Nous n’examinerons ici que la théorie des nullités en droit civil, dans son application en droit des contrats.
Nous n’aborderons donc pas :
Article 1178 du Code civil
« Un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d’un commun accord.
Le contrat annulé est censé n’avoir jamais existé.
Les prestations exécutées donnent lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.
Indépendamment de l’annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité extracontractuelle ».
Article 1179 du Code civil.
« La nullité est absolue lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde de l’intérêt général.
Elle est relative lorsque la règle violée a pour seul objet la sauvegarde d’un intérêt privé ».
Article 1180 du Code civil
« La nullité absolue peut être demandée par toute personne justifiant d’un intérêt, ainsi que par le ministère public.
Elle ne peut être couverte par la confirmation du contrat ».
Article 1181 du Code civil
« La nullité relative ne peut être demandée que par la partie que la loi entend protéger.
Elle peut être couverte par la confirmation.
Si l’action en nullité relative a plusieurs titulaires, la renonciation de l’un n’empêche pas les autres d’agir ».
Article 1182 du Code civil.
« La confirmation est l’acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l’objet de l’obligation et le vice affectant le contrat.
La confirmation ne peut intervenir qu’après la conclusion du contrat.
L’exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation. En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu’après que la violence a cessé.
La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers ».
Article 1183 du Code civil.
« Une partie peut demander par écrit à celle qui pourrait se prévaloir de la nullité soit de confirmer le contrat soit d’agir en nullité dans un délai de six mois à peine de forclusion. La cause de la nullité doit avoir cessé.
L’écrit mentionne expressément qu’à défaut d’action en nullité exercée avant l’expiration du délai de six mois, le contrat sera réputé confirmé ».
Article 1184 du Code civil.
« Lorsque la cause de nullité n’affecte qu’une ou plusieurs clauses du contrat, elle n’emporte nullité de l’acte tout entier que si cette ou ces clauses ont constitué un élément déterminant de l’engagement des parties ou de l’une d’elles.
Le contrat est maintenu lorsque la loi répute la clause non écrite, ou lorsque les fins de la règle méconnue exigent son maintien ».
Article 1185 du Code civil.
« L’exception de nullité ne se prescrit pas si elle se rapporte à un contrat qui n’a reçu aucune exécution ».
Article 1178 alinéa 1, première phrase, du Code civil.
« Un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul ».
La nullité est la mesure qui frappe tout contrat qui n’est pas conforme aux conditions de validité que la loi impose pour lui reconnaître un effet juridique.
La nullité peut frapper le contrat dans son intégralité ou l’une de ses stipulations, en les réduisant à néant. Le contrat ou l’une ou plusieurs de ses clauses étant alors réputés « n’avoir jamais existé ».
La notion de nullité doit être distinguée de concepts proches, tels que :
La nullité est une sanction qui s’applique au contrat qui n’a pas été formé conformément aux prescriptions légales. Elle a pour effet de faire disparaître l’acte rétroactivement.
L’inopposabilité n’est pas une sanction mais un état qui concerne essentiellement les tiers à l’acte juridique. L’inopposabilité est l’état de l’acte qui n’a aucun effet à l’égard des tiers.
Il convient de rappeler que le contrat n’a aucun effet obligatoire à l’égard des tiers, il ne peut en aucun cas leur imposer de faire, ne pas faire ou donner quelque chose. C’est le principe de l’effet relatif du contrat énoncé à l’article 1199 du Code civil .
Néanmoins, l’absence d’effet obligatoire à leur égard ne signifie pas que les tiers peuvent ignorer le contrat, tout au contraire, ils doivent le respecter et ne pas en gêner l’exécution. Le contrat leur est en principe opposable.
L’inopposabilité du contrat correspond donc à l’hypothèse où, exceptionnellement, les tiers n’ont pas à respecter le contrat et peuvent donc avoir un comportement qui en entrave la bonne exécution.
L’inopposabilité est destinée à protéger les tiers contre un acte juridique qui pourrait leur porter tort dans des conditions illégitimes.
Ainsi, en matière de simulation, l’article 1201 du Code civil précise que « Lorsque les parties ont conclu un contrat apparent qui dissimule un contrat occulte, ce dernier, appelé aussi contre-lettre, produit effet entre les parties. Il n’est pas opposable aux tiers, qui peuvent néanmoins s’en prévaloir ».
Un exemple : arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale du 17/02/2009, n° 08-10384.
« Est légalement justifié l’arrêt qui, après avoir souverainement retenu que l’opération par laquelle une personne a acheté à son nom un immeuble dont le prix d’acquisition a été payé par un débiteur en liquidation judiciaire s’analyse en une convention de prête-nom et que le véritable propriétaire de l’immeuble est ce débiteur, donne acte au liquidateur de sa ratification de l’acte réel accompli par le débiteur dessaisi de l’administration et de la disposition de ses biens, dans le but d’accroître l’actif de celui-ci, et ordonne la mutation de propriété de l’immeuble au profit de la liquidation judiciaire ».
De même, lorsque les conditions de forme et de publicité sont exigées pour la protection des tiers, la sanction de leur omission sera l’inopposabilité à ces derniers (nomination d’un gérant de SARL non publiée au RCS, désignation inopposable aux tiers).
La caducité peut se définir comme « l’état d’un acte juridique valable mais privé d’effet en raison de la survenance d’un fait postérieurement à sa création ».
Ainsi, lorsque l’un des éléments essentiels ou nécessaires à l’exécution du contrat vient à disparaître postérieurement à sa conclusion, la caducité s’impose comme la conséquence logique de cette disparition.
Un exemple : si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit, il est caduc.
De même, lorsque deux contrats sont interdépendants, la disparition de l’un emporte la caducité de l’autre (contrat de location financière et contrat de prestation de service).
Nous examinerons les causes et les effets de la caducité dans une prochaine étude
La nullité suppose que le contrat, soit atteint d’une irrégularité dès sa formation (vice du consentement, incapacité d’une des parties, violation des règles de l’ordre public, etc.).
La résolution est la sanction consistant dans l’effacement rétroactif des obligations nées d’un contrat synallagmatique, régulier dans sa formation, lorsque l’une des parties n’exécute pas ses prestations.
On utilise le terme « résiliation » lorsque le contrat en cause est un contrat à exécution successive.
Nous examinerons les causes et les effets de la résolution ou de la résiliation dans une prochaine étude.
L’adage « pas de nullité sans texte » n’a pas de valeur juridique en droit des contrats.
La nullité du contrat doit être prononcée par le juge lorsque la loi dispose expressément que le contrat est nul.
Par contre, en l’absence de texte, les tribunaux se reconnaissent le droit de sanctionner par la nullité les conditions légales qui leur paraissent essentielles, même si aucun texte ne l’impose.
De même, un contrat, dont la conclusion a entraîné la violation d’une règle impérative que la loi ne sanctionne pas expressément par la nullité de tout acte contraire, peut néanmoins être annulé s’il est contraire à l’ordre public (Exemple : contrat de crédit-bail conclu avec un organisme n’étant pas habilité à effectuer ces opérations).
L’article 1179 prévoit que la nullité est absolue lorsque la règle violée a pour objet « la sauvegarde de l’intérêt général », et qu’elle est relative lorsqu’elle a pour seul objet « la sauvegarde d’un intérêt privé ».
En application de ce critère, la nullité est donc absolue en cas d’objet ou de but illicite, c’est-à-dire contraire à l’ordre public.
La nullité est relative en cas :
Les articles 1180 à 1182 du Code civil détaillent le régime respectif des deux nullités, en rappelant que la nullité absolue peut être demandée par toute personne justifiant d’un intérêt ( également par le ministère public) et ne peut être couverte par la confirmation des parties, alors que la nullité relative ne peut être invoquée que par celui que la loi entend protéger, qui peut librement y renoncer en confirmant l’acte.
Par principe, la nullité est de droit.
La « nullité de droit » signifie qu’aucun pouvoir d’appréciation n’est laissé au juge lorsqu’il constate que les conditions sont réunies.
La nullité est dite « facultative » lorsqu’il est laissé au juge d’apprécier discrétionnairement, l’opportunité de prononcer la nullité.
À titre d’exemple, la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, distingue les deux hypothèses pour les actes conclus pendant la période suspecte (date entre la date de cessation des paiements constatée par le tribunal et la date d’ouverture de la procédure collective) :
La nullité peut être exercée par voie d’action (directement par le bénéficiaire de l’action en nullité), sous forme de demande en nullité après exécution ou bien à titre préventif avant l’exécution, voire par voie reconventionnelle.
En effet, une partie pourra désirer faire constater le plus tôt possible la nullité d’un acte dont elle craint de se voir réclamer plus tard l’exécution, notamment lorsqu’il s’agit d’un acte destiné à régir pendant une certaine durée les rapports entre les parties (contrat de franchise, par exemple).
Inversement, l’action en nullité pourra s’exercer lorsque l’acte nul aura été exécuté, en vue de revenir sur son exécution et de façon à provoquer les restitutions nécessaires.
Mais la nullité pourra aussi être invoquée par voie d’exception par le défendeur pour faire obstacle à une demande en exécution.
Article 1178 alinéa 1 du Code civil.
« Un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d’un commun accord ».
Il en résulte que la nullité par voie de notification unilatérale est impossible, même si celle-ci est prévue par une clause du contrat.
Dans la pratique, s’agissant d’un contrat, un écrit semble nécessaire, qui ne pourra être conclu que dans les conditions de validité de n’importe quel contrat.
Quant aux effets de la nullité conventionnelle, tout laisse à penser qu’ils sont identiques à ceux de la nullité prononcée en justice. Il appartiendra toutefois aux parties de remplir la mission traditionnellement confiée aux juges, en précisant l’étendue (nullité partielle ou nullité totale), mais surtout les éventuelles suites de l’annulation (restitutions, éventuelle responsabilité).
Il convient de rappeler que le Code général des impôts prévoit non seulement que les droits d’enregistrement perçus ne sont pas restituables, mais également que le transfert consécutif à l’annulation donne lieu à perception de nouveaux droits.
Aux termes de l’article 1180, alinéa 1er, du Code civil, « la nullité absolue peut être demandée par toute personne justifiant d’un intérêt, ainsi que par le ministère public ».
La nullité absolue concerne donc, en premier lieu, l’une ou l’autre des parties.
Un sous-acquéreur peut être considéré comme intéressé dans la mesure seulement où sa situation dépend de l’efficacité de l’acte conclu par l’acquéreur principal.
De même, les créanciers chirographaires des parties ne pourront justifier d’un intérêt que si le contrat nul leur porte préjudice, ce qui sera le cas notamment lorsque leur débiteur s’est appauvri.
En revanche, la recevabilité de l’action en nullité absolue ne saurait être admise qu’à titre exceptionnel lorsqu’elle est sollicitée par un tiers au contrat.
Aux termes de l’article 1181, alinéa 1er, du Code civil, « la nullité relative ne peut être demandée que par la partie que la loi entend protéger ».
Ainsi, en matière contractuelle, c’est celui dont le consentement a été vicié, qui a seul le pouvoir de demander la nullité du contrat.
Un exemple :
La gérante de la SCI DUPIN signe avec Madame MARIE un contrat de location. Faisant suite à une assignation en paiement du loyer, Madame MARIE demande la nullité du bail, car la location a été consentie par la gérante sans autorisation préalable, exigée l’article 24 des statuts de la SCI.
Sa demande est rejetée car la nullité d’une convention pour absence de consentement, qui vise à protéger l’intérêt de la partie dont le consentement n’a pas été valablement donné, est une nullité relative, de sorte que seule la SCI pouvait l’invoquer, à l’exclusion de Madame MARIE.
D’autres personnes peuvent néanmoins agir du fait de l’application des mécanismes du droit commun, en l’occurrence :
L’article 1182 du code civil, précise que la confirmation est l’acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce.
Faute d’être expresse, elle peut tacite, ainsi que le prévoit l’alinéa 3 de l’article 1182 : conformément à la jurisprudence traditionnelle, il précise que l’exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation.
Le 2ième alinéa de l’article 1180 du Code civil, précise que la nullité absolue ne peut être couverte par la confirmation du contrat, l’acte étant contraire à l’intérêt général.
Au contraire, dans l’hypothèse d’une nullité relative, il est normal que celui que l’on entend protéger puisse renoncer à son bénéfice. En ce sens, l’article 1181, prévoit que la nullité relative peut être couverte par la confirmation.
La confirmation est soumise à trois conditions de fond (article 1182 du Code civil) :
La confirmation n’est soumise par l’article 1182 du Code civil à aucune condition de forme, mais comme toute renonciation, elle doit être expresse et non équivoque.
Selon l’alinéa 4 de l’article 1182, « la confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés ».
Elle fait obstacle aussi bien à l’exception de nullité qu’à l’action en nullité, voire à la demande reconventionnelle.
La confirmation provoque la validation rétroactive du contrat nul. Cependant, l’effet de cette renonciation au droit de critique est relatif, c’est-à-dire que la confirmation est inopposable aux autres titulaires éventuels de ce droit.
L’article 1183 du Code civil.
« Une partie peut demander par écrit à celle qui pourrait se prévaloir de la nullité soit de confirmer le contrat soit d’agir en nullité dans un délai de six mois à peine de forclusion. La cause de la nullité doit avoir cessé.
L’écrit mentionne expressément qu’à défaut d’action en nullité exercée avant l’expiration du délai de six mois, le contrat sera réputé confirmé ».
La mise en œuvre de cette disposition appelle les observations suivantes :
La partie qui a reçu la demande et qui n’a pas agi en nullité dans le délai de six mois que la loi lui impartit est déchue du droit de demander au juge l’annulation du contrat. Le contrat se trouve donc validé tel qu’il est.
Le délai de 6 mois, accordé à la partie pouvant soulever la nullité du contrat, constitue un délai de forclusion, qui ne peut donc être ni interrompu, ni suspendu, comme la prescription.
Il faut distinguer l’hypothèse où le demandeur entreprend d’agir en nullité de celle où la nullité est invoquée comme moyen de défense à une demande en exécution de l’acte. En effet, dans le premier cas, le temps accomplira son œuvre alors que, dans le second, le temps sera impuissant.
Le délai de prescription est fixé par l’article 2224 du code civil : « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ». Par conséquent, l’action en nullité, qu’elle soit relative ou absolue, se prescrit de façon identique.
Toutefois, certaines nullités spécifiques se prescrivent dans un temps plus court :
En application de l’article 2224 du Code civil, l’action en nullité relative ou absolue doit être intentée dans les cinq ans du jour où le contractant a connu ou aurait dû connaître le vice dont est affectée la convention.
C’est donc aux juges de déterminer au cas par cas la date de connaissance du vice.
L’article 1185 du Code civil prévoit que « l’exception de nullité ne se prescrit pas si elle se rapporte à un contrat qui n’a reçu aucune exécution ».
Concrètement, elle signifie que si le demandeur à l’action en nullité peut se voir opposer la prescription de son action en nullité après l’expiration d’un certain délai, le défendeur, par voie d’exception, pourra, au contraire, se prévaloir perpétuellement de la nullité pour en empêcher l’exécution, à son égard, l’écoulement du temps sera sans effet.
Toutefois, comme le précise le texte, en présence de la moindre exécution, même partielle, l’exception de nullité se prescrit.
Cour de cassation, chambre civile 1 du 31/01/2018, n° 16-24092.
« Mais attendu qu’une défense au fond, au sens de l’article 71 du code de procédure civile, échappe à la prescription ;
Que constitue une telle défense le moyen tiré de l’article L. 341-4, devenu L. 332-1 du code de la consommation, selon lequel l’engagement de caution d’une personne physique manifestement disproportionné à ses biens et revenus se trouve privé d’effet à l’égard du créancier professionnel ;
Qu’il s’ensuit que la banque ne pouvait opposer aux cautions la prescription du moyen tiré de la disproportion de leur engagement ;
Que, par ce motif de pur droit, substitué, dans les conditions de l’article 1015 du code de procédure civile, à ceux que critique le moyen, l’arrêt se trouve légalement justifié ».
Rappelons que l’article 72 du Code de procédure civile, précise qu’une défense au fond peut être proposée en tout état de cause, c’est-à-dire qu’elle n’est pas atteinte par la prescription, sans qu’il soit nécessaire d’examiner l’existence ou non d’un début d’exécution du contrat.
L’article 71 du Code de procédure civile précise qu’une défense au fond consiste, pour le défendeur, à contester le droit substantiel de son adversaire et tend ainsi à faire déclarer infondée la prétention émise à son encontre.
La nullité relative comme la nullité absolue emporte l’anéantissement rétroactif du contrat, qui est censé n’avoir jamais existé.
La nullité a pour effet d’effacer l’acte juridique dans ses conséquences passées comme dans ses conséquences à venir.
L’article 1178, alinéa 2, du code civil énonce que « le contrat annulé est censé n’avoir jamais existé », l’alinéa 3 précisant que « les prestations exécutées donnent lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9 du Code civil ».
L’annulation de l’acte lui ôte toute efficacité juridique. D’une part, l’acte est insusceptible de produire des effets dans le futur. D’autre part, les effets produits dans le passé sont en principe effacés, la situation devant être remise dans l’état antérieur à la passation de l’acte. Si les effets futurs ne posent pas de difficultés particulières, il n’en va pas de même pour les effets passés.
Si l’acte n’a reçu antérieurement à son annulation aucune exécution, la situation se dénouera facilement dans la mesure où il n’y aura pas lieu à restitution. Ainsi, si le contrat n’a pas encore été exécuté, la nullité aura pour unique effet de fermer aux parties toute action en exécution forcée du contrat.
Les conséquences de la restitution, au regard de la nature du contrat et de son exécution, seront examinées dans une étude séparée.
Notons toutefois, que le principe de rétroactivité ne pourra jouer que si le contrat annulé n’a pas produit des conséquences irréversibles, rendant les restitutions réciproques impossibles.
Ainsi, en matière de société, l’article 1844-15, alinéa 1, du code civil dispose que « lorsque la nullité de la société est prononcée, elle met fin, sans rétroactivité, à l’exécution du contrat » ; l’alinéa 2 précise qu’à l’égard de la personne morale, la nullité produit les effets d’une dissolution.
S’agissant spécialement des clauses destinées à sanctionner le défaut d’exécution du contrat (clauses pénales, clauses de dédit, etc.), la nullité a un effet plus large que la résolution.
La résolution, en effet, n’efface pas les clauses relatives au défaut d’exécution, puisqu’elles sont précisément stipulées pour le cas d’inexécution, c’est-à-dire pour le cas où le créancier peut demander la résolution du contrat. Leur raison d’être étant d’accompagner la résolution, il serait absurde que la résolution les fasse disparaître.
Au contraire, au regard d’une jurisprudence constante, ces mêmes clauses sont balayées par la nullité du contrat.
Il convient d’indiquer deux exceptions importantes au principe selon lequel la nullité affecte l’ensemble de l’acte et des clauses qui le composent, à savoir :
En raison de leur nature particulière, ces clauses ont été déclarées indépendantes du contrat dans lequel elles s’insèrent et qu’en conséquence elles ne sont pas affectées par l’inefficacité de celui-ci.
Cela signifie que même si la validité du contrat est contestée, la validité de ces clauses est maintenue.
En règle générale, l’annulation de l’acte frappe celui-ci entièrement. Mais il peut arriver que la nullité n’atteigne que certaines clauses.
L’alinéa 1 de l’article 1184 du Code civil précise, à cet effet, que «lorsque la cause de nullité n’affecte qu’une ou plusieurs clauses du contrat, elle n’emporte nullité de l’acte tout entier que si cette ou ces clauses ont constitué un élément déterminant de l’engagement des parties ou de l’une d’elles ».
C’est donc le caractère déterminant de la clause, au regard du consentement de l’une ou des deux parties, qui emporte la nullité totale de l’acte.
Si la preuve de ce caractère déterminant n’est pas rapportée, le juge doit, aujourd’hui, annuler la clause litigieuse et maintenir le reste de l’acte.
De plus, l’alinéa 2 de l’article 1184 du code civil consacre la règle selon laquelle le contrat est maintenu « lorsque la loi répute la clause non écrite », le juge n’a pas à se poser la question de son caractère déterminant : il la déclare non écrite, en application de la loi, tout en maintenant le reste du contrat.
Il en va ainsi, désormais :
C’est généralement le législateur lui-même qui définira, au nom de l’ordre public, sa politique des nullités en recherchant la sanction la plus efficace à la dénonciation de l’illicite. Ainsi, l’article L. 343-1 du code de la consommation sanctionne par la nullité de l’engagement l’absence de mention manuscrite de la caution personne physique s’engageant à l’égard d’un créancier professionnel, exigée par l’article L. 331-1.
Logiquement, la nullité d’un contrat doit s’étendre aux conventions qui en sont l’accessoire. Lorsque le contrat principal et la convention accessoire ont été conclus entre les mêmes parties, cette extension ne fait que traduire la volonté des contractants : dans leur esprit, l’une des opérations est l’accessoire de l’autre. Si celle-ci est annulée, celle-là l’est aussi. En revanche, la réciproque serait inexacte, car la nullité de l’accessoire n’entraîne pas nullité du principal.
C’est tout naturellement dans le domaine des sûretés qu’on rencontre le plus grand nombre de contrats accessoires par nature, puisque la constitution d’une sûreté n’a pas d’autre raison d’être que de garantir une dette, généralement née d’un autre contrat. Il en va ainsi aussi bien pour les sûretés réelles que pour les sûretés personnelles.
Article 2289 du Code civil :
« Le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable.
On peut néanmoins cautionner une obligation, encore qu’elle pût être annulée par une exception purement personnelle à l’obligé ; par exemple, dans le cas de minorité ».
La nullité de l’obligation principale entraîne donc la nullité du cautionnement, sauf dans l’hypothèse où la nullité concerne une exception personnelle au débiteur principal (incapacité du débiteur principal).
La jurisprudence a beaucoup de difficultés à faire une distinction entre les exceptions « inhérentes à la dette » que peut opposer la caution, et les exceptions « purement personnelles », que ne peut pas opposer la caution.
Deux exemples :
D’une part le contrat de cautionnement fera l’objet d’une étude particulière et d’autre part une étude sera consacrée aux contrats interdépendants et ceci au regard d’une jurisprudence constante.
L’annulation peut causer un préjudice non réparé par le simple jeu des restitutions.
L’article 1178, du Code civil dispose que : « indépendamment de l’annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité extracontractuelle ».
La réparation étant par principe intégrale, elle peut concerner l’ensemble des préjudices démontrés, sous réserve de l’hypothèse où la réparation est déjà compensée par le biais des restitutions.
Le contrat annulé étant censé n’avoir jamais existé, la partie lésée ne peut pas réclamer l’allocation d’une indemnisation correspondant à la non-obtention des résultats commerciaux qu’elle était en droit d’attendre de l’exécution du contrat, sauf à méconnaître les conséquences mêmes de la nullité prononcée.
Cour de cassation, chambre commerciale du 18/10/2011, n° 10-23524.
« Mais attendu que l’arrêt retient, par motifs adoptés, que la société K3 indique avoir subi, en raison de la carence du franchiseur, dans l’exécution du contrat, une perte de marge correspondant à la différence entre le chiffre d’affaires effectivement réalisé sous franchise et celui qui aurait dû correspondre au seuil de rentabilité ;
Qu’il énonce que le contrat de franchise annulé étant censé ne jamais avoir existé, la société K3 ne peut utilement, sauf à méconnaître les conséquences mêmes de la nullité prononcée, réclamer l’allocation d’un préjudice financier correspond à la non-obtention des résultats commerciaux qu’elle eût été en droit d’attendre de l’exploitation de la franchise considérée ;
Qu’ainsi la cour d’appel, qui a répondu aux conclusions sans les dénaturer, a décidé à bon droit que cette demande devait être rejetée ; que le moyen n’est pas fond ».
La responsabilité des intermédiaires qui sont intervenus lors de la conclusion du contrat nul suit les règles du droit commun. Elle est engagée chaque fois que la nullité de l’acte révèle une faute, le plus souvent professionnelle, d’un de ces intermédiaires, faute variant évidemment avec la nature des fonctions exercées.
L’effacement rétroactif du contrat annulé rejaillit aussi sur les tiers, spécialement dans les contrats translatifs de droits réels, comme la vente. En effet, l’acheteur, devenu propriétaire du bien, a pu en disposer à son tour, soit pour le revendre ou consentir des droits réels sur lui (usufruit, servitude, hypothèque, gage, etc.), soit pour en concéder la jouissance par une location. Tous ceux qui tiennent ainsi leurs droits de l’un des contractants se retrouvent sans droit lorsque la vente est annulée puisque, rétroactivement, leur auteur est censé ne jamais avoir été propriétaire du bien.
Le principe est formel, le sous-acquéreur qui tient ses droits d’un acquéreur dont le titre est annulé, perd rétroactivement ses droits sur le bien qu’il a reçu. Il doit donc restituer le bien acquis.
On peut noter que la règle s’applique sans distinguer entre le sous-acquéreur de bonne foi qui ignorait la cause de nullité affectant le titre de leur auteur et le sous-acquéreur de mauvaise foi qui connaissaient cette cause de nullité. On verra cependant que la bonne foi facilite au sous-acquéreur l’accès aux exceptions qui lui permettent de se mettre à l’abri de la nullité.
S’il s’agit de meubles, le sous-acquéreur entré en possession de bonne foi, ignorant que l’acte d’acquisition de son auteur était nul, profitera tout de suite de la règle “en fait de meubles, la possession vaut titre” (Code civil, article. 2276). Il trouve là, pour conserver le bien, un refuge immédiat puisqu’il n’a aucun délai à respecter, et inexpugnable puisque aucune preuve contraire n’est possible.
Pour bénéficier de cette protection, il n’a qu’à respecter les exigences auxquelles la jurisprudence subordonne l’application de ce texte : la bonne foi, une possession utile et sans vice, et à condition qu’il ne s’agisse pas d’une chose volée ou perdue (Code civil, article 2276, alinéa 2).
C’est au moment de la prise de possession que la bonne foi s’apprécie : peu importe que le sous-acquéreur ait appris par la suite que le titre de son auteur était nul.
Si l’acte annulé a porté sur des biens immobiliers, c’est alors la possession trentenaire qui met normalement le sous-acquéreur à l’abri de tout recours, et cela même s’il est de mauvaise foi depuis le premier jour. On sait néanmoins qu’en matière d’immeubles, le possesseur de bonne foi bénéficie d’une usucapion (prescription acquisitive) abrégée de 10 ans (Code civil, article 2272).
En ce domaine, la bonne foi consiste en la croyance de l’acquéreur, au moment de l’acquisition, de tenir la chose du véritable propriétaire.
Le sous-acquéreur, trompé par le titre de son auteur, peut comme son auteur lui-même, invoquer l’apparence dont était paré le titre litigieux.
La théorie de l’apparence ne peut jouer que si la nullité du titre de l’auteur est imputable à un défaut de droits ou à un défaut de pouvoir.
Le cas de défaut de pouvoirs suppose que l’auteur a traité avec un mandataire qui n’avait pas les pouvoirs suffisants pour lui céder le bien. Si l’auteur, en acquérant ce bien a été victime d’une erreur « légitime » qui lui a fait croire que son interlocuteur avait des pouvoirs suffisants, la théorie bien connue du mandat apparent permet de valider cet acte, et, par voie de conséquence, l’aliénation subséquente intervenue au profit du sous-acquéreur.
De même, si l’auteur a traité avec une personne qui agissait en son nom personnel mais qui n’avait pas les droits nécessaires pour faire l’acte, l’acte pourra être validé au nom de l’apparence. Il en irait ainsi, par exemple, du bail commercial accordé par un usufruitier sans l’accord du nu-propriétaire. Mais, dans ce cas, l’erreur « légitime » est plus difficile à faire admettre car la vérification des droits d’un partenaire qui agit en son nom propre est plus aisée que celle des pouvoirs d’un partenaire qui se présente comme mandataire. Si cette preuve peut néanmoins être rapportée, l’apparence valide, comme dans le cas précédent, le titre de l’auteur et met, par contrecoup, l’ayant cause à l’abri de la nullité.
Site « A. Bamdé et J. Bourdoiseau » : la nullité du contrat régime juridique, le critère de distinction entre nullité relative et nullité absolue, l’action en nullité (titularité de l’action et pouvoir du juge), prescription de l’action en nullité, l’étendue de la nullité (nullité partielle et nullité totale), les effets de la nullité (rétroactivité, restitutions et dommages et intérêts), la confirmation de l’acte nul (notion, domaine et régime).
DALLOZ – Documentation/Répertoire de droit civil : Nullité