
Droit du créancier (obligation à la dette)Le créancier doit diviser ses poursuites et ne peut réclamer à chaque débiteur que sa part de la dette.Le créancier peut demander à un seul débiteur le paiement de l’intégralité de la dette, sans devoir mettre en cause les autres.La victime peut demander la réparation intégrale du dommage à l’un quelconque des responsables condamnés in solidum, sans division de ses poursuites.
Effets secondaires (prescription, mise en demeure, intérêts)Aucun effet spécifique : chaque obligation reste indépendante. Une poursuite, une mise en demeure ou un acte interruptif de prescription à l’égard de l’un n’a aucun effet sur les autres.Effets complets de la solidarité : mise en demeure adressée à un débiteur vaut pour tous ; interruption de prescription pour un vaut pour tous ; les intérêts courent à l’égard de tous à compter de la demande formée contre l’un.Aucun effet secondaire commun : l’obligation est seulement « au tout ». Les actes (mise en demeure, prescription, intérêts) ne produisent effet que pour le débiteur visé, sans extension automatique aux autres.
Opposabilité des exceptionsChaque débiteur ne peut opposer que ses exceptions personnelles et celles qui affectent sa propre part. Il ne bénéficie d’aucune exception soulevée par les autres débiteurs.Régime de l’article 1315 du Code civil :
• Exceptions inhérentes à la dette (nullité, extinction, prescription de la dette elle-même) → opposables par tous les débiteurs ;
• Exceptions purement personnelles (vice du consentement, incapacité, procédure collective propre à un débiteur) → opposables seulement par le débiteur concerné ;
• Exceptions simplement personnelles (remise de dette, compensation partielle) → libération totale du débiteur concerné et libération partielle des autres à hauteur de sa part.
Aucun régime général organisé par les textes. En pratique, chaque débiteur ne peut opposer au créancier que ses propres moyens de défense. Les exceptions soulevées par les autres n’ont pas d’effet automatique pour lui.
Recours internes (contribution entre débiteurs)Chaque débiteur ne paie, en principe, que sa part. Il n’y a pas de recours interne spécifique, sauf stipulation particulière ou cas de paiement supérieur à sa part.Le débiteur qui a payé plus que sa part dispose d’un recours contre les autres codébiteurs, à proportion de leurs parts contributives (article 1317 du Code civil). La répartition peut être égale ou inégale selon le contrat. En cas d’insolvabilité de l’un, sa part se répartit entre les autres débiteurs solvables.Le responsable qui a payé tout ou partie de la dette exerce un recours contre les autres, en principe selon la gravité de leurs fautes respectives ou selon leur part de responsabilité. Entre eux, il n’existe pas de solidarité mais un partage de la charge finale.
Exemple typiqueDeux concubins coemprunteurs qui ont signé un prêt sans clause de solidarité : chacun ne peut être poursuivi que pour la moitié de la dette.Deux cautions solidaires pour un même prêt bancaire ou deux associés d’une société en nom collectif tenus solidairement à l’égard des créanciers sociaux.Constructeur, sous-traitant et assureur condamnés in solidum pour la totalité d’un dommage de construction, chacun pouvant être poursuivi pour l’intégralité de la réparation par la victime.
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