La cessation des paiements est la cause exclusive de l’ouverture d’un redressement ou d’une liquidation judiciaires. L’inexécution d’une conciliation ou d’un plan de redressement ne constituent pas, à eux seuls, une cause d’ouverture de procédure collective.
Rappelons que :
Notons toutefois une exception, qui découle de l’article L. 622-10 du Code de commerce qui dispose que la sauvegarde peut être convertie en redressement judiciaire si l’adoption d’un plan de sauvegarde est manifestement impossible et si la clôture de la procédure conduirait, de manière certaine et à bref délai, à la cessation des paiements. Dans cette hypothèse, il y a ouverture d’un redressement judiciaire, alors que l’état de cessation des paiements n’est pas constaté.
La définition de la cessation des paiements, au niveau juridique, est donnée par l’article L. 631-1 du Code de commerce qui précise qu’un débiteur qui est : « dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements ».
Par une ordonnance du 18/12/2008, le législateur a ajouté une deuxième phase au premier alinéa de ce même article, qui indique que :
« Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n’est pas en cessation des paiements ».
Si la cessation des paiements n’est pas une notion exclusivement comptable, il ne faut pas nier que la comptabilité de l’entreprise, lorsqu’elle est tenue régulièrement, constitue l’élément le plus significatif pour appréhender la situation financière de l’entreprise.
C’est en prenant en compte dans la comptabilité, de l’absence de classement des postes d’actif et de passif par ordre de liquidité et d’exigibilité croissantes, que le législateur a jugé utile, afin de permettre au tribunal de mieux appréhender cette notion de cessation des paiements, d’exiger du débiteur qui effectue sa déclaration de cessation des paiements (article R. 631-1 du Code de commerce), de joindre au dossier, en sus des comptes annuels du dernier exercice :
Si la liasse fiscale est correctement remplie par le débiteur il convient de noter que :
Il s’agit de l’ensemble des dettes échues (défaut de paiement à l’échéance convenue contractuellement), sans qu’il soit nécessaire de rechercher si ce passif exigible a été effectivement exigé (Cour de cassation, chambre commerciale du 15/02/2011, n° 10-13625).
Bien évidemment, si la dette a été réglée à la date à laquelle le tribunal statue, celle-ci sera exclue du passif exigible.
Le passif exigible peut comprendre le non-paiement, d’une, ou plusieurs échéances du plan de sauvegarde ou de redressement (Cour d’appel de PARIS du 08/11/2007, n° 06/22081).
La dette doit être certaine , liquide et exigible pour être comprise dans le passif exigible.
Liquide : le montant en argent doit être déterminé ou déterminable.
Exigible : le créancier peut en réclamer le paiement qui est arrivé à échéance.
Certaine : la créance ne fait l’objet d’aucune contestation. Pour l’appréciation du caractère certain de la créance, il n’est pas nécessaire qu’elle soit confirmée par un titre exécutoire, dès lors qu’elle n’est pas contestée.
Si la dette est contestée, elle ne doit pas figurer dans le passif exigible (Cour de cassation, chambre commerciale du 05/05/2015, n° 14-11388).
Si la contestation est formulée au jour de l’audience au cours de laquelle le tribunal doit se prononcer sur l’état de cessation des paiements du débiteur, il appartient au tribunal de juger si la contestation est sérieuse, et de motiver sa décision d’acceptation ou de refus de la contestation, dans son jugement.
Si la créance fait l’objet d’une instance en cours, elle est donc contestée et ne constitue pas un passif exigible.
A noter que sont également des créances contestées :
Une avance en compte courant qui est bloquée, ou dont le remboursement n’est pas demandé, ne constitue pas un passif exigible (Cour de cassation, chambre commerciale du 10/01/2012, n° 11-10018).
Une créance n’est pas liquide lorsqu’elle correspond à un redressement fiscal en cours, même à propos d’impositions exigibles antérieurement.
En revanche, lorsqu’une créance fiscale a donné lieu à l’établissement d’un avis de mise en recouvrement, le comptable public dispose d’un titre exécutoire. Si le débiteur ne l’a pas contestée en saisissant le juge de l’impôt compétent à la suite du rejet de sa réclamation, cette créance fiscale n’est pas litigieuse et doit être incluse dans le passif exigible du débiteur (Cour de cassation, chambre commerciale du 11/01/2018, n° 16-23019).
Si la dette fiscale, fait l’objet d’un recours devant le juge administratif, elle n’est pas certaine et ne peut être prise en compte dans le passif exigible, peu important qu’aucune demande de sursis à paiement n’ait été formulée. En cas d’appel, la créance fiscale ne devient certaine qu’au jour du prononcé de l’arrêt de la Cour administrative (Cour de cassation, chambre commerciale du 09/12/2020, n° 19-14437).
En résumé, le tribunal ne pourra prendre en compte une contestation de la créance fiscale, faite devant lui et dont il n’est pas justifié qu’elle a, au préalable, été formulée auprès de l’administration fiscale, dans les conditions imposées par le livre des procédures fiscales.
L’URSSAF et la MSA disposent de prérogatives spéciales pour mettre en recouvrement forcé leurs créances (cotisations, majorations, pénalités), et ceci par l’établissement de contrainte (CSS, R. 133-3), qui leur permet de se délivrer directement un titre exécutoire, sans débat contradictoire préalable.
Concrètement, après expiration d’un délai d’un mois à compter de la réception d’une mise en demeure de payer (notamment dans le cadre d’un redressement), l’URSSAF peut établir une contrainte et la notifier par LRAR au cotisant, ou la lui faire signifier par voie d’Huissier de justice.
A défaut d’opposition à la contrainte, dans un délai de 15 jours, la dette devient alors définitive et la contrainte emporte les effets d’un jugement (Code de la sécurité sociale, article L. 244-9 pour l’URSSAF – Code rural et de la pêche maritime, article L725-3 pour les caisses de MSA), et ne peut donc plus faire l’objet de contestation.
Concernant le recouvrement des dettes envers les organismes sociaux autres que l’URSSAF et la MSA (caisses de retraite, les caisses de congés payés, l’ASSEDIC…), il convient de faire application du droit commun. Il en résulte qu’une créance régulièrement contestée, et en l’absence d’un titre exécutoire, ne peut être incluse dans le passif exigible.
Le juge conserve toutefois son pouvoir souverain d’apprécier le caractère sérieux de la contestation soulevée par le débiteur, en motivant son rejet de la contestation.
Dès lors que les dettes sont certaines liquides et exigibles, leur nature et leur nombre sont indifférents.
Une seule dette peut suffire à caractériser l’état de cessation des paiements (Cour de cassation du 08/03/1994, n° 90-12941).
En cas de moratoire, le paiement de la créance étant reporté, celle-ci ne sera donc plus décomptée dans le passif exigible.
Il appartiendra au débiteur de rapporter la preuve de ce véritable moratoire. La preuve ne pourra être admise que si le moratoire est exprès.
Le simple fait pour un créancier d’être inactif dans le recouvrement de sa créance est insuffisant.
Le fait que le Trésor public ou les organismes sociaux n’inscrivent pas leur privilège ne peut davantage être considéré comme un accord sur un moratoire.
L’actif disponible représente l’actif réalisable immédiatement, auquel on peut assimiler celui qui est réalisable à très court terme, à savoir quelques jours (effets de commerce escomptables ou LCR, valeurs cotées en bourse…). La difficulté consiste alors à distinguer cet actif de l’actif réalisable à court terme qui, lui, est exclu de l’actif disponible.
Il en résulte que, l’actif disponible est constitué, principalement, des disponibilités (caisse, banque…) et probablement des valeurs mobilières de placement et non de participation, auquel il est possible d’y ajouter la partie l’actif circulant réalisable à très court terme.
L’actif immobilisé comprend :
L’actif immobilisé est à exclure de l’actif disponible, car il ne peut être réalisé à court terme, au regard du temps nécessaire pour formaliser définitivement une cession (Cour de cassation, chambre commerciale du 27/02/2007, n° 06-10170 – En l’espèce, le débiteur était pourtant sur le point de recevoir paiement du prix de vente dans le cadre d’une opération d’expropriation en cours).
L’actif immobilisé est exclu de la notion d’actif disponible, même s’il représente une valeur nettement supérieure au passif exigible.
Ainsi un fonds de commerce, même s’il est mis à la vente avec des offres d’achat, ne constitue pas un actif disponible (Cour de cassation, chambre commerciale du 15/02/2011, n° 10-13625).
Par contre, une immobilisation (fonds de commerce, par exemple) constitue un élément de l’actif disponible, si elle a été vendue et le prix payé, même si celui-ci est entre les mains d’un séquestre (Cour de cassation, chambre commerciale du 05/12/2018, n° 17-20065), sous réserve d’éventuelles oppositions.
Les titres de participation des sociétés mères dans les filiales ne rentrent pas dans l’actif disponible, même s’ils sont immédiatement réalisables (Cour de cassation, chambre commerciale du 20/06/1995, n° 93-18342).
Cette absence de disponibilité devrait s’appliquer à l’ensemble des titres de participation.
L’actif circulant se compose essentiellement :
En principe le stock ne peut constituer un actif disponible (Cour de cassation, chambre commerciale du 16/12/2008, n° 07-18044).
Certaines juridictions du fond ont cependant retenu des solutions plus nuancées en ce qui concerne les stocks. Par exemple la Cour d’appel de Douai a considéré que l’actif disponible peut viser les marchandises permettant un apport rapide de trésorerie mais ne s’étend pas au stock de produits intermédiaires ou finis (Cour d’appel de DOUAI du 14/11/1991).
Clients
Une partie du compte « clients » peut être prise en considération dans l’actif disponible, à condition que les créances puissent être facilement et rapidement recouvrées ou du moins mobilisés, en particulier si le débiteur dispose d’un contrat d’affacturage.
Créance Trésor public (remboursement TVA)
Il paraît difficile d’admettre une telle créance, au regard d’une part des délais pour obtenir un tel remboursement et d’autre part de son incertitude au regard d’une contestation possible de l’Administration fiscale.
Le débiteur dispose toutefois de la possibilité de justifier que ce remboursement est imminent (courrier de l’Administration fiscale).
Associé – capital appelé et non versé
Le capital social non libéré ne peut être assimilé à un actif disponible ou à une réserve de crédit au sens de l’article L. 631-1 du Code de commerce, sa liquidité étant trop incertaine (Cour de cassation, chambre commerciale du 23/04/2013, n° 12-18453).
S’il s’agit de titres de placement négociables à vue, ils peuvent être compris dans l’actif disponible.
S’agissant des liquidités en caisse et en banque, ils constituent par principe un actif disponible.
La possession d’un chèque de banque constitue un actif disponible pendant 1 an et 8 jours. Concernant un chèque certifié il constitue un actif disponible, pendant une période de 8 jours.
La possession d’un chèque ordinaire ne constitue pas un actif disponible, tant qu’il n’est pas encaissé, au motif que la provision est incertaine.
Les effets escomptables font partie de l’actif disponible dans la mesure où le débiteur dispose d’une autorisation d’escompte et que le montant maximum autorisé n’a pas encore été atteint.
Voir ci-dessous les réserves de crédit, qui n’apparaissent pas au bilan et dont il appartient au débiteur d’en produire la justification.
Les comptes de régularisation sont des comptes spécifiques qui permettent d’enregistrer une charge ou un produit non pas au moment de sa facturation, mais au moment de l’utilisation du bien ou du service correspondant (les principaux comptes de régularisation sont les charges à répartir sur plusieurs exercices, les charges constatées d’avance et les produits constatés d’avance).
Ces comptes de régularisation permettent de respecter le principe primordial de l’indépendance des exercices comptables.
En aucun cas ces comptes constituent un actif disponible.
L’ordonnance n° 2008-1345 du 18/12/2008 qui réforme la loi de sauvegarde des entreprises consacre la jurisprudence sur la réserve de crédit. Désormais, le débiteur qui démontre l’existence de réserves de crédit dont il bénéficie, lui permettant de faire face à son passif exigible, n’est pas en cessation des paiements.
La réserve de crédit doit donc consister en une somme d’argent qui viendra accroître, lorsque cela sera nécessaire, les liquidités de l’entreprise.
La réserve de trésorerie peut consister en une :
Pour justifier l’état de cessation des paiements, le tribunal doit donc d’une part déterminer le montant du passif exigible et d’autre part évaluer l’actif disponible. Ce n’est que la comparaison de ces deux montants qui peut justifier un état de cessation des paiements (Cour de cassation, chambre commerciale du 14/03/2018, n° 16-27187).
L’importance du passif exigible, ne saurait à elle seule constituer l’état de cessation des paiements, encore faut-il comparer ce passif à l’actif disponible, et que la comparaison révèle une supériorité du passif exigible par rapport à l’actif disponible (Cour de cassation, chambre commerciale du 05/10/2022, n° 21-12250).
L’état de cessation des paiements ne peut pas découler du seul arrêt des paiements par le débiteur.
En effet, le débiteur qui refuse de payer ses créanciers n’est pas nécessairement en état de cessation des paiements, et ceci même dans l’hypothèse d’une condamnation définitive.
Le créancier devra au préalable faire exécuter son titre exécutoire par l’intermédiaire d’un huissier (saisie-attribution sur compte bancaire, saisie vente de meubles, saisie d’un véhicule…).
Ce n’est qu’en cas de démarches infructueuses que le tribunal pourra, éventuellement, en déduire que le débiteur ne dispose pas d’un actif disponible pour faire face à son passif exigible.
Même dans cette hypothèse, le débiteur pourra toujours démontrer qu’il est en possession d’un actif disponible lui permettant de faire face à la créance pour laquelle il est poursuivi.
Nous reproduisons ci-dessous un arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale du 29/09/2021 (n° 20-10105), qui concerne un report de date de cessation des paiements, et pour lequel il n’avait pas été possible de déterminer l’actif disponible :
» L’arrêt constate que l’URSSAF a déclaré une créance de 20 015,50 euros, correspondant à des cotisations sociales dues au titre des années 2013 et 2014, exigibles à la date du 28 septembre 2015. La société Ficoz et M. [D] s’étant bornés à contester l’absence, à cette date, d’un actif disponible pour faire face à cette dette ancienne, sans donner, sur la consistance de cet actif, la moindre précision, qui aurait permis à la cour d’appel, en réponse aux contestations du liquidateur, d’en vérifier, fût-ce sommairement, l’existence, ils ne peuvent, en l’état du débat devant elle, lui reprocher d’avoir reporté la date de cessation des paiements au 28 septembre 2015 « .
La cessation des paiements n’est pas le simple refus de payer. Le refus de déférer à un commandement de payer délivré en vertu d’un jugement ne suffit pas à caractériser l’état de cessation des paiements, lequel se réfère à une notion de trésorerie.
La cessation des paiements n’est pas l’insolvabilité. L’insolvabilité est l’état du débiteur dont l’ensemble du passif est supérieur à l’ensemble de l’actif, alors que la cessation des paiements est l’état du débiteur qui n’est plus en mesure de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Si statistiquement la presque totalité des entreprises mises en liquidation judiciaire sont insolvables, il n’en demeure pas moins que les deux notions, quoique voisines, ne peuvent être confondues. Il en résulte d’une part qu’une entreprise insolvable n’est pas obligatoirement en état de cessation des paiements et que d’autre part une entreprise solvable peut être en cessation des paiements.
La cessation des paiements n’est pas la poursuite d’une exploitation déficitaire.
La cessation des paiements n’est pas la gêne momentanée;
Conformément au droit commun (ancien article 1315 du Code civil, nouvel article 1353), la charge de la preuve de l’état de cessation des paiements appartient au demandeur à l’action, à savoir en cas :
Dans cette hypothèse la charge de la preuve pèse sur le débiteur.
Pour déterminer la date de cessation des paiement, le tribunal pourra prendre en compte les pièces jointes à la déclaration de cessation des paiements (situation de trésorerie datant de moins de 3 mois, état chiffré des créances et des dettes)., et en particulier l’examen de la liasse fiscale du dernier exercice, si celle-ci figure au dossier
La difficulté réside ici dans la fixation précise de la date de cessation des paiements. Il peut paraître opportun, au regard de la nature du dossier, d’interroger le débiteur sur l’antériorité de ses difficultés et même de lui demander produire éventuellement des pièces complémentaires, afin de déterminer la date précise de l’état de cessation des paiements.
Il appartient alors au créancier de rapporter la preuve de la cessation des paiements de son débiteur. Son assignation doit donc contenir « tout élément de preuve de nature à caractériser la cessation des paiements « (article R. 631-2 alinéa 1).
En présence d’une dette exigible certaine et non contestée, lorsque le créancier allègue (sans aucune preuve, en particulier en l’absence de saisie attribution infructueuse par exemple) que le débiteur ne peut faire face à cette dette avec son actif disponible, il n’appartient pas au débiteur de prouver qu’il dispose d’un actif disponible suffisant pour payer son passif exigible.
Il a été jugé que la cessation des paiements peut résulter de la preuve apporter par le créancier de la mise en œuvre d’une procédure de recouvrement restée infructueuse (Cour de cassation, chambre commerciale du 12/01/2010, n° 08-70147 et Cour de cassation, chambre commerciale du 16/01/2019, n° 17-18450).
L’état de cessation des paiements étant une notion de trésorerie qui échappe largement à la connaissance du créancier, les éléments fournis par ce dernier, notamment le refus de déférer à un commandement de payer délivré en vertu d’un jugement, sont souvent, à eux seuls, insuffisants à caractériser la cessation des paiements, et c’est au juge du fond qu’il appartient d’apprécier la réalité de l’état de cessation des paiements, au besoin en recourant à son pouvoir d’enquête et de désignation d’un juge enquêteur.
Les autres indices de la cessation des paiements pourront résulter :
C’est au juge du fond qu’il revient de rechercher, de façon souveraine, les faits constitutifs de la cessation des paiements, cette mesure d’expertise trouve son fondement légal dans l’article L. 621-1 du Code de commerce, auquel renvoie l’article L. 631-7 et L. 641-1 qui dispose que :
« Le tribunal peut, avant de statuer, commettre un juge pour recueillir tous renseignements sur la situation financière, économique et sociale de l’entreprise. Ce juge peut faire application des dispositions prévues à l’article L. 623-2. Il peut se faire assister de tout expert de son choix ».
Il apparaît donc que dans le doute sur la caractérisation de l’état de cessation des paiements, le tribunal pourra commettre un juge chargé de dresser un rapport sur la situation financière, économique et sociale de l’entreprise.
Concernant la désignation d’un expert par le juge enquêteur, il conviendra de ne pas oublier le problème de la charge des honoraires de cet intervenant.
Les articles R. 621-3 et R. 621-4 précisent que le rapport du juge enquêteur, auquel est annexé le rapport de l’expert éventuellement désigné, est déposé au greffe, et communiqué par le greffier au débiteur et au ministère public. Le greffier informe le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel que leurs représentants peuvent prendre connaissance du rapport au greffe et les avise en même temps de la date de l’audience.
Le tribunal statue sur l’ouverture de la procédure au vu du rapport du juge enquêteur, en présence de l’ensemble des parties, convoquées au cours de la première audience.
Le respect du contradictoire ne s’impose pas pour l’établissement du rapport.
Rappelons également que l’article L. 623-2 du Code de commerce, précise que le juge-commissaire « peut, nonobstant toute disposition législative ou réglementaire contraire, obtenir communication par les commissaires aux comptes, les experts-comptables, les notaires, les membres et représentants du personnel, par les administrations et organismes publics, les organismes de prévoyance et de sécurité sociale, les établissements de crédit , les sociétés de financement, les établissements de monnaie électronique, les établissements de paiement ainsi que les services chargés de centraliser les risques bancaires et les incidents de paiement des renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la situation économique, financière, sociale et patrimoniale du débiteur ».
Lorsqu’il statue sur l’ouverture de la procédure collective, le tribunal fixe la date de cessation des paiements, après avoir sollicité les observations du débiteur. A défaut de détermination de cette date, la cessation des paiements est réputée être intervenue à la date du jugement (article L. 631-8 du Code de commerce).
Le tribunal doit donc justifier, dans son jugement, qu’à la date de cessation des paiements qu’il fixe, le débiteur n’était pas en mesure de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.
La juridiction de fond ne peut se satisfaire, pour caractériser l’état de cessation des paiements, du non-paiement de créances exigibles, mêmes importantes, elle a l’obligation de constater l’état de cessation des paiements par la seule comparaison du passif exigible et de l’actif disponibles (Cour de cassation, chambre commerciale du 14/03/2018, n° 16-27187).
Si le passif exigible peut être identifié il n’est rempli que la première branche de la définition de la cessation des paiements. Il est obligatoire que la consistance de l’actif disponible soit précisée.
Dès lors que l’état de cessation des paiements résulte de la confrontation des deux éléments, ils doivent, l’un comme l’autre, être établis de manière chiffrée. Si le passif exigible est déterminé il faut, dans le même temps, qu’un chiffrage précis de l’actif disponible soit effectué pour pouvoir estimer s’il y a possibilité ou non de « faire face ».
La date retenue dans le jugement d’ouverture de la procédure n’est que provisoire, celle-ci pouvant faire l’objet d’un report ultérieurement dans des conditions que nous n’examinerons pas ici.
La Cour de cassation a nettement consacré le principe de l’autonomie juridique des sociétés appartenant au groupe. Les juridictions doivent ainsi, nécessairement caractériser la cessation de paiements de chacune des sociétés du groupe, pour pouvoir ouvrir une procédure collective.
La solution a été clairement énoncée à propos de l’ouverture d’une procédure d’une filiale qui devait être appréciée en elle-même, sans que soient prises en compte les capacités financières du groupe (Cour de cassation, chambre commerciale du 26/06/2007, n° 06-20820).
Depuis la loi du 15/06/2010, l’entrepreneur individuel peut décider d’adopter le statut d’EIRL qui lui permet d’affecter dans un patrimoine distinct ses biens professionnels, qui vont alors seuls servir de gage aux créanciers professionnels.
Si une procédure collective doit être ouverte, elle ne pourra frapper que le patrimoine professionnel qui sera exclusivement pris en compte pour apprécier l’état de cessation des paiements.
Il en résulte que pour l’EIRL, les sommes déposées sur son compte personnel n’intègrent plus l’actif disponible, et l’emprunt contracté pour acquérir la résidence principale, n’est plus un passif exigible.
Rappelons que le régime EIRL a pris fin à compter du 15/05/2022 et qu’à compter de cette date il n’est plus possible d’opter pour ce statut,
Du fait de la création de deux patrimoines, professionnel et personnel, à compter du 15/05/2022, les conditions d’ouverture d’une procédure collective à l’encontre d’un entrepreneur individuel sont totalement modifiées. Pour plus de détail, il convient de se reporter à l’étude intitulée » LE NOUVEAU STATUT DE L’ENTREPRENEUR INDIVIDUEL « .
L’état de cessation des paiements, en procédure de sauvegarde, peut résulter :
Concernant la cessation des paiements en cours de période d’observation de la procédure de sauvegarde, se pose la question de savoir si le passif exigible doit comprendre les dettes antérieures à l’ouverture de la sauvegarde, celles-ci n’étant pas exigibles, au regard de l’arrêt des poursuites.
Les avis restent partagés.
La Cour de Cassation précise que concernant l’état de cessation des paiements d’un débiteur en plan de sauvegarde ou de redressement, il convient de prendre en compte les dettes nouvelles, soit de la période d’observation, soit postérieure à l’arrêté du plan et d’y inclure le retard de règlement des dividendes du plan (Cour de cassation, chambre commerciale du 12/07/2011, n° 10-19604), seuls ces dividendes échus et impayés dans le cadre du plan, constituent un passif exigible au sens de la définition légale de l’état de cessation des paiements.
Ce passif ainsi déterminé doit être comparé à l’actif disponible.
Quelle que soit la date retenue dans le jugement d’ouverture de la procédure collective le jugement n’est que provisoire quant à la détermination de la date de cessation des paiements, qui peut faire l’objet d’un ou plusieurs reports en arrière, comme le précise le 2ième alinéa de l’article L. 631-8 du Code de commerce.
Notons que :
Comme nous l’avons le constater précédemment, le tribunal, au jour de l’ouverture de la procédure collective, dispose souvent de peu d’éléments, pour fixer avec précision la date de cessation des paiements. Il appartient alors, au mandataire ou administrateur judiciaires, au regard des pièces dont ils disposent pendant la période d’observation, de juger de l’opportunité de saisir le tribunal afin de reporter la date de cessation des paiements.
Le tribunal saisi d’une demande de report doit, pour apprécier cette situation, se placer, non au jour où il statue, mais à celui auquel est envisagé le report de la date de cessation des paiements (Cour de cassation, chambre commerciale du 09/12/2020, n° 19-14437).
Le report de la date de cessation des paiements a pour conséquence la création d’une période appelée » période suspecte « .
La période suspecte est la période qui se situe entre la date de cessation des paiements (première heure du jour ou est fixée la date de la cessation des paiements) et la date d’ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.
Pendant cette période, le tribunal a la possibilité de remettre en cause des actes accomplis en violation du principe d’égalité des créanciers.
L’article L. 632-1 énumère tout une série d’actes, 13 au total, dont la nullité si elle est demandée s’impose au juge (actes translatifs à titre gratuit, paiement de dettes non échues …).
L’article L. 632-2 dispose quant à lui que » les paiements pour dettes échues effectués à compter de la date de cessation des paiements et les actes à titre onéreux accomplis à compter de cette même date peuvent être annulés si ceux qui ont traité avec le débiteur ont eu connaissance de la cessation des paiements « .
Pour plus de détails, concernant la période suspecte, se reporter à l’étude intitulée » LES NULLITES DE LA PERIODE SUSPECTE « .
L’article L. 653-8 dispose que le tribunal peut prononcer l’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute toute entreprise commerciale ou artisanale et toute personne morale » à l’encontre de toute personne mentionnée à l’article L. 653-1 qui a omis sciemment de demander l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l’ouverture d’une procédure de conciliation « .
Notons, que le tribunal, pour prononcer cette condamnation, ne peut prendre en compte que la date fixée par le tribunal. Ainsi, si la date de cessation des paiements est celle de l’ouverture de la procédure collective, il est impossible de prononcer cette sanction.
Comme nous l’avons constaté précédemment, le juge a l’obligation de déterminer, le passif exigible, ainsi que l’actif disponible et d’en effectuer la comparaison afin de démontrer l’existence d’un état de cessation des paiements et d’en fixer la date.
Nous allons examiner les différentes situations qui peuvent se présenter au juge, concernant la fixation de la date de cessation des paiements et proposer une sujétion de jugement.
En introduction des « attendu » du jugement il apparait utile d’informer les parties des obligations de chacun, imposées par les textes.
Par exemple dans le cas d’une assignation en redressement judiciaire :
« Attendu que :
– Selon l’article L. 631-1 du Code de commerce « Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L.631-3 qui, dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n’est pas en cessation des paiements » ;
– Il incombe au demandeur à l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire de rapporter la preuve de l’état de cessation des paiements de son débiteur, un simple défaut de paiement d’une créance étant à cet égard insuffisant à l’établir ».
En cas de liquidation judiciaire il convient de faire référence à l’article L. 640-1 et de motiver le redressement manifestement impossible.
Dans la plupart des cas le passif exigible est égal à la créance invoquée par le créancier, celui-ci ayant peu de possibilités d’avoir connaissance d’autres créances. Rappelons que le créancier n’a aucune obligation d’être titulaire d’un titre exécutoire (Cour de cassation, chambre commerciale du 28/06/2017, n° 16-10025).
Le juge doit en premier lieu vérifier que la créance est certaine, liquide et exigible, au regard des pièces produites par le créancier et éventuellement des contestations soulevées par le débiteur.
Si la créance résulte d’une condamnation, pour être certaine elle doit être définitive, c’es-à-dire ne pas faire l’objet d’un d’appel ou d’une opposition., et ceci même si la condamnation est assortie de l’exécution provisoire (Cour de cassation, chambre commerciale du 02/03/2022, n° 20-22021)..
Ainsi, une condamnation par ordonnance de référé, n’est certaine qu’en l’absence d’appel ou d’une procédure devant le juge du fond.
Exemple de motivation :
Créance résultant d’une ordonnance de référé
« – Ne peut être incluse dans le passif une dette résultant d’une décision qui, à la date du jugement ouvrant une procédure collective, fait encore l’objet d’un recours. En revanche, une créance résultant d’une ordonnance de référé peut être considérée comme certaine, liquide et exigible dès lors que l’ordonnance en question n’a fait l’objet d’aucun recours ;
– La SAS LES ATELIERS REUNIS se prévaut d’une ordonnance référé du président du tribunal de commerce de CANNES du 9 mai 2019 portant sur une créance de 80.035,90 euros ;
– Si l’ordonnance de référé du 9 mai 2019 ne condamne la SARL DUPUY qu’à titre provisionnel, il n’est pas justifié qu’un recours a été exercé en temps utile contre cette décision, ni que cette même créance ait fait l’objet d’une instance au fond. Il en résulte que la créance résultant de l’ordonnance de référé est certaine, liquide et exigible ;
– Le passif exigible justifié est donc égal à la somme de 80.035,90 euros ».
Créance résultant d’une ordonnance d’injonction de payer
– Pour justifier sa demande d’ouverture d’un redressement judiciaire à l’encontre de la SARL DUPUY, la SAS LES ATELIERS REUNIS produit une ordonnance d’injonction de payer du 29/11/2018, signifiée à personne en date du 5/12/2018 ;
– La SARL DUPUY ne justifie pas avoir formé d’opposition dans les délais légaux contre ladite ordonnance d’injonction de payer, de sorte que cette créance au profit de la SAS LES ATELIERS REUNIS est certaine, liquide et exigible ;
– Il en résulte, qu’à défaut d’avoir exercé les voies de recours appropriées, la SARL DUPUY ne peut remettre en cause devant le tribunal le montant des créances qui ont été reconnues judiciairement et définitivement à la SAS LES ATELIERS REUNIS ;
– Le passif justifié est donc égal à la somme de … ».
Si l’ordonnance a fait l’objet d’une opposition la créance ne sera pas retenue n’étant pas certaine.
Créance résultant d’une dette fiscale
« – Rappel des justificatifs produits par l’Administration fiscale…
– Il convient de constater que la créance fiscale, qui résulte d’un avis d’imposition n° … du … (ou d’un avis de mise en recouvrement), vaut titre exécutoire faute pour la SARL DUPUY de l’avoir contesté dans les conditions prévues par le livre des procédures fiscales, et constitue en conséquence un passif exigible ».
– Le passif exigible justifié est donc égal, à la somme de … ».
Créance résultant d’une dette URSSAF
« – Rappel des justificatifs produits par l’URSSAF…
– En l’espèce, l’URSSAF des Alpes-Maritimes justifie que la SARL DUPUY a, en raison de cotisations impayées, fait l’objet des contraintes devenues définitives pour un montant de … (reproduire le détail avec les références) ;
– L’URSSAF produit par ailleurs :
- les courriers de mise en demeure qui ont été adressés à la SARL DUPUY les 25 février et 29 mars 2019,
- et le commandement aux fins de saisie vente demeuré infructueux en date du 30 avril 2019 ;
– Il est donc démontré l’existence d’un passif exigible d’un montant de … ».
Si la créance est contestée par le débiteur, le juge doit examiner le sérieux de cette contestation. Il dispose donc du pouvoir de ne pas retenir la contestation soulevée, en motivant sa décision.
Rappelons que :
Il appartient au débiteur de prouver qu’il bénéficie de la part du créancier (s) d’une prorogation de paiement et qu’en conséquence ladite créance (s) échue ne sera pas comprise dans le passif exigible.
Il doit s’agir d’un document écrit. Une simple demande ne constituant pas une preuve suffisante.
Si le débiteur est présent à l’audience, rappelons que l’article L. 631-8 précise que » le tribunal fixe la date de cessation des paiements après avoir sollicité les observations du débiteur « . Il y a donc place à un dialogue entre le débiteur et le tribunal concernant la date de cessation des paiements.
Il convient toutefois de garder en mémoire que le débiteur n’a pas à démontrer qu’il n’est pas en état de cessation de paiement, c’est au au créancier d’en apporter la preuve (Cour de cassation, chambre commerciale du 23/09/2020, n° 18-26143).
Ne pas oublier de prendre en compte les réserves de crédit (découvert bancaire non utilisé, apport en compte-courant …).
A défaut de disposer de la comptabilité du débiteur, le créancier aura de grandes difficultés à démontrer l’inexistence d’un actif disponible du débiteur. La Cour de cassation a rejeté, la justification d’un état de cessation des paiements justifiée ainsi par une Cour d’appel » le non-paiement des salaires par M. X… ne peut s’expliquer que par un état de cessation des paiements » (Cour de cassation, chambre commerciale du 29/10/2002, n° 99-20418).
Exemple de rejet
– Concernant le passif exigible, la SAS LES ATELIERS REUNIS produits une facture établie à l’ordre de la SARL DUPUY, pour un montant de 24.289,74 euros, ainsi que le bon de commande et le bon de livraison correspondant ;
– La SAS LES ATELIERS REUNIS ne produit aucune information concernant le montant de l’actif disponible dont pourrait disposer la SARL DUPUY, n’ayant entrepris aucune action judiciaire de recouvrement permettant de constater une absence totale de liquidités ;
– Le tribunal n’étant pas en mesure de faire la comparaison entre le passif exigible et l’actif disponible ne peut donc se prononcer sur l’état de cessation des paiements de la SARL DUPUY ;
– En conséquence, la SAS LES ATELIERS REUNIS sera déboutée de sa demande d’ouverture d’un redressement judiciaire à l’encontre de la SARL DUPUY ».
Pour tenter de justifier l’absence d’un actif disponible, le créancier devra informer le tribunal des différentes démarches qu’il a entrepris justifiant cette absence de trésorerie disponible (Cour de cassation, chambre commerciale du 20/03/2019, n° 17-26602)..
Ainsi, après obtention d’un titre exécutoire (injonction de payer devenue définitive par exemple), le créancier qui a fait pratiquer par l’huissier une saisie-attribution du compte bancaire, dont il résulte que celui-ci présente un solde créditeur, peut prétendre que le débiteur ne dispose d’aucun actif disponible.
Il en est de même dans l’hypothèse d’une saisie vente de biens meubles pour laquelle il est constaté l’absence de mobilier.
Exemple
« – La tentative de saisie-attribution réalisée le 5 avril 2019 en exécution de l’ordonnance portant injonction de payer du 29 novembre 2018 a révélé que le compte de la SARL DUPUY présentait un solde débiteur de 2.850,17 euros. Ce solde débiteur démontre l’absence d’actif disponible de la SARL DUPUY ;
ou
– Le commandement aux fins de saisie vente étant demeuré infructueux, il convient donc de constater que la SARL DUPUY ne dispose d’aucun actif disponible ;
Ou
– La procédure de recouvrement forcé qui avait été mise en œuvre et l’avis à tiers détenteur sur les comptes bancaires de la société n’ont pas permis de recouvrer la moindre somme ;
– Il convient donc de constater que la SARL DUPUY ne dispose d’aucun actif disponible
– En conséquence, il est démontré que la SARL DUPUY est en état de cessation des paiements, ne pouvant faire face à passif exigible justifié pour un montant de … en l’absence d’actif disponible ».
Le créancier peut également prendre en compte un courrier du débiteur dans lequel celui-ci demande un échelonnement pour payer sa créance, étant dans l’impossibilité d’y faire face en intégralité.
Il parait nécessaire, dans le cas où le débiteur est présent, de faire apparaître la phrase suivante :
« – Il résulte de l’article L. 631-8 du Code de commerce que « le tribunal fixe la date de cessation des paiements après avoir sollicité les observations du débiteur. A défaut de détermination de cette date, la cessation des paiements est réputée être intervenue à la date du jugement d’ouverture de la procédure ».
La date de constatation d’une saisie infructueuse pourra être retenue comme date de cessation des paiements, il en est de même d’un courrier du débiteur indiquant qu’il ne peut faire face à ses échéances.
De même, si le débiteur reconnait qu’à la date de sa mise en demeure de payer il ne disposait pas d’un actif disponible suffisant, cette date pourra être retenue par le tribunal, en fournissant toutes les explications nécessaires.
Par sa décision prononçant la cassation, la Cour de cassation replace l’hypothèse de l’ouverture d’une procédure collective dans son cadre juridique, attirant opportunément l’attention sur ce que doit établir le demandeur et que doit vérifier le tribunal saisi. La Cour de cassation rappelle, que deux aspects, distincts mais complémentaires, doivent être attestés.
En premier lieu, la créance invoquée à l’appui de la demande doit être exigible et non contestée par le débiteur.
En second lieu, il faut que la preuve soit apportée qu’il n’est pas en mesure de payer cette créance avec son actif disponible.
En ce qui concerne la créance elle-même, le juge du fond ne peut se limiter à observer que le débiteur conteste la validité du contrat en cause mais doit examiner, plus directement, si ce dernier contestait devoir au créancier les sommes résultant des factures produites aux débats. C’est donc une analyse plus concrète à laquelle doit se livrer le juge et il ne peut, pour retenir le caractère litigieux de la créance, s’en tenir à observer que le débiteur conteste la validité du contrat initial.
En ce qui concerne le défaut de paiement des sommes en cause, le tribunal doit rechercher si cela résulte d’un refus du débiteur, alors qu’il aurait les capacités financières pour le faire, ou d’une impossibilité de paiement résultant de son actif disponible.
C’est ici faire référence directement à la condition tenant à l’état de cessation des paiements dans lequel doit se trouver le débiteur pour qu’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires puisse être ouverte à son égard.
Si cette exigence est incontestable, on relèvera que, sur ce point, le créancier demandeur ne sera, le plus souvent, pas en mesure de disposer de l’ensemble des informations relatives à l’actif disponible de son débiteur. Il appartiendra, dès lors, au tribunal d’accomplir les diligences nécessaires à cet effet, en usant des moyens procéduraux qui lui sont propres.
Cour de cassation, chambre commerciale du 19/04/2023, n° 20-19401
La situation est ici, apparemment plus facile, car le débiteur en effectuant sa déclaration, fait l’aveu d’être en état de cessation des paiements. Il est donc légitime de fixer la date de cessation des paiements au plus tard au jour du dépôt au greffe de la déclaration.
Le Tribunal peut parfaitement lors de la comparution du chef d’entreprise collecter des indications permettant de fixer plus précisément la date de cessation des paiements, jusqu’à 18 mois avant le jugement, et il est alors prudent de faire acter par le greffe les indications données, et de les relater dans la décision pour que la date retenue soit motivée.
DALLOZ – Documentation/Répertoire de droit commercial/Entreprise en difficulté : cessation des paiements
LEXIS 360 – Encyclopédie : Fascicule 2155 : cessation des paiements
Site A. Bamdé et J. Bourdoiseau – La cessation des paiements.
♦ Droit et pratiques des procédures collectives – Pierre-Michel LE CORRE (éditions 2021/2022) – Titre 220 : situation économique exigée.