La mise en cause d’un dirigeant en responsabilité pour insuffisance d’actif nécessite la réunion de quatre conditions :
La responsabilité pour insuffisance d’actif concerne, en premier lieu, les personnes morales de droit privé (y compris donc le dirigeant d’une association loi de 1901). Ceci exclut donc du domaine de cette action, les personnes morales de droit public.
Les sociétés d’économie mixte sont considérées comme des personnes morales de droit privé.
Cette sanction ne peut trouver à s’appliquer aux associés n’ayant pas la qualité de dirigeant (associés ou actionnaires par exemple), sauf à démontrer qu’ils ont agi comme des dirigeants de fait.
A noter que la responsabilité pour insuffisance d’actif ne peut être engagée contre :
Sont visés par l’article L. 651-2 du Code de commerce, tous les dirigeants de droit ou de fait, rémunérés ou non rémunérés, d’une personne morale de droit privé.
La responsabilité pour insuffisance d’actif peut atteindre tous les dirigeants sociaux qui exerçaient leurs fonctions au jour du prononcé de la liquidation judiciaire de la personne morale, ainsi que ceux qui n’étant plus en fonction à cette date, ont pendant leurs mandats commis des fautes de gestion.
Peu importe le fait que la mauvaise situation de la personne morale préexistait à l’entrée en fonction du dirigeant poursuivi.
L’irrégularité de la nomination du dirigeant restera sans influence sur la possibilité de prononcer la sanction.
Les textes visent tous les dirigeant de droit titulaires d’un pouvoir de décision :
Le dirigeant de complaisance (prête-nom, homme de paille) n’échappe pas à sa responsabilité sous prétexte qu’il n’assurait pas lui-même la gestion effective de la société, celle-ci étant assurée par un dirigeant de fait.
De même, le fait d’être dirigeant bénévole ne l’exonère pas de sa responsabilité (Cour de cassation, chambre commerciale du 09/12/2020, n° 18-24730).
En revanche, les membres du conseil de surveillance ne disposant pas de pouvoir de gestion, ne sont pas visés par les textes, sauf s’il est démontré leur qualité de dirigeant de fait.
Si le dirigeant est une personne morale, elle est représentée par une personne physique, qui est qualifiée de représentant permanent, et qui est soumis aux mêmes conditions et obligations et qui encourt les mêmes responsabilités civile et pénale que s’il était administrateur en son nom propre, sans préjudice de la responsabilité solidaire de la personne morale qu’il représente (article L. 225-20 du Code de commerce).
En application de l’article L. 651-1 du Code de commerce, la sanction de la responsabilité pour insuffisance d’actif s’applique à ce représentant permanent.
Il conviendra, toutefois, de distinguer, sa responsabilité de celle encourue en qualité de mandataire de la société représentée, notamment s’il a entièrement obéi aux directives de celle-ci. Dans ce cas, la responsabilité de la personne morale pourra être recherchée, c’est pourquoi la décision prononçant une condamnation à combler l’insuffisance d’actif peut créer une solidarité légale entre la personne morale administrateur et son représentant permanent.
Ce représentant permanent peut aussi être condamné au titre de sa responsabilité pour insuffisance d’actif, sans mise en cause de la personne morale qu’il représente.
En revanche, il n’est pas possible de condamner, le dirigeant de la personne morale dirigeante, s’il n’a pas la qualité de représentant permanent.
A noter que, concernant les sociétés par actions simplifiées, l’article L. 227-7 du Code de commerce prévoit que le dirigeant peut être une personne morale. Dans ce cas, comme le précise ledit article, les dirigeants de ladite personne morale peuvent être condamnés à combler l’insuffisance d’actif, éventuellement solidairement avec cette même personne morale dirigeante (Cour de cassation, chambre commerciale du 09/09/2020, n° 18-12444).
Dans un arrêt la chambre commerciale de la Cour de cassation, en date du 08/01/2002 (n° 98-17439), a retenu la responsabilité d’une commune, en sa qualité de dirigeante d’une société d’économie mixte, en confirmant la compétence du tribunal de commerce pour prononcer une telle sanction.
Les textes sanctionnent également le dirigeant de fait de la personne morale.
Au regard de la jurisprudence, le dirigeant de fait est la personne qui exerce, directement ou par personne interposée (Cour de cassation, chambre commerciale du 20/04/2017, n° 15-10425 – du 21/11/2018, n° 17-22433 – 09/06/2022, n° 19-24026) :
La qualification de dirigeant de fait nécessite donc une immixtion répétée dans la gestion, se traduisant par des actes positifs, faits en toute indépendance.
Le juge doit donc, en premier lieu, déterminer si l’acte effectué par la personne non dirigeante, est un acte positif, c’est-à-dire, engageant la société. Ainsi, un acte de surveillance, de contrôle ou de conservation n’est pas un acte positif.
Voici quelques situations qui démontrent l’existence d’une activité positive, si les actes sont répétés et exécutés par des personnes n’ayant aucun lien de subordination avec un dirigeant de droit :
Le juge doit ensuite démontrer que ces actes positifs ont été accomplis en toute indépendance, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas été accomplis en vertu d’un mandat donné par le dirigeant de droit. Ainsi, un salarié (directeur administratif, commercial, financier ou des ressources humaines), en principe, n’agit que par rapport à un lien de subordination.
Toutefois, la qualité de salarié n’exclut pas la reconnaissance de la qualité de dirigeant de fait dès lors qu’il est démontré que le salarié n’était soumis à aucun lien de subordination et aucun contrôle hiérarchique (Cour de cassation, chambre commerciale du 06/10/2009, n° 08-15378).
Rappelons qu’il appartient au demandeur à l’action de démontrer la direction de fait.
L’aveu retenu dans le cadre d’une instance ne peut cependant être suffisant, la direction de fait étant une question de droit sur laquelle ne peut porter l’aveu. L’aveu ne pourra donc être pris en compte que comme éléments s’ajoutant à la démonstration d’actes positifs de gestion (Cour de cassation, chambre commerciale du 05/10/2022, n° 21-14770).
Pour un exemple de motivation, se reporter à l’arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale du 21/11/2018, n° 17-22433.
Le dirigeant retiré peut être poursuivi en responsabilité pour insuffisance d’actif, mais seulement au regard de l’insuffisance d’actif existant au jour de son retrait. Il appartient donc au liquidateur ou au ministère public d’évaluer cette insuffisance d’actif au jour du retrait du dirigeant.
Il en résulte que le dirigeant qui a cessé ses fonctions sociales avant la cessation des paiements de la personne morale, ne peut être poursuivi en comblement de l’insuffisance d’actif.
La situation à prendre en compte est celle à la date où le dirigeant concerné a effectivement cessé ses fonctions (Cour de cassation, chambre commerciale du 05/05/2021, n° 19-18207) et ceci même en l’absence de formalités de publicité, sauf, évidemment, si le dirigeant a continué à exercer une direction de fait.
La responsabilité pour insuffisance d’actif trouve à s’appliquer à un dirigeant décédé, avant ou après l’ouverture de la liquidation judiciaire de la personne morale.
En conséquence, ses héritiers (au regard de l’acceptation de la succession) ou son conjoint commun en biens seront tenus de payer le montant de l’insuffisance d’actif mis à sa charge.
Lorsque la liquidation judiciaire a été ouverte ou prononcé à raison de l’activité d’un entrepreneur à responsabilité limitée à laquelle un patrimoine est affecté, le tribunal peut, dans les mêmes conditions qu’un dirigeant de personne morale, condamner cet entrepreneur à payer tout ou partie de l’insuffisance d’actif. La somme mise à sa charge s’impute sur son patrimoine non affecté.
De même, la responsabilité pour insuffisance d’actif, trouve à s’appliquer à l’entrepreneur individuel (3ième alinéa de l’article L. 651-2 du Code de commerce) pour lequel, seul, son patrimoine professionnel a été mis en liquidation judiciaire (nouvelle disposition applicable à compter du 15/805/2022, distinguant le patrimoine professionnel et le patrimoine personnel), s’il a commis des fautes gestion contribuant à l’insuffisance d’actif. L’entrepreneur individuel peut alors être condamné à payer tout ou partie de l’insuffisance d’actif sur son patrimoine personnel.
Le préjudice permettant l’ouverture de l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif est constitué par le montant de cette insuffisance, que tribunal a l’obligation de fixer avec précision.
Il a noté, que pour déterminer le montant de ladite insuffisance il n’est pas nécessaire que la vérification des créances soit terminée au jour de l’engagement de l’action, celle-ci étant alors déterminée au regard des dettes certaines non contestées.
La Cour de cassation admet, même, que la démonstration soit faite au regard du seul passif privilégié vérifié (Cour de cassation, chambre commerciale du 05/11/2013, n° 15-22510).
Les juges fixent l’insuffisance d’actif au moment où ils statuent, en prenant en compte l’ensemble des éléments, exerçant une influence sur son évaluation (par exemple : décision définitive concernant une contestation de créance, cession d’un actif de la personne morale).
Il est admis que les juges peuvent décider de surseoir à statuer, dans l’attente, par exemple, d’une décision concernant la fixation d’une créance importante contestée.
Si le dirigeant a cessé ses fonctions avant l’ouverture de la liquidation judiciaire, il convient de rechercher si, à cette date, une insuffisance d’actif existait déjà (Cour de cassation, chambre commerciale du 24/03/2021, n° 20-10677). A défaut aucune condamnation ne pourra être prononcée à l’encontre de ce dirigeant et ceci même en présence d’une faute de gestion. Il s’agit ici d’appliquer le principe, en droit civil, qu’une faute n’est condamnable qu’à partir du moment où elle crée un préjudice.
Cette position de la Cour de cassation peut paraître critiquable, car une faute de gestion d’un dirigeant, si elle n’a pas de conséquence au jour où le dirigeant cesse ses fonctions, elle peut engendrer postérieurement une insuffisance d’actif.
De même, en cas de succession de dirigeants, la condamnation du nouveau dirigeant supposera une insuffisance d’actif apparue sous la direction du dirigeant dont la responsabilité est recherchée. La condamnation ne pourrait être prononcée pour un montant supérieur à l’insuffisance d’actif créée sous la direction de la personne recherchée en responsabilité (Cour de cassation, chambre commerciale du 17/12/2013, n° 12-25519).
L’insuffisance d’actif résulte de la différence entre le passif non contesté et l’actif résultant de la réalisation des biens de la personne morale ainsi que toutes sommes détenues par le liquidateur à la suite d’encaissements, recouvrement de créances et actions de quelque nature qu’elles soient.
Faute de procéder à la comparaison entre le montant du passif admis et le montant des réalisations d’actifs, le tribunal n’établit pas l’insuffisance d’actif au jour où elle statue (Cour de cassation, chambre commerciale du 23/04/2013, n° 12-12231).
Il suffit que le montant de l’insuffisance d’actif soit déterminable, sans que les juges aient à justifier de l’existence d’une ordonnance du juge-commissaire arrêtant l’état définitif des créances.
Le montant total de l’insuffisance d’actif sert de limite au montant de la condamnation.
Comme nous l’avons indiqué ci-dessus, l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif est recevable même si les opérations de vérification du passif ne sont pas terminées, il suffit que l’insuffisance d’actif soit certaine.
Pour en déterminer le montant le liquidateur :
En résumé, si le montant des créances vérifiées et admises, est supérieur aux réalisations d’actifs, la différence constitue l’insuffisance d’actif. L’insuffisance d’actif ne peut donc comprendre des créances contestées, et pour lesquelles, au jour où le tribunal statue, une décision définitive n’est pas encore intervenue.
Concernant la dispense de vérification le juge pourra modifier sa décision, qui n’a pas un caractère juridictionnel (Cour de cassation, chambre commerciale du 17/09/2013, n° 12-30158) au vu d’une requête formule par le liquidateur (Cour de cassation, chambre commerciale du 05/11/2013, n° 12-22510).
La preuve de l’insuffisance d’actif doit être apportée par le demandeur à l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif.
Pour justifier son action, le liquidateur se fonde sur tous les éléments dont il dispose, et plus particulièrement les déclarations de créances effectuées par les créanciers, en examinant l’ancienneté de la dette.
Le dirigeant recherché en responsabilité pouvant contester le caractère certain d’une dette ou la non-prise en compte d’un actif à réaliser.
L’action en comblement de passif ayant pour objet, de sanctionner le comportement antérieur du dirigeant au jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire de la personne morale ou de l’entrepreneur individuel, il en résulte que seules les fautes de gestion antérieures audit jugement peuvent être prises en compte, qu’il s’agisse d’une ouverture ou d’une conversion.
Ainsi, en cas de résolution d’un plan de continuation, la Cour de cassation dans un arrêt de la chambre commerciale du 22/01/2020 (n° 18-17030) a jugé que :
« …ni le jugement ouvrant le redressement judiciaire, ni celui arrêtant le plan de redressement n’exonèrent le dirigeant social de sa responsabilité et que les fautes de gestion commises pendant la période d’observation du redressement judiciaire, comme pendant l’exécution du plan, peuvent être prises en considération pour fonder l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif dès lors qu’elles sont antérieures au jugement de liquidation judiciaire ».
Il en résulte, que pour fonder son action en responsabilité pour insuffisance d’actif, le liquidateur pourra retenir les fautes commises :
L’arrêté du plan de redressement (ou de sauvegarde) ne doit pas constituer un mécanisme de purge des fautes, puisqu’il est interdit d’agir en responsabilité pour insuffisance d’actif avant sa résolution et le prononcé de la liquidation judiciaire.
La faute, doit se rattacher à la gestion et résulter d’une décision engageant la personne morale pour l’avenir, le juge du fond disposant d’un pouvoir souverain pour l’apprécier.
Ainsi, la sous-capitalisation de la société lors de sa constitution (société à 1 euro) n’est pas une faute de gestion, au mieux, c’est une faute du fondateur, ou de l’associé (Cour de cassation, chambre commerciale du 17/06/2020, n° 19-10341).
De même, la reconstitution des capitaux propres en cas de pertes est le fait des associés.
L’absence de régularisation dans le délai légal est imputable aux actionnaires et n’est pas une faute de gestion (Cour de cassation, chambre commerciale du 13/10/2015, n° 14-15755).
En revanche, si les apports de fonds sont le fait des associés, ce sont bien les dirigeants qui doivent convoquer l’assemblée pour solliciter les associés. Ne pas tenter d’obtenir l’augmentation de capital lorsqu’elle s’avère nécessaire à la survie de la société est une faute de gestion (Cour de cassation, chambre commerciale du 12/07/2016, n° 14-23310).
Un autre exemple, l’arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale du 08/04/2021, n° 19-23669, concernant la distribution de dividendes, engageant la responsabilité du gérant.
Le dirigeant ne saurait s’exonérer de sa faute en invoquant :
Désirant faire une distinction entre faute légère et la faute lourde, la loi du 09/12/2016 a modifié l’article L. 651-2 du Code de commerce est précisant que « toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la personne morale, sa responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée ».
A noter que l’exclusion de la responsabilité pour insuffisance d’actif, en cas de négligence, est également applicable à l’entrepreneur ayant opté pour l’EIRL et à l’entrepreneur individuel bénéficiant du nouveau statut..
Ainsi, pour mettre en jeu la responsabilité d’un dirigeant ou d’un entrepreneur individuel le juge doit opérer une double démonstration concernant la faute de gestion :
Dans sa décision de condamnation, le juge doit donc prendre soin de vérifier que le manquement reproché, bien que fautif, ne constitue pas une simple négligence.
Ainsi, dans un arrêt du 09/07/2020, la Cour d’appel avait retenu que le fait d’engager la société « dans une activité reposant sur un seul client sans trouver de moyen de garantir la pérennité des relations commerciales » constitue une faute du gérant. La Cour d’appel à admis de s’interrogr sur la gravité de cette faute et sur sa qualification éventuelle de simple négligence.
Par un arrêt du 13/04/2022 (n° 20-20137), la Cour de cassation infirme cette décision en précisant qu’ « en statuant par de tels motifs tirés seulement d’un manque de vigilance de M. [P], impropres à établir que celui-ci aurait commis une faute de gestion non susceptible d’être analysée en une simple négligence, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».
Le juge peut motiver sa décision concernant la gravité de la faute de gestion en indiquant par exemple :
« Cette faute de gestion, qui a engendré une aggravation du passif, laquelle en raison de son importance n’a pas pu échapper à la vigilance du dirigeant, ne peut en l’absence de réaction, s’analyser comme une simple négligence, mais caractérise une véritable faute de gestion ».
Les fautes de gestion qui peuvent être retenues contre le dirigeant sont diverses et variées. Toutefois, une faute de gestion ne pourra être retenue que s’il est démontré qu’elle a contribué à la création ou à l’augmentation de l’insuffisance d’actif.
Voici quelques exemples de fautes retenues par la jurisprudence comme étant des fautes de gestion. Il est à noter que la faute de gestion peut consister aussi bien en une faute d’action qu’en une faute d’omission (manque de vigilance). Il n’est pas nécessaire que soient réunis les critères de la faute lourde.
Toute faute de gestion pourra être retenue dès lors qu’elle s’inscrit dans un rapport de causalité avec l’insuffisance d’actif. :
Si le comportement du dirigeant en matière de gestion de l’entreprise constitue une infraction pénale, la faute de gestion sera assurément caractérisée (banqueroute articles L. 654-1 à L. 654-7). Ainsi, sont des fautes de gestion le fait d’avoir:
Le fait d’avoir réalisé des investissements sans capitaux propres pour développer une technologie nouvelle dont la rentabilité ne devait être assurée que dans un délai incertain, les dirigeants n’ayant produit aucune analyse sérieuse sur la rentabilité à terme de leur projet dont la réalisation s’est traduite par un passif important créé en moins de 18 mois.
Le fait de faire contracter des engagements financiers insupportables.
Le fait de mettre en place des moyens de gestion inadaptés.
Le fait d’accepter des commandes et les acomptes correspondants, à une époque où la société n’est manifestement plus en mesure de les honorer (Cour de cassation, chambre commerciale du 24/03/2015, n° 14-10354).
Le fait pour un dirigeant de droit de laisser la gestion à un dirigeant de fait.
Le fait de n’avoir pris aucune mesure à la suite d’une procédure d’alerte déclenchée par le commissaire aux comptes.
Le non-respect de la législation fiscale constitue une faute de gestion rendant possible la condamnation à combler le passif. Il en est ainsi par exemple de l’absence de déclaration régulière des charges fiscales, ayant entraîné des taxations d’office ou des pénalités de retard.
Le non-respect de la législation sociale constitue également une faute de gestion rendant possible la condamnation à réparer l’insuffisance d’actif. Il en ainsi par exemple de l’absence de déclaration régulière des charges sociales, ayant entraîné des taxations d’office ou de pratique du travail dissimulé ayant entraîné des condamnations.
Le lien de causalité dans ces cas, est constitué non pas par le non-paiement de l’impôt ou des cotisations, mais par les charges engendrées par cette faute de gestion.
En effet, le non-paiement d’une dette n’a pas pour conséquence une augmentation de l’insuffisance d’actif, puisque son règlement aura pour corollaire une aggravation de la trésorerie.
La situation serait différente si la faute de gestion du dirigeant a pour origine le fait d’avoir effectué des embauches inappropriées.
Le fait pour le dirigeant d’une société de céder à une banque, la veille du dépôt de bilan, l’intégralité de la trésorerie de la société, afin de permettre à une autre société du groupe d’obtenir un crédit.
Le fait pour le dirigeant de consentir un paiement préférentiel au profit d’un créancier alors qu’il connaissait l’état de cessation de paiements.
Le fait pour un dirigeant de s’octroyer une rémunération manifestement excessive au regard de la situation financière de la société.
Le fait de se rembourser son compte courant lorsque la société est dans une situation compromise (Cour de cassation, chambre commerciale du 24/05/2018, n° 17-10119).
La faute couramment retenue, pour justifier la responsabilité du dirigeant dans l’insuffisance d’actif, est l’absence de déclaration de cessation des paiements dans le délai prévu par l’article L. 631-4, à savoir dans les 45 jours qui suivent la cessation des paiements, si la société n’a pas dans ce délai, demandé l’ouverture d’une procédure de conciliation.
Dans un arrêt du 04/11/2014, n° 13-23070, la Cour de cassation énonce que la date de cessation des paiements à retenir pour constater la faute d’un retard est obligatoirement celle retenue par le jugement d’ouverture ou par le jugement de report.
Même, si dans le jugement d’ouverture il est mentionné qu’il s’agit d’une date provisoire, c’est celle-ci qu’il convient de prendre en compte, à défaut d’un jugement de report (Cour de cassation, chambre commerciale du 04/07/2018, n° 14-20117).
Contrairement à la faillite personnelle et autres mesures d’interdiction, il n’est pas nécessaire de démontrer que le dirigeant a omis sciemment de demander l’ouverture d’une procédure collective dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements.
Le juge doit justifier :
S’agissant de la faute de gestion commise par un EIRL ou un entrepreneur individuel relevant du statut issu de la loi du 14 février 2022, sa caractérisation ne devrait pas présenter de grandes particularités par rapport à celle des dirigeants de personnes morales.
En pratique, il est fort probable que la faute de gestion sera beaucoup plus facilement retenue à son égard. En effet, concernant spécifiquement l’EIRL, la loi elle-même fournit des directions où rechercher la faute de l’EIRL. Ainsi, l’avant-dernier alinéa de l’article L. 526-12 du Code de commerce prévoit déjà de sanctionner fortement l’EIRL qui ne respecte pas le jeu de l’affectation patrimoniale. Celui qui frauderait les droits des tiers, méconnaîtrait ses obligations comptables ou d’affectation serait responsable sur la totalité de ses biens, indépendamment de leur affectation patrimoniale. De tels comportements pourraient au minimum constituer une faute de gestion.
Par exemple, c’est à l’EIRL de déterminer les revenus qu’il prélève de son patrimoine affecté vers le patrimoine non affecté (Code de commerce, article. L. 526-18). On peut supposer qu’un prélèvement excessif sera qualifié de faute de gestion.
Concernant l’entrepreneur individuel relevant du nouveau statut, il n’existe pas de telles dispositions : la composition de chacun des patrimoines ne dépend pas d’une volonté exprimée par leur titulaire, mais du lien de chacun des éléments constitutifs avec l’activité professionnelle ou non. En conséquence, c’est en cas de litige au cas par cas qu’il faudra déterminer par quelle catégorie de créancier quel bien pourra être appréhendé. Il n’y a donc pas techniquement de risque de non-respect de l’autonomie de chacun des patrimoines.
De manière plus générale, l’EIRL comme l’entrepreneur individuel relevant de la loi du 14 février 2022 restent des entrepreneurs individuels, dont on peut craindre qu’ils soient moins aguerris et rigoureux que des dirigeants sociaux chevronnés ; dès lors, il risque d’être fréquent de pouvoir leur reprocher une gestion approximative de leur entreprise, et donc une faute de gestion. Le propos est néanmoins à nuancer depuis l’introduction de la notion de simple négligence, dont on peut imaginer qu’elle sera plus volontiers appliquée à l’entrepreneur individuel.
Un dirigeant de la personne morale en cessation des paiements ne peut être condamné à supporter personnellement l’insuffisance d’actif de celle-ci que si la faute de gestion qui lui est reprochée est en rapport de causalité avec le préjudice, c’est-à-dire avec l’insuffisance d’actif.
Si la preuve du lien de causalité est ainsi exigée, il n’est nullement demandé de prouver que la faute de gestion a été la cause unique de l’insuffisance d’actif, il suffit que la faute de gestion ait contribué à l’insuffisance d’actif, sans qu’il soit nécessaire de déterminer quelle part de l’insuffisance est imputable à cette faute (Cour de cassation, chambre commerciale du 25/03/2020, n° 18-21841).
Le dirigeant peut donc être déclaré responsable pour le tout, même si la faute de gestion n’est que l’une des causes de l’insuffisance d’actif et ne justifie qu’une partie de cette insuffisance.
Concernant ce lien de causalité, souvent difficile à démontrer, prenons l’exemple de la rédaction d’un arrêt de la Cour d’appel de GRENOBLE qui a été désignée par le Cour de cassation, après le rejet d’un arrêt de la Cour d’appel de CHAMBERY pour absence de justification du lien existant entre la faute de gestion et l’insuffisance d’actif.
Cette analyse de l’arrêt constitue une aide à la rédaction d’un jugement de responsabilité pour insuffisance d’actif.
« 1°/La Cour d’appel détermine avec précision le montant de l’insuffisance d’actif
La SARL SDMC a fait l’objet d’une liquidation judiciaire par jugement du 10 juillet 2012, le passif admis s’élève à la somme de 4 249 328,78 euros de laquelle il convient de soustraire la somme de 682 292,44 euros au titre de l’actif réalisé portant l’insuffisance d’actif dans cette procédure à hauteur de la somme de 3 667 036,34 euros.
Pino Z en sa qualité de gérant de cette société peut dès lors être recherché pour sa contribution à cette insuffisance d’actif pour ses fautes de gestion ayant contribué à ce passif.
2°/La Cour d’appel précise en quoi la faute de gestion a eu une incidence sur l’insuffisance d’actif, sans qu’il soit nécessaire d’en déterminer un montant précis.
En l’espèce, il est constant que pour l’année 2011, la SARL SDMC a été privée d’éléments comptables, faute de paiement des factures émises par le comptable de la société.
Le défaut de paiement du comptable de la société par le gérant entraînant le défaut de comptabilité, soit la privation d’un outil de gestion particulièrement nécessaire compte tenu justement des difficultés économiques de la SARL SDMC à cette date constitue un manquement à l’obligation de l’article L123-12 du code de commerce incombant à Pino Z en sa qualité de dirigeant et dès lors une faute de gestion au sens de l’article susvisé et de nature à générer une augmentation du passif en l’absence d’éléments comptables portés à la connaissance du gérant de nature à lui permettre de procéder à une gestion adaptée de la société.
Il est constant que les cotisations sociales et personnelles obligatoires et facultatives de Pino Z ont été payées par la SARL SDMC et à hauteur de la somme en moyenne de 20 000 euros pour les années 2008, 2009 et 2010 outre des prélèvements personnels du gérant de 112 000 euros pour l’exercice 2008, constituant des fautes de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif et à hauteur de ces sommes.
Le jugement d’ouverture du redressement judiciaire en date du 16 juin 2012, fixe la date de cessation des paiements, non contestée au 1er janvier 2011, justifiant de l’absence de déclaration de l’état de cessation des paiements dans le délai de 45 jours reprochée à Pino Z étant précisé que le redressement judiciaire a été ouvert suite à une assignation de l’URSSAF compte tenu d’impayés et non pas suite à une déclaration du gérant.
Cette faute de gestion est à l’origine d’une insuffisance d’actif compte tenu de l’augmentation du passif de la société entre le 1er janvier 2011 et le 16 juin 2012.
Le défaut de paiement des cotisations URSSAF à compter de juin 2011 au vu de la déclaration de créance du créancier saisissant ne peut non plus être justifié par les difficultés économiques de la société et est de nature à entraîner des majorations de retard et des pénalités et constitue donc une faute de gestion ayant nécessairement contribué à l’augmentation de l’insuffisance d’actifs.
Le défaut de paiement des loyers afférents à deux des trois baux commerciaux et ayant entraîné la résiliation de ces deux baux portant l’un sur un hangar et l’autre sur un terrain ne peut non plus être justifié par les difficultés économiques de la société.
Ce manquement constitue une faute de gestion grave dans la mesure où il a entraîné la perte d’une partie de l’outil de travail de la société, de nature à remettre en cause son activité et a également nécessairement occasionné de nombreux frais de procédure et a ainsi contribué à l’augmentation de l’insuffisance d’actif.
Il est constant que la SARL SDMC n’était plus viable depuis 2008, dans son rapport de gestion en date du 31 décembre 2008, Pino Z constate une perte de 366 420,75 euros, l’accès difficile aux appels d’offres des marchés publics, une baisse des prix de marché de 20 % et une dette fournisseur de 1 665 828 euros et alors que les charges d’exploitation s’élèvent à la somme de 6 487 935 euros et le total des produits s’élève à la somme de 6 121 515 euros.
La poursuite d’une activité déficitaire est dès lors caractérisée et a contribué à l’augmentation de l’insuffisance d’actif au vu des nombreuses dettes établies postérieures à cette date.
Il est constant que la SARL SDMC a omis de réunir une assemblée générale alors qu’elle avait perdu au cours de l’année 2010 plus de la moitié de ses capitaux propres contrevenant aux dispositions de l’article L223-42 du code de commerce, constituant une faute de gestion.
3°/ La Cour d’appel apprécie, au regard des éléments dont elle dispose, le montant de la condamnation du gérant.
Le nombre et la gravité des différentes fautes de gestion ci-dessus rappelées ainsi que l’important profit personnel dont a bénéficié le gérant justifie de faire droit à la demande de condamnation de Pino Z et à hauteur de la somme de 800 000 euros.
Le jugement contesté condamnant Pino Z au paiement de la somme de 2 000 000 euros sera par conséquent infirmé quant au quantum ».
Le dirigeant ne saurait s’exonérer ou se décharger de sa faute par :
L’article R. 651-1 du Code de commerce précise que c’est le tribunal qui a ouvert ou prononcé la procédure de liquidation judiciaire, qui est compétent.
L’article L. 651-3 alinéa 1 du Code de commerce énumère, exclusivement, deux catégories de personnes titulaires de l’action : le liquidateur ou le ministère public.
S’agissant du liquidateur, la Cour de cassation a précisé qu’il agissait alors en tant qu’organe de la procédure, et non en tant que représentant légal de la personne morale en liquidation judiciaire.
Il en résulte donc qu’un créancier individuel n’est pas recevable à intenter cette action.
L’article L. 651-3 2ième alinéa du Code de commerce octroie aux « créanciers contrôleurs », la possibilité d’une saisine, sous trois conditions :
Si le demandeur à l’action est soit le liquidateur, soit les contrôleurs, le tribunal est saisi par voie d’assignation (article R. 651-2 du Code de commerce), il convient en conséquence de faire application de l’ensemble des textes du Code procédure civile qui régissent, en particulier, d’une part l’introduction d’une instance par voie d’assignation (articles 751 à 755) et d’autre part la signification par huissier (articles 653 à 664-1).
Il en résulte, que l’assignation est régulière si elle a été délivrée dans les conditions de l’article 659 du Code de procédure civile, dès lors qu’il est relevé que l’huissier de justice s’était rendu à la dernière adresse connue du dirigeant, figurant au registre du commerce et des sociétés et qu’il a effectué toutes les démarches nécessaires pour obtenir une autre adresse.
Si la demande émane du ministère public, le tribunal est saisi dans les formes prévues et selon la procédure institué par l’article R. 631-4 du Code de commerce, à savoir :
Les débats se déroulent, en principe, en audience publique. Toutefois, le président du tribunal peut accepter, sur la seule demande du débiteur, que les débats aient lieu en chambre de conseil (article L. 662-3 alinéa 2 du Code de commerce).
Afin de s’assurer que le dirigeant est solvable, et d’agir au mieux des intérêts des créanciers, en application de l’article L. 651-4 du Code de commerce, le président du tribunal peut, d’office ou à la demande du liquidateur ou du ministère public, charger le juge-commissaire ou à défaut un autre membre de la juridiction qu’il désigne, d’obtenir des informations sur le patrimoine et les revenus du dirigeant ou de l’entrepreneur individuel.
Il ne s’agit pas, pour le juge désigné, de rechercher des faits démontrant la responsabilité du dirigeant ou de l’entrepreneur individuel, mais d’obtenir, uniquement des informations patrimoniales justifiant que des poursuites peuvent être engagées.
Pour obtenir ces informations, l’article L. 651-4 et R. 651-5 du Code de commerce précise que le juge peut :
A noter que l’article L. 145 C du Livre des procédures fiscales permet au juge d’obtenir de l’administration fiscale, communication de tout document ou information sur la situation patrimoniale des dirigeants.
L’information du juge peut également résulter des rapports établis par les organes de la procédure ou s’appuyer sur des informations recueillies dans le cadre d’une instance pénale en cours.
Ces recherches d’informations sont nécessairement antérieures à la condamnation et même, de préférence, elles devraient s’effectuer avant l’assignation en responsabilité, et dans un délai proche de l’ouverture de la liquidation judiciaire, afin d’éviter l’application de la prescription.
Le juge désigné établi un rapport (article R. 651-5 alinéa 1 du Code commerce).
Le rapport est déposé au greffe et communiqué par le greffier au ministère public, cette communication étant d’ordre public.
Au moins un mois avant la date de l’audience traitant de la responsabilité du dirigeant, le greffier communique ce rapport au dirigeant ou à l’entrepreneur par LRAR. La non-communication du rapport constitue une cause de nullité du jugement.
L’article R. 651-5 précise également que « le tribunal statue sur le rapport du juge désigné après avoir entendu ou dûment appelé les contrôleurs ».
Il s’agit d’une mesure dont il est difficile d’en comprendre l’utilité. En effet, d’une part que signifie statuer, alors que le tribunal n’a aucune décision à prendre si ce n’est de constater le dépôt du rapport et que d’autre part, le dirigeant ou l’entrepreneur individuel concerné n’est pas convoqué à cette audience. Enfin, l’absence de cette formalité ne semble entrainer aucune conséquence.
Comme le précise l’article R. 662-12, « Le tribunal statue sur rapport du juge-commissaire sur tout ce qui concerne la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires, l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif, la faillite personnelle ou l’interdiction prévue à l’article L. 653-8 ».
Il importe donc de ne pas confondre le rapport du juge-commissaire et celui du juge commis.
En effet, contrairement au rapport du juge-commissaire le rapport du juge désigné est obligatoirement écrit, puisqu’il doit être communiqué au dirigeant ou à l’entrepreneur individuel, un mois avant l’audience.
Il en résulte donc, que si le président désigne le juge-commissaire en qualité de juge chargé de recueillir des informations patrimoniales sur le dirigeant ou l’entrepreneur individuel, celui-ci devra rédiger deux rapports distincts :
L’action en responsabilité, pour insuffisance d’actif est prescrite par 3 ans à compter du jugement qui prononce la liquidation judiciaire, que ce soit lors de l’ouverture ou de la conversion, et peu importe que ce jugement soit frappé d’appel (article L. 651-2 alinéa 4 du Code de commerce).
Il s’agit ici d’un délai de prescription et non de procédure, de sorte que l’article 642 du Code de procédure civile est inapplicable (intervention du dimanche, des jours fériés…).
Par contre, l’ancienneté des faits reprochés est sans importance pour l’appréciation du délai de prescription.
L’absence de solidarité de plein droit entre les dirigeants emporte comme conséquence que l’action engagée dans le délai légal contre l’un d’entre eux n’interrompt pas la prescription à l’égard des autres (Cour de cassation, chambre commerciale du 07/11/2006, n° 05-16693).
La prescription ne peut être relevée d’office par le juge (Cour de cassation, chambre commerciale du 30/01/2007, n° 05-17466).
Il appartient au demandeur d’apporter la preuve que les conditions de la responsabilité du dirigeant sont réunies ,à savoir :
Comme pour tout litige, rien n’interdit au demandeur de faire préciser sa demande en sollicitant du tribunal qu’il désigne un expert aux fins d’apporter des éléments objectifs.
Le tribunal n’est pas tenu de prononcer une condamnation et il est libre d’en moduler le montant en fonction des divers éléments en sa possession.
Le juge peut ne pas prononcer de sanction pécuniaire à l’encontre du gérant au motif que celui-ci a fourni des efforts personnels importants pour tenter de sauver son entreprise, notamment par des apports de fonds personnels et par de multiples démarches.
L’action en responsabilité pour insuffisance d’actif diffère d’une action en responsabilité de droit commun en ce que le juge a la faculté, même après avoir retenu l’existence d’une faute de gestion commise par un dirigeant, de ne pas prononcer de condamnation ou de moduler le montant de la condamnation indépendamment du préjudice subi par les créanciers de la société en liquidation judiciaire (Cour de cassation, chambre commerciale du 12/06/2019, n° 17-23176).
Le juge du fond dispose d’un pouvoir souverain d’appréciation, concernant la condamnation du ou des dirigeants responsables, il suffit qu’il démontre la faute et le lien de causalité avec l’insuffisance d’actif.
Le juge ayant un libre pouvoir d’appréciation sur le montant de la condamnation, n’a pas l’obligation de faire correspondre le montant de la condamnation à la contribution de la faute de gestion dans le montant de l’insuffisance d’actif.
Il a même été jugé, qu’il ne statue pas ultra petita s’il prononce une condamnation supérieure à celle demandée par le liquidateur judiciaire.
Toutefois, il peut paraître équitable de décider, lorsque la faute de gestion n’est que très partiellement la cause du dommage, que la condamnation peut n’être que partielle.
La condamnation de plusieurs dirigeants peut être graduée, afin de tenir compte de la plus ou moins grande implication dans la réalisation du dommage ou encore de la plus ou moins grande expérience des affaires des dirigeants condamnés.
Mais, il n’y a aucune obligation dès lors que deux dirigeants ont commis ensemble les fautes, pour les juges du fond d’opérer entre eux une distinction (Cour de cassation, chambre commerciale du 09/05/2018, n° 16-26684). Deux dirigeants peuvent être condamnés ensemble pour un montant couvrant l’intégralité de la faute de gestion.
Le juge peut prononcer une condamnation solidaire, ou plus exactement une condamnation « in solidum », En principe la solidarité est contractuelle alors que la condamnation « in solidum » est délictuelle.
A noter que le juge peut prononcer d’office une condamnation solidaire.
L’article R. 661-1 du Code de commerce alinéa 2 précise que ne sont pas exécutoires de plein droit les jugements rendus en application des articles L. 651-2 et L. 653-8 du Code commerce.
Faut-il comprendre que le texte interdit l’exécution provisoire, ou le juge a-t-il la possibilité de la prononcer ?
Concernant la faillite personnelle et l’interdiction de gérer (article L. 653-8 du Code commerce), l’article L. 653-11 du Code commerce, donne la réponse à cette interrogation en précisant que le juge peut ordonner l’exécution provisoire de sa décision. Concernant l’article L. 651-2 les textes sont muets.
Si l’article L. 653-8 du Code de commerce donne la possibilité au juge d’ordonner l’exécution provisoire de sa décision, en ce qui concerne la faillite personnelle et l’interdiction de gérer, il convient d’en déduire que l’article R. 661-1 ne constitue donc pas une obligation qui s’impose au juge, et qu’il a donc la possibilité de prononcer une condamnation, avec exécution provisoire, au titre de la responsabilité pour insuffisance d’actif.
Toutefois, aucune jurisprudence ne confirme ma position, sauf à préciser que la Cour d’appel d’Aix-en-Provence semble admettre une condamnation, avec exécution provisoire, pour cette sanction prononcée par le tribunal de commerce.
Il est possible d’admettre, en application de l’article 515 alinéa 2 du Code de procédure civile, que la décision de condamnation du dirigeant pour insuffisance d’actif, puisse être exécutoire que pour une partie.
A défaut d’autre indication et en application de l’article R. 661-1 du Code de commerce, le jugement n’est pas exécutoire de plein droit, il en résulte que l’appel suspens l’exécution.
Si l’exécution provisoire est prononcée, l’appel ne peut être formulé que si le dirigeant à exécuter la condamnation.
L’appel est ouvert au parquet même s’il n’est pas partie principale.
La tierce opposition est également ouverte. Elle pourra être exercée par exemple par le conjoint commun en biens auquel sera signifiée la saisie de l’immeuble commun.
L’article L. 651-4 du Code de commerce dispose que :
« Le président du tribunal peut, dans les mêmes conditions, ordonner toute mesure conservatoire utile à l’égard des biens des dirigeants ou de leurs représentants visés à l’alinéa qui précède ou encore des biens de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée compris dans son patrimoine non affecté ou des biens, droits ou sûretés du patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel relevant du statut défini à la même section 3. Il peut maintenir la mesure conservatoire ordonnée à l’égard des biens du dirigeant de droit ou de fait en application de l’article L. 631-10-1 ».
Le président du tribunal, peut donc d’office ou à la demande du liquidateur ou du ministère public ordonner toute mesure conservatoire, sans que cette mesure constitue une prise de position de sa part, sur une éventuelle condamnation.
Les sommes versées par le dirigeant entrent dans le patrimoine de la société débitrice. La répartition de cette somme se fait, entre tous les créanciers, de manière exceptionnelle, non pas selon leur rang, mais proportionnellement à sa part dans le passif total (article L. 651-2 alinéa 4 du Code commerce).
A noter que l’article L. 651-3 précise que « les dépens et frais irrépétibles auxquels a été condamné le dirigeant, l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée ou l’entrepreneur individuel relevant du statut défini à la section 3 du chapitre VI du titre II du livre V sont payés par priorité sur les sommes versées pour combler le passif ».
Lorsque le dirigeant est en même temps créancier de la société débitrice, il ne pourra bénéficier de la répartition au marc le franc de la somme qu’il aura pu verser dans le patrimoine de la société.
Il s’agit ici d’une aide à la rédaction de ce type de jugement, qui nécessite une adaptation au cas particulier du dossier, chaque affaire présentant ses propres particularités.
En premier lieu il convient évidemment, comme pour tout jugement, de faire un exposé des faits et des prétentions respectives des parties et leurs moyens (article 455 du Code de procédure civile).
Cet exposé doit également faire ressortir, en détail, l’ensemble des éléments soulevés par les parties :
Exposé des motifs
1°/ Rappel des textes
L’article L651-2 du code de commerce dispose que lorsque la liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté en tout ou en partie par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion.
Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société sa responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée.
La SARL A… a fait l’objet d’une liquidation judiciaire par un jugement du –/–/—- qui fait apparaître une insuffisance d’actif.
Monsieur Z… en sa qualité de gérant et Monsieur … qualifié de gérant de fait de cette société peuvent donc être recherchés pour leur contribution à cette insuffisance d’actif pour les fautes de gestion ayant contribué à ce passif.
2°/ Motivation concernant un dirigeant de fait
Le dirigeant de fait est celui qui a eu, au sein d’une société, une activité positive de direction ou de gestion, exercée souverainement en en toute indépendance.
……….…Exposé des faits constituant une direction de fait
Ces actes établis en toute indépendance, et antérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire, constituent des faits précis de nature à caractériser une immixtion de celui-ci dans la gestion et la direction de la société, et démontrent que Monsieur W… a agi en qualité de gérant de fait, et ce depuis le –/–/—– et jusqu’au jour de l’ouverture de la liquidation judiciaire.
En conséquence et en application de l’article L. 651-2 du Code de commerce, Monsieur W… peut être condamné au titre de la responsabilité pour insuffisance d’actif.
3°/ Concernant l’insuffisance d’actif
En principe, l’insuffisance d’actif s’établit par la différence entre le montant du passif admis et le montant de l’actif de la personne morale débitrice, tel qu’il résulte des réalisations effectuées en liquidation.
Si, au jour où le tribunal statue, le passif n’est pas définitivement arrêté, il suffit qu’il présente un caractère certain. Dans ce cas, l’insuffisance d’actif est donc déterminée, par la différence entre le passif vérifié et l’actif réalisé.
L’état des créances antérieures au jugement d’ouverture de la procédure fait apparaître un passif de 7.203.284,31 euros dont 6.895.799,80 euros à titre définitif (qui exclut les créances rejetées, les créances contestées, les créances à échoir et les créances provisionnelles).
L’actif réalisé à ce jour est de 40.985,88 euros au titre d’une vente aux enchères (13160 euros), de recouvrements clients (27.644,83) euros et d’intérêts perçus (181,05 euros).
Il apparaît ainsi que l’insuffisance d’actif est au minimum égale à 6.854.813,92 euros.
Il y a lieu, éventuellement, d’examiner les contestations émises par le dirigeant concernant des créances comprises, d’après lui, à tort dans le passif définitif.
4°/ Concernant les fautes commises par le dirigeant
Exemple 1
Cette omission s’apprécie au regard de la seule date de la cessation des paiements fixée dans le jugement d’ouverture ou dans un jugement de report.
En l’espèce, la date de cessation des paiements de la société fixée provisoirement au 15/01/2021 par le jugement d’ouverture de la procédure collective du 09/02/2021 a été reportée au 09/08/2019 par jugement aujourd’hui définitif prononcé le 06/12/2022.
En ne déclarant pas cet état de cessation des paiements et en laissant l’URSSAF prendre l’initiative d’assigner sa société en procédure collective le 15/01/2016, Monsieur Z… et Monsieur W… ont donc commis une faute de gestion.
Or à la date du 09/08/2019, le passif exigible impayé ne s’élevait qu’à la somme de 35.309,31 euros de sorte que le retard pris pour admettre la société au bénéfice du redressement judiciaire a nécessairement aggravé la situation financière de celle-ci.
En outre, Monsieur Z… et Monsieur W…, au regard des résultats déficitaires depuis plusieurs exercices, des mises en demeures de l’URSSAF et de la situation débitrice au niveau bancaire de la société, avaient nécessairement conscience de l’état de cessation des paiements dans lequel celle-ci se trouvait déjà à cette époque et qu’une simple négligence de leur part ne saurait expliquer pareille carence.
En conséquence, ce grief constitue une faute de gestion, ayant contribué à l’insuffisance d’actif, relevant de la responsabilité de Monsieur Z… et de Monsieur W…
Exemple 2
Cette omission s’apprécie au regard de la seule date de la cessation des paiements fixée dans le jugement d’ouverture ou dans un jugement de report.
En l’espèce, la date de cessation des paiements a été fixée au 15/01/2021 par le jugement d’ouverture de la procédure collective du 09/02/2021.
Monsieur Z… disposant d’un délai de 45 jours pour procéder à la déclaration de cessation des paiements, fixée par le tribunal au 15/01/2016, il ne peut lui être imputé aucune faute, au regard de l’ouverture de la procédure collective, en date du 09/02/2021.
A l’ouverture de la procédure M. Z n’a remis au liquidateur aucun des documents comptables exigés par l’article L.123-12 du code de commerce malgré la mise en demeure qui lui avait été adressée le 24 mai 2021 et n’a finalement produit qu’à l’audience du tribunal de commerce le bilan arrêté au 30 juin 2022 en prétendant, sans jamais le démontrer, que la comptabilité de sa société était stockée sur l’ordinateur de sa secrétaire que celle-ci avait conservé.
Ce grief constitue, à l’encontre de Monsieur Z… et de Monsieur W… une faute de gestion, et ne peut se justifier par une simple négligence des dirigeants.
Il ressort des documents produits que la situation de la société A… était obérée depuis plusieurs années que :
Le fait, pour les dirigeant, de poursuivre l’activité dans ces conditions, constitue une faute de gestion au sens de l’article L. 651-2 du Code de commerce.
De plus, cette poursuite d’une activité déficitaire caractérisée a contribué à l’augmentation de l’insuffisance d’actif au vu des nombreuses dettes établies postérieures à cette date.
En revanche, l’analyse du bilan 2020 de la SARL A… fait apparaître pour l’exercice clos en 2020, des achats de marchandises pour 177 469 euros alors que le chiffre d’affaires se limite à 190 441 euros et le stock de marchandises à 30 000 euros.
Au cours de ses opérations d’inventaire effectuées le 9 mars 2021, l’huissier a détaillé un stock de marchandises dont il a estimé la valeur approximative à 5 000 euros seulement.
Ainsi que l’indique le mandataire judiciaire, la seule explication plausible sur le plan comptable à la disproportion entre les achats de marchandises, le chiffre d’affaires et les stocks inscrits en comptabilité et retrouvés lors de l’inventaire est que ces stocks aient bénéficié à des tierces personnes ou sociétés, M. Z… étant le gérant d’autres sociétés ou magasins.
Ce détournement est corroboré par le courrier adressé le 29 juillet 2021 au mandataire judiciaire par une salariée, laquelle indiquait que « M. Z est arrivé au magasin le 10 février 2021 vers 10h30, pour nous faire emballer la marchandise, pour la transférer dans l’un de ses nombreux magasins qui se trouvent à Augny ».
La cour rappelle que M. Z… avait déposé une déclaration de cessation des paiements quelques jours auparavant, le 5 février 2021.
Les explications de M. Z… dans ses dernières écritures selon lesquelles des salariés auraient pu détourner des marchandises à son insu ne sont pas sérieuses, compte tenu de l’ampleur et la durée des détournements de marchandises en question.
Par ailleurs, il y a également lieu de relever la disparition d’une trésorerie conséquente, disparition constatée au cours de la période d’observation : le mandataire judiciaire signale qu’il ignore ce qu’est devenue la somme de 83 485,54 euros qui se trouvait sur le compte bancaire de la BPCL le 14 septembre 2021, quelques jours avant le jugement de conversion en liquidation intervenu le 19 septembre 2021, la clôture du compte bancaire ne lui ayant permis d’encaisser que la somme de 2 773,23 euros.
Dans ses dernières écritures, M. Z est totalement taisant quant à la destination de ces fonds, de sorte que le détournement est avéré.
Ce détournement de la trésorerie et ce détournement d’une partie du stock ont nécessairement contribué à aggraver le passif de la société, car les achats conséquents de marchandises ont occasionné des dettes nouvelles et les détournements de stocks et des liquidités ont diminué l’actif au détriment des créanciers de l’entreprise.
Il est constant que Monsieur Z.. a été gérant de la SARL A… depuis la création de la société et Monsieur W…gérant de fait également depuis la création de la SARL A…
Il n’est pas contesté que les cotisations URSSAF des salariés de la société n’ont pas été versées. Or, le non-versement de ces cotisations ne saurait s’analyser comme une simple négligence dans la mesure où celles-ci sont obligatoires et que la société a nécessairement reçu les appels de cotisation.
Le défaut de paiement des cotisations URSSAF est de nature à entraîner des majorations de retard et des pénalités et constitue donc une faute de gestion ayant nécessairement contribué à l’augmentation de l’insuffisance d’actif.
5°/ Sur la condamnation de Monsieur Z… et de Monsieur W…
Il résulte des motifs susvisés que Monsieur Z… et Monsieur W… ont commis de multiples et graves fautes qui ont, chacune, aggravé l’insuffisance d’actif de la SARL A…
Au regard des éléments produits sur les fautes et leur incidence sur l’insuffisance d’actif, le tribunal est en mesure de fixer à …… le montant de la condamnation, in solidum, de Monsieur Z… et de Monsieur W… .
PAR CES MOTIFS
…
CONDAMNE in solidum Monsieur Z… et Monsieur W… à payer à Maitre ….., ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL A…, la somme de ……. au titre de l’insuffisance d’actif.
Article L. 651-1
« Les dispositions du présent chapitre sont applicables aux dirigeants d’une personne morale de droit privé soumise à une procédure collective, ainsi qu’aux personnes physiques représentants permanents de ces dirigeants personnes morales, aux entrepreneurs individuels à responsabilité limitée et aux entrepreneurs individuels relevant du statut défini à la section 3 du chapitre VI du titre II du livre V ».
Article L. 651-2
« Lorsque la liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la personne morale, sa responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée. Lorsque la liquidation judiciaire concerne une association régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou, le cas échéant, par le code civil applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle et non assujettie à l’impôt sur les sociétés dans les conditions prévues au 1 bis de l’article 206 du code général des impôts, le tribunal apprécie l’existence d’une faute de gestion au regard de la qualité de bénévole du dirigeant.
Lorsque la liquidation judiciaire a été ouverte ou prononcée à raison de l’activité d’un entrepreneur individuel à responsabilité limitée à laquelle un patrimoine est affecté, le tribunal peut, dans les mêmes conditions, condamner cet entrepreneur à payer tout ou partie de l’insuffisance d’actif. La somme mise à sa charge s’impute sur son patrimoine non affecté.
Lorsque la liquidation judiciaire a été ouverte ou prononcée à l’égard d’un entrepreneur individuel relevant du statut défini à la section 3 du chapitre VI du titre II du livre V du présent code, le tribunal peut également, dans les mêmes conditions, condamner cet entrepreneur à payer tout ou partie de l’insuffisance d’actif. La somme mise à sa charge s’impute sur son patrimoine personnel.
L’action se prescrit par trois ans à compter du jugement qui prononce la liquidation judiciaire.
Les sommes versées par les dirigeants ou l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée entrent dans le patrimoine du débiteur. Elles sont réparties au marc le franc entre tous les créanciers. Les dirigeants ou l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée ne peuvent pas participer aux répartitions à concurrence des sommes au versement desquelles ils ont été condamnés ».
Article R. 651-1
« Le tribunal compétent pour statuer dans les cas prévus à l’article L. 651-2 est celui qui a ouvert ou prononcé la liquidation judiciaire ».
Article R. 651-2
« Pour l’application de l’article L. 651-2, le tribunal est saisi, selon le cas, par voie d’assignation ou dans les formes et selon la procédure prévues à l’article R. 631-4 ».
Article R. 651-3
« Les jugements rendus en application de l’article L. 651-2 sont communiqués par le greffier au procureur de la République ».
Article L. 651-3
« Dans les cas prévus à l’article L. 651-2, le tribunal est saisi par le liquidateur ou le ministère public.
Dans l’intérêt collectif des créanciers, le tribunal peut également être saisi par la majorité des créanciers nommés contrôleurs lorsque le liquidateur n’a pas engagé l’action prévue au même article, après une mise en demeure restée sans suite dans un délai et des conditions fixés par décret en Conseil d’Etat.
Les dépens et frais irrépétibles auxquels a été condamné le dirigeant ou l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée ou l’entrepreneur individuel relevant du statut défini à la section 3 du chapitre VI du titre II du livre V sont payés par priorité sur les sommes versées pour combler le passif ».
Article R. 651-4
« Pour l’application de l’article L. 651-3, la mise en demeure faite au mandataire de justice d’engager l’action en responsabilité est délivrée par au moins deux créanciers contrôleurs. Leur action n’est recevable que si cette mise en demeure, adressée au mandataire de justice par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, est restée infructueuse pendant deux mois à compter de la réception de la mise en demeure ».
Article L. 651-4
« Pour l’application des dispositions de l’article L. 651-2, d’office ou à la demande de l’une des personnes mentionnées à l’article L. 651-3, le président du tribunal peut charger le juge-commissaire ou, à défaut, un membre de la juridiction qu’il désigne d’obtenir, nonobstant toute disposition législative contraire, communication de tout document ou information sur la situation patrimoniale des dirigeants et des représentants permanents des dirigeants personnes morales mentionnées à l’article L. 651-1 ou encore sur les revenus et le patrimoine non affecté de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée ou sur les revenus et le patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel relevant du statut défini à la section 3 du chapitre VI du titre II du livre V, de la part des administrations et organismes publics, des organismes de prévoyance et de sécurité sociale, des établissements de paiement, des sociétés de financement, des établissements de monnaie électronique et des établissements de crédit.
Le président du tribunal peut, dans les mêmes conditions, ordonner toute mesure conservatoire utile à l’égard des biens des dirigeants ou de leurs représentants visés à l’alinéa qui précède ou encore des biens de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée compris dans son patrimoine non affecté ou des biens, droits ou sûretés du patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel relevant du statut défini à la même section 3. Il peut maintenir la mesure conservatoire ordonnée à l’égard des biens du dirigeant de droit ou de fait en application de l’article L. 631-10-1.
Les dispositions du présent article sont également applicables aux personnes membres ou associées de la personne morale en procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, lorsqu’elles sont responsables indéfiniment et solidairement de ses dettes ».
Article R. 651-5
« Pour l’application de l’article L. 651-4, le juge désigné par le président du tribunal peut se faire assister de toute personne de son choix dont les constatations sont consignées dans son rapport. Ce rapport est déposé au greffe et communiqué par le greffier au ministère public. Au moins un mois avant la date de l’audience, le greffier communique ce rapport aux dirigeants ou à l’entrepreneur mis en cause par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
Le tribunal statue sur le rapport du juge désigné après avoir entendu ou dûment appelé les contrôleurs.
Le montant des sommes pour la garantie desquelles la mesure conservatoire est ordonnée conformément au deuxième alinéa de l’article L. 651-4 ne peut excéder le montant de la demande formée à l’encontre du dirigeant ou de l’entrepreneur ».
Article R. 651-6
« Lorsqu’un dirigeant d’une personne morale ou un entrepreneur est déjà soumis à une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires, le montant du passif mis à sa charge est déterminé après mise en cause du mandataire judiciaire ou du liquidateur désigné dans la procédure à laquelle il est soumis. La décision de condamnation est portée par le greffier sur l’état des créances de la procédure à laquelle l’intéressé est soumis ou transmise au greffier compétent pour y procéder ».
NOTE
Les modifications apportées par la loi du 14/02/2022, n° 2022-172 et le décret du 14/06/2022, n° 2022-890 ont pour seule motivation, la possibilité de faire application de la responsabilité pour insuffisance d’actif à l’entrepreneur individuel, pour lequel une séparation du patrimoine personnel et du patrimoine professionnel a été constatée.
Ces dispositions entrent en vigueur à compter du 15/05/2022 et ne concernent que les procédures ouvertes à compter de cette date.
DALLOZ : Documentation – Encyclopédie – Répertoire de procédure civile : Nullité.
Documentation – Ouvrages DALLOZ – Droit et pratique de la procédure civile – Chapitre 272 : sanction des règles de formation des actes de procédure : vices de forme, irrégularité de fond
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